IVG après 12 semaines : ce qui pourrait bientôt changer
L’assemblée nationale a adopté le 30 novembre la proposition de loi visant à allonger le délai légal d’interruption volontaire de grossesse (IVG) à 14 semaines de grossesse au lieu de 12. Comment les femmes font pour avorter si elles dépassent ce délai ? La procédure pratiquée par les gynécologues sera-t-elle modifiée si la loi est approuvée ? On fait le point.
Actuellement, la méthode retenue pour pratiquer une interruption volontaire de grossesse IVG (hors interruption pour raisons médicales) dépend du délai légal fixé par la loi.
Pour l’IVG médicamenteuse en cabinet médical, elle est possible jusqu’à la fin de la 5e semaine de grossesse, et 7 semaines si elle est réalisée dans le milieu hospitalier. "A titre dérogatoire, pendant la période d’État d’Urgence Sanitaire lié au COVID, des adaptations sont opérées". En effet, le suivi peut être effectué par "téleconsultation" et les délais portés jusqu’à 7 semaines de grossesse, détaille le ministère de la Santé.
Concernant l’IVG "chirurgicale" ou par aspiration, elle peut être pratiquée jusqu’à la fin de la 12e semaine de grossesse sous anesthésie locale ou générale.
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Au delà de 12 semaines
Pas de solution en France à ce jour. Les femmes doivent se rendre à l’étranger pour avorter.
Aux Pays-Bas, en Espagne, en Angleterre et aux Etats-Unis, la loi autorise l'IVG au-delà de 12 semaines de grossesse. Sur son site, le Planning Familial rappelle : "Vous avez le droit de partir à l’étranger pour réaliser un avortement mais cela a un coût. Pour plus d’informations, vous pouvez contacter le Planning Familial de votre département ou appeler notre numéro vert 0 800 08 11 11".
Quelle méthode d'IVG après 12 semaines ?
La procédure employée consiste en une "dilatation - évacuation", sous anesthésie générale ou sédation profonde, et semble faire débat au sein de la communauté médicale.
Certains comme le Pr Israël Nisand, ancien président du Collège national des gynécologues et obstétriciens français, a déclaré à Figaro Vox que cette procédure pouvait être un "calvaire" à réaliser.
Au contraire, cette procédure n’est pas "très compliquée" techniquement explique le Dr Philippe Faucher, gynécologue obstétricien à l’hôpital Armand-Trousseau et responsable de l’Unité d’Orthogénie qui s’occupe des IVG et des contraceptions. C’est une technique "ancienne mais actuellement peu utilisée. Ce sont plutôt les anciens gynécologues-obstétriciens qui connaissent cette procédure, utilisée dans les interruptions médicales de grossesse (...) très peu de jeunes obstétriciens sont formés", détaille le gynécologue. Il s'est lui-même formé auprès de confrères français. Cette procédure est aussi employée "chez les anglais, les hollandais, ou encore les suédois", ajoute le Dr Philippe Faucher.
Et qu’en est-il de la sécurité des patientes avec cette technique ? "Les études montre que le risque de complications est identique avec une IVG par aspiration réalisée à ce terme", souligne le Dr Faucher.
"Rendre service aux femmes"
"Cela n’est pas le geste la plus agréable à faire en tant que médecin" et il convient que "certains médecins ne voudront pas le faire" mais le Dr Philippe Faucher insiste aussi : "C’est un geste médical… et beaucoup d’autres gynécologues voudront le faire pour rendre service aux femmes". Pour le gynécologue-obstétricien, "le débat doit avoir lieu dans la communauté des médecins" et il ne faut pas "mettre les femmes ni le grand public dans ces débats techniques".
En 2020, 222 000 interruptions volontaires de grossesse ont été réalisées en France. La proposition de loi sur l'allongement de la durée légale de l'IVG sera finalement examinée en janvier au Sénat, ce qui ouvrirait la voie à son adoption définitive d'ici la fin de la mandature.