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Cancer : ce qu'on retiendra du congrès de l'ASCO 2017

Parmi les très nombreuses études dévoilées entre le 2 et le 6 juin 2017 lors de la conférence de l'American Society of Clinical Oncology (ASCO, le plus grand congrès mondial sur le cancer, à Chicago), plusieurs ont marqué les esprits des spécialistes présents. Retour sur les travaux les plus marquants mis en avant lors de cette édition.

La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le
Quelles avancées pour le cancer ? - Entretien avec le Pr Fabrice André, oncologue à l'Institut Gustave-Roussy (Villejuif)

Cancer métastatique du poumon : des résultats encourageants

Une nouvelle thérapie ciblée arrête pendant plus de deux ans la progression d'une forme agressive du cancer du poumon, soit près de trois fois plus longtemps que le traitement de référence actuel, selon les résultats d'un essai clinique présenté le 5 juin. L'Alecensa (alectinib), des laboratoires helvétiques Roche, a ainsi bloqué 15 mois de plus la prolifération de ce cancer pulmonaire non à petites cellules (CPNPC) avec la mutation génétique ALK, que le Xalkori (crizotinib) du concurrent américain Pfizer, montrent les données de cette étude menée avec 303 patients.

"Personne n'aurait imaginé possible de retarder aussi longtemps la progression d'un cancer avancé du poumon puisque pour la plupart des thérapies ciblées pour les tumeurs pulmonaires on obtient un arrêt de la progression de la tumeur autour de douze mois", a expliqué la Dr Alice Shaw, directrice du service de cancérologie thoracique au Massachusetts General Hospital à Boston, co-auteure de ces travaux.

Ces deux molécules, l'Alecensa et le Xalkori, ciblent la mutation du gène ALK, qui affecte 5% environ de toutes personnes atteintes d'un cancer du poumon "CPNPC" et dope la prolifération des cellules cancéreuses.

L'Alecensa est pour le moment autorisé seulement pour les malades atteints de ce cancer du poumon ALK-positif dont l'état s'est aggravé malgré un traitement avec le Xalkori, la thérapie initiale de choix actuelle. Ce dernier essai clinique a montré que l'Alecensa réduisait le risque de progression ou de décès de 53% par rapport au Xalkori puisque les malade vivent 25,7 mois (valeur médiane) après le diagnostic, contre 10,4 mois