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Comment savoir si vous avez une bonne intelligence émotionnelle ?

Derrière ce terme parfois galvaudé se cachent des recherches scientifiques très sérieuses… et un pan entier de notre psychologie. Mais à quoi correspond l'IE et comment l'évaluer ? On vous explique.

La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le
Comment prendre soin de sa santé mentale  —  Allo Docteurs - Newen Digital

L’intelligence n’est pas seulement la capacité à résoudre des problèmes de logique, loin de là ! Ce mot désigne plus généralement les capacités à apprendre, à traiter des informations, à les comprendre, et à nous adapter à des situations nouvelles.

Or, parmi le flot d’informations qui nous parvient continuellement, il ne faut pas dédaigner celles que l’on nomme les émotions. Reconnaître et comprendre les émotions des autres, contrôler les siennes et orienter ses pensées et ses actions en rapport avec toutes ces "données" sont autant d’aptitudes précieuses qui constituent des fonctions très spécifiques de notre cerveau.

Un sujet d’étude récent en psychologie

L’intérêt pour cette facette de nos capacités intellectuelles est né au début des années 1990, avec la publication de travaux de Peter Salovey et John Mayer, deux psychologues nord-américains, qui ont tâché de circonscrire la nature de l’intelligence émotionnelle (IE) [1].

Divers auteurs se sont rapidement saisis du concept, y mêlant parfois des considérations sur les "traits de personnalité" individuels ou encore les compétences en management. Une approche "fourre-tout" bientôt dénoncée par de nombreux psychologues – dont Salovey et Mayer eux-mêmes ! – pour qui l’intelligence émotionnelle n’est pas l’addition arbitraire de notions psychologiques déjà connues, mais bien une chose en soi !

Percevoir, prioriser, comprendre et réguler

Dans sa définition la plus consensuelle, l’IE se déploie selon quatre axes :

  1. la capacité de percevoir ses émotions et celles d’autrui, savoir les identifier en tant que sensations (à partir de représentations, dans le langage, la tonalité de la voix, le comportement…), savoir exprimer ses émotions de manière précise et appropriée, savoir exprimer les besoins associés, savoir distinguer les expressions authentiques des autres, etc. 
  2. la capacité à donner des priorités à nos pensées en fonction de nos émotions, mais également la capacité à changer d’humeur pour considérer une situation sous une perspective différente, se mettre dans l’état d’esprit adéquat pour agir, etc.
  3. la capacité de comprendre et raisonner avec les émotions (qui passe par l’aptitude à nommer les émotions, à interpréter leur signification, à identifier les émotions mêlées…)
  4. la capacité de réguler ses propres émotions – voire celles des autres –, l’aptitude à atténuer les émotions négative, ainsi que l’attention que l’on est capable de porter à toutes émotions… 

Dès lors que l’on prend conscience que ces aptitudes sont des compétences spécifiques, des tâches très particulières réalisées par le cerveau et que ces aptitudes ne sont pas identiques chez tout le monde, on réalise que l’intelligence émotionnelle est bien une forme d’intelligence en soi.

Moins de burn-out, de conflits ou d'addictions

L’agilité intellectuelle dans la perception, l’interprétation et la gestion des émotions n’est pas sans bénéfice dans la vie d’un individu. "Les études menées depuis le début des années 2000 ont montré qu’un individu émotionnellement intelligent, comparé à un individu qui l’est moins, tend par exemple à avoir moins de chance de tomber en burn-out [2]", nous détaille Christophe Haag, chercheur en psychologie sociale.

"De même, il tend à avoir une vie de couple plus harmonieuse et moins conflictuelle [3], à être moins sujet à certaines addictions comme l’alcoolisme [4]. Il s’avère capable de repérer très vite, dans une situation complexe, stratégique et stressante, les informations « clés » du problème [5]. Il a également une plus grande employabilité [6], et apparait plus performant dans son travail… [7]", poursuit-il.

Au quotidien, divers signes seraient selon lui évocateurs d'un tel profil intellectuel. "Une telle personne semble à l'aise dans presque tous les types de situations : elle est agile, s'adapte facilement. Elle sait écouter les autres et s'écouter, n'est pas toxique pour les autres, exprime parfaitement ses besoins".

