Dépakine : des effets toxiques sur plusieurs générations ?
La Dépakine fait encore parler d'elle. Ce médicament, qui était indiqué dans le traitement de l'épilepsie chez la femme enceinte, est à l'origine de malformations et des troubles du développement chez le foetus. Mais le drame ne s'arrête pas là. L'antiépileptique pourrait aussi avoir causé des conséquences sur les générations suivantes.
L'Association d'Aide aux Parents d'Enfants souffrant du Syndrome de l'Anti-Convulsivant (Apesac) et sa fondatrice, Marine Martin, alertent depuis plusieurs années sur un risque de transmission entre générations. Les personnes exposées in utero au valproate, le principe actif de la Dépakine, pourraient, selon l'association, avoir des enfants victimes de malformations ou de retards. Des enfants qui représenteraient donc la "deuxième génération Dépakine".
Une étude à l’appui
Pour étayer ces affirmations, 108 membres de l’association Apesac (85 femmes et 23 hommes) qui avaient été exposés au valproate in utero et présentaient des complications, ont été interrogés. Ces 108 adultes ont eu 187 enfants au total. Sur ces 187 enfants, non exposés au valproate, 23 % présentaient des malformations (mains, pieds, coeur, reins...) et 44 % des troubles neuro-développementaux (autisme, problèmes psychomoteurs, déficit d’attention…). 47 % des enfants ne présentaient aucun trouble.
Cette étude observationnelle est publiée dans la revue médicale, Birth Defects Research. L'épidémiologiste Catherine Hill, de l’Institut Gustave Roussy travaille sur le valproate depuis plusieurs années. Elle a participé à l’étude, de même que d’autres experts australien, anglais et français.
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Des données à confirmer
Cette étude présente quelques limites. La santé des enfants dont les parents n'ont pas eu de complications sévères après exposition au valproate in utero n’a pas été rapporté. Autre élément, ces résultats s’appuient sur des déclarations et non sur des diagnostics médicaux avérés. Cela justifie "la nécessité d'études sur l'impact transgénérationnel de la Dépakine" rapportent les auteurs.
"Jusqu'à présent, rien n'a été fait, les données recueillies par l'Apesac ont été méprisées par les autorités sanitaires " témoigne l'association. Ce mépris pour les victimes est "insupportable", ajoute Mme Martin.
Le valproate de sodium est commercialisé depuis 1967 par le laboratoire Sanofi sous les marques Dépakine (pour les patients épileptiques), Dépakote et Dépamide (pour les patients bipolaires), ainsi que sous des marques génériques.
Cette molécule serait responsable de malformations chez 2.150 à 4.100 enfants et de troubles neurodéveloppementaux chez 16.600 à 30.400 enfants selon des estimations de l'Assurance maladie et de l'Agence du médicament (ANSM). C'est l'un des plus grands scandales liés à l'industrie pharmaceutique de ces dernières années.