Fluoroquinolones : "Ni les médecins, ni les pharmaciens ne m'ont prévenu des effets secondaires"

Karim Laidi a gardé précieusement ses trois ordonnances datant de l’année dernière. C’est avec elles que son calvaire a commencé, lorsqu’il lui a été prescrit des fluoroquinolones pour une douleur au bas-ventre. Dès la première journée de prise, des symptômes apparaissent.

"On me dit que c'est dans la tête"

"J'ai des douleurs au poignet, au genou, aux chevilles et au dos. J'ai des craquements des os partout dans le corps et j'ai des neuropathies périphériques. La douleur se déplace", explique Karim Laidi.

Les ruptures de tendon, les nausées ou les troubles cardiaques sont des effets secondaires connus des fluoroquinolones. Mais Karim met longtemps à faire le lien avec ce médicament."Ni les médecins, ni les pharmaciens ne m'ont prévenu sur les éventuels effets secondaires de ces médicaments. Je leur parle des douleurs, on me dit que c’est dans la tête... On n'a pas voulu me croire alors que j’étais sûr que c’était ça", confie Karim.

Six millions de prescriptions injustifiées

Dans le cas de Karim, les fluoroquinolones n’étaient pas recommandées en première intention.   
Comme lui, ils sont une trentaine de patients à s’être tournés vers un cabinet d’avocat. 20 plaintes seront déposées d’ici la fin du mois.

"Ce qui les motive à porter plainte, c'est que cet engouement dans la prescription des fluoroquinolones cesse et que les prescripteurs puissent prendre conscience de la gravité des effets secondaires de ces médicaments. Le but aussi est peut-être d'envisager une restriction drastique de ces prescriptions et de ne permettre ces dernières qu'au milieu hospitalier", explique Maître Maxime Bailly, avocat.

Les fluoroquinolones seraient encore trop souvent utilisées. Selon l’agence européenne du médicament, près des deux-tiers des prescriptions se trouveraient en dehors des recommandations en vigueur. Cela représenterait six millions de prescriptions en quatre ans, d'après une association de patients.

Une utilisation restreinte depuis 2019

"Dans les infections bénignes en médecine ambulatoire, il n'y a pas lieu de prescrire des fluoroquinolones en première intention. Dans ce contexte-là, on peut parler de surprescription", confie le Dr Stéphane Mouly, médecin interniste à l'hôpital Lariboisière.

"Il faut réserver leur usage en deuxième intention, en cas d'échec d'une première ligne d'antibiothérapie, mais également au cours des infections sévères conduisant les malades à l'hôpital. Je pense aux infections de la prostate chez l'homme, aux infections rénales très graves, articulaires ou cardiaques", précise t-il.

En 2019, l’ANSM avait alerté par courrier les professionnels de santé sur les risques de graves effets indésirables. Les patients attendent eux de savoir qui est responsable dans cette affaire.