Fractures, nodules... quand l'intelligence artificielle participe au diagnostic
L'intelligence artificielle (IA) aide désormais les urgentistes et les radiologues à réaliser leurs diagnostics, notamment en cas de fracture. Reportage à l'hôpital Cochin, à Paris.
En allant au travail à pied ce matin, Éliane, 66 ans, s’est tordu la cheville droite.
Pour vérifier l’absence de fracture, Éliane doit passer des radiographies. Les clichés sont transférés instantanément sur l’ordinateur de Suyeon Seo, l’interne. Et pour compléter son analyse, l’interne peut, depuis quelques mois, consulter un nouvel outil de pointe : un logiciel d’intelligence artificielle.
Ne plus passer à côté d'une fracture
"L’intelligence artificielle regarde s’il y a une fracture ou une luxation, retrouvées à la radio. On voit ici qu’elle ne trouve pas de fracture ce qui confirme notre hypothèse. Quand on a un doute sur une fracture, on peut utiliser l’intelligence artificielle pour savoir si c’est concordant avec notre hypothèse diagnostic", explique Suyeon Seo, interne aux urgences de l'hôpital Cochin, à Paris.
Éliane souffre donc d’une simple entorse qui sera traitée avec des antidouleurs et une attelle. Chaque jour, 185 patients sont pris en charge dans ce service d’urgences. L’intelligence artificielle apporte une aide précieuse aux médecins, car ici, il y a énormément d’imagerie à analyser.
"Sur cette radio d’épaule, d'humérus gauche, chez une patiente qui a fait une chute mécanique, le logiciel dit qu'il y a une fracture et montre que cette fracture est présente. Devant le nombre de patients qu'on voit aux urgences et le nombre de radios très importantes, si on est moins attentif, ce qui peut arriver, cette signalétique va permettre de ne pas passer à côté", confie le Pr Benoît Doumenc, chef de service des urgences à l'hôpital Cochin.
Moins 30 % des fractures non-détectées
Selon le fabricant de ce logiciel, l’intelligence artificielle permettrait une diminution de 30 % du nombre de fractures non détectées. C'est une nouvelle technologie dont l’efficacité est également constatée par l’équipe de radiologie.
"Cet exemple montre ici une lésion qui est cachée derrière le cœur, une petite opacité ronde. J'ai fait le test beaucoup de radiologues et surtout les juniors ne voient pas la lésion. Si on applique l’intelligence artificielle, elle a parfaitement identifié le nodule et ça a détecté en plus quelque chose de très dur à voir, le décollement du poumon, un pneumothorax", commente la Professeure Marie-Pierre Revel, cheffe du service de radiologie de l'hôpital Cochin à Paris.
De l'apprentissage programmé à l’autonomie totale
Mais cette intelligence artificielle a encore des limites : elle décèle uniquement les lésions pour lesquelles elle a été entraînée.
"Pour une patiente qui a une fibrose pulmonaire, l'IA n’a pas été capable de détecter un nodule de deux centimètres. Mais aucun nodule trouvé, on ne lui a pas appris à reconnaître ce type de lésion dans un environnement particulier, ce qui ne pose aucun problème pour les radiologues donc les deux sont complémentaires", confie la Pre Marie-Pierre Revel.
L’intelligence artificielle n’est donc pas prête de remplacer les radiologues, qui restent pour le moment les seuls responsables de leurs diagnostics.