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Animaux : une sexualité pas si tendre !

Loin des belles images de parades amoureuses, dans le règne animal, le comportement sexuel peut aussi être très agressif. Les explications avec Farah Kesri, vétérinaire éthologue.

La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le

L'agressivité est généralement présente entre mâles pour accéder aux femelles, mais pas seulement. Elle peut aussi être dirigée contre des femelles y compris dans des espèces à la réputation paisible et au comportement social solitaire comme les orangs-outans. Contrairement aux autres grands singes, mâles et femelles vivent séparément et ne se rencontrent qu'en période de reproduction. Pour se retrouver, le mâle doit émettre un long cri audible dans un rayon d'un kilomètre, pour signaler sa présence.

Toutefois, s'il croise une femelle, ce n'est pas gagné pour autant. La femelle n'acceptera de se reproduire que si c'est un mâle dominant. Et chez les orangs-outans, la dominance est reconnaissable par la présence d'un disque facial. Les autres mâles, même s'ils sont matures sexuellement, n'auront pas les bourrelets graisseux tant qu'ils n'auront pas trouvé de territoire. Ces mâles moins populaires peuvent recourir parfois à la force pour s'accoupler avec une femelle non consentante.

Peut-on parler de viol pour une espèce animale ?

On ne peut pas parler de viol pour une espèce animale, ce serait un excès d'anthropomorphisme. En éthologie, on utilise plutôt le terme de coercition sexuelle, ce terme regroupe tous les comportements de harcèlement jusqu'à la copulation forcée. Mais certains trouvent plus vendeur pour un titre de presse le terme de viol alors qu'il est totalement déplacé pour des animaux. D'une part, le terme de viol n'a pas de sens en éthologie animale car on ne connaît pas grand-chose de l'univers émotionnel des différentes espèces. Ce n'est donc pas comparable à l'humain. D'autre part, c'est irresponsable parce qu'on risque de banaliser ce terme.

Dans les sciences évolutives, il y a débat. Il existe d'ailleurs un livre qui a choqué aux Etats-Unis, intitulé Une histoire naturelle du viol, publié par deux psychologues évolutionnistes américains. Ils démontrent que la stratégie des rapports sexuels forcés aurait été choisie par l'évolution et cela expliquerait le comportement sexuel agressif de certains humains. Autrement dit, si ça existe chez les animaux, c'est donc normal et c'est la faute de l'évolution. S'il y avait réellement un intérêt évolutif, ce comportement ne se limiterait pas à un taux de 0,6% toutes espèces confondues, il serait bien supérieur.

La guerre des sexes chez les animaux

On a observé ce comportement, y compris chez deux individus hermaphrodites : par exemple, le Glaucus Atlanticus, une sorte de limace des mers qui vit dans les eaux tempérées ou tropicales. Il possède en même temps, les organes reproducteurs mâle et femelle. Il ne peut pas s'autoféconder, il a besoin d'un partenaire. Mais contrairement à d'autres espèces hermaphrodites comme certains lézards, ils n'alternent pas les rôles. Tous les deux veulent absolument transmettre leurs gènes, il y a donc une bataille acharnée. Chacun tente de féconder l'autre, et ça peut durer assez longtemps pour y parvenir. 

Il est rare d'observer ce comportement entre deux individus d'espèces différentes. Dans une vidéo, une otarie écrase une femelle manchot empereur pour tenter d'avoir des relations sexuelles. Pour rappel, un mâle otarie peut atteindre deux mètres et peser jusqu'à 120 kilos alors que le manchot royal femelle mesure moins d'un mètre et pèse au maximum 18 kilos. Les images ont été prises par une équipe de l'université de Pretoria en Afrique du Sud qui a publié ses travaux dans un journal spécialisé dans l'étude des espèces polaires "polar biology".

Il n'y a pas d'explication, seulement des hypothèses. Ils ont observé ce comportement en 2006, 2008, 2011 et 2012.  chaque fois, dans ce même groupe. Ils supposent que ce comportement est appris entre otaries. Le scénario est toujours le même : une otarie poursuit un manchot, et tente de copuler durant cinq minutes. Une union forcément non-fertile puisque entre un oiseau et un mammifère. Il n'y a pas d'intérêt reproductif. En plus, il arrive que l'otarie tue le manchot et en mange une partie. Ce serait une sorte d'apprentissage associée à une récompense.

Il y a aussi l'hypothèse du manque de partenaires. Les otaries sont polygames, un mâle dominant à un groupe de femelles, tandis que les plus jeunes ou les moins robustes n'y ont pas accès. En tout cas, dans cette étude, à aucun moment les chercheurs n'utilisent le terme de viol, mais seulement celui de "coercition sexuelle". Il n'y a pas de jugement, ni de comparaison à effectuer, ce sont des faits assez isolés.

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