Des tests plus ou moins fiables pour évaluer son IE

Mais comment évaluer son IE ? "D’un point de vue académique, plusieurs chercheurs à travers le monde ont développé des outils psychométriques de mesure de l’intelligence émotionnelle", nous explique Christophe Haag. Certains s'appuient sur les modèles que nous avons plus tôt qualifiés de « fourre-tout ». Ceux-ci "ont essuyé de lourdes critiques de la part de la communauté scientifique", poursuit Christophe Haag. "Au-delà du concept auquel il se réfère, ces tests sont auto-évaluatifs et sont donc biaisés car il est facile de deviner le sens des questions et de se montrer plus émotionnellement intelligent qu’on ne l’est en réalité…"

Un second type de tests existe : les tests "de performance". Il s’agit de questionnaires dans lesquels la personne testée doit identifier, analyser et traiter des informations chargées d’un point de vue émotionnel – un seul choix parmi ceux proposés correspondant à une posture "performante", jugée comme telle par des experts ou par des résultats de recherche scientifique.

Enfin, il existe des tests reconnus et utilisés par des professionnels appelés test de QE pour Quotient Emotionnel.

Peut-on tester son intelligence émotionnelle sur Internet ?

Si vous souhaitez explorer votre intelligence émotionnelle, méfiance ! "Beaucoup de tests présents sur Internet sont bricolés, et donc peu fiables", met vivement en garde Christophe Haag. "Gare au test gratuit ! Un test d’IE – comme un test de QI – digne de ce nom n’est pas accessible gratuitement."

Attention : si un test d'intelligence fiable est souvent payant, cela ne veut pas dire qu'un test payant est, lui, forcément fiable ! "Nous mettons donc également en garde contre les tests payants sur internet… Derrière les jolis graphiques se cachent souvent des propriétés psychométriques discutables !"

À défaut de conseiller un "test d'IE" ou de "QE", Christophe Haag met à disposition gratuitement une application développée en collaboration avec le Dr Moira Mikolajczak, Dr Mood"Chaque fois qu’une émotion naît en vous et que cela vous déstabilise ou vous interroge, vous pouvez consulter cette appli de gestion des émotions", explique-t-il. "L'objectif est de diagnostiquer, de comprendre et de réguler efficacement vos émotions au quotidien".

Quel est l'intérêt de faire évaluer son QE ?

En évaluant son QE avec un outil fiable, on peut identifier quelles dimensions de son intelligence émotionnelle peuvent être développées. "Car oui, l’IE, cela se travaille !", poursuit Chistophe Haag. 

"Contrairement à notre score de QI, qui a peu de chance d’augmenter après nos études, notre score de QE peut lui s’améliorer, et c’est là un vrai message d’espoir. Des études ont par exemple montré que, grâce à de petits exercices quotidiens (du développement personnel, de la lecture de romans de fiction – qui booste notre empathie –, une alimentation saine, de l’exercice physique, une faible prise de psychotropes, une curiosité qui vous pousse à sortir de vos zones de confort...) aident à développer son IE. Dévorer des séries télévisées dans lesquels la psychologie des personnages est complexe participe également à cette stimulation."

Et l’enthousiasme ne se justifierait pas seulement à titre personnel : "Le Dr Moira Mikolajczak et l'économiste Sébastien Van Bellegem ont récemment démontré qu’inclure une formation visant à développer l’intelligence émotionnelle dans les écoles permet d’augmenter de 10 % le score de QE des élèves, et reviendrait à diminuer à terme les coûts en soins de santé de 10 % ! Rendez-vous compte : rééduquer émotionnellement nos enfants pourrait contribuer à réduire le trou de la Sécu, largement creusé par la consommation de boîtes d’anxiolytiques chez les personnes souffrant de troubles anxieux…"


Notes et références

[1] Le terme est apparu dans la littérature scientifique dans le courant des années 60.
[2] Voir : Mikolajczak, Menil, & Luminet, 2007
[3] Voir : Schutte et al., 2001
[4] Voir : Cordovil de Sousa et al., 2008
[5] Voir : Fallon et al., 2014
[6] Voir : Nelis et al., 2011
[7] Voir : Côté & Miners, 2006

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