Infirmières en Ehpad : "Au bout de deux ans, elles changent de métier"
Le secteur des Ehpad peine à recruter des infirmiers et des aides-soignants. Reportage dans un Ehpad de Maromme, en périphérie de Rouen, qui a fait appel à une infirmière retraitée pour venir en aide à l'équipe soignante.
Il est midi, l’heure pour Simone, 94 ans, de passer à table. Mais aujourd’hui, c’est un déjeuner un peu particulier qui l’attend."Habituellement, on mange tous ensemble au restaurant avec les résidents, mais là mon fils vient manger avec moi, au restaurant 'Chez Maman'", se réjouit Simone.
Faciliter les échanges et les rencontres
Pour s’y rendre, il lui suffit de rejoindre la galerie commerçante située au rez-de-chaussée de son Ehpad, Le village des Aubépins, à Maromme, près de Rouen, dans lequel elle vit depuis un an et demi. Coiffeur, atelier de couture, esthéticienne, restaurant, sont ici à portée de déambulateur… et accessibles à toute personne extérieure à l’établissement.
Permettre aux personnes âgées de rester en contact avec le monde extérieur, faciliter les échanges, les rencontres, font partie des priorités de cet Ehpad public qui a ouvert ses portes en 2013.
Seulement 3 infirmières pour 80 résidents
Le bâtiment est récent, ouvert sur l’extérieur mais, comme dans la plupart des établissements, la directrice est confrontée au manque de personnel soignant. Clara Salmen est infirmière coordinatrice. Depuis 2019, elle gère les plannings de l’équipe soignante.
Lorsqu'il y a des demandes de vacances, cela aggrave une situation déjà précaire. Pour s’occuper des 80 résidents, seulement cinq infirmières se relaient nuit et jour, et depuis quelques semaines, deux d’entre elles manquent à l’appel.
"Cette ligne, c’est une personne qui est en congé parental, cette autre ligne est une personne partie en libéral… Voilà deux personnes absentes sur un effectif de 4,5, c’est la moitié de l’effectif", précise Marie-Pascale Mongaux, directrice de l'Ehpad Le Village des Aubépins.
"C'est triste de savoir qu'on ne trouve personne"
Malgré la revalorisation de salaire de 183 euros net par mois prévue par le Ségur de la santé pour ce type de poste, l’établissement n’a encore reçu aucune candidature. Alors en attendant, la directrice n’a pas eu d’autre choix que de faire appel à une infirmière retraitée.
À la retraite depuis 2016 après 39 ans passés comme infirmière au CHU de Rouen, Claudie Lecoq n’a pas hésité à remettre sa blouse. "Je suis contente de venir retravailler pour aider mes collègues qui sont dans le besoin, car on manque d’infirmières. C'est triste de savoir qu’on ne trouve personne pour la prise en charge de nos résidents en Ehpad", commente-t-elle.
3 000 postes créés cette année
"La plupart des personnes qui veulent travailler dans ces professions le font pour le relationnel et depuis des années, elles ne font plus de relationnel, elles sont stressées, complètement à la tâche, au bout de deux ou trois ans, on les perd, elles changent de métier", s'attriste Pascale Mongaux.
3 000 postes supplémentaires d’infirmiers et d’aides-soignants en EHPAD devraient voir le jour cette année pour alléger la charge de travail de ces postes et les rendre plus attractifs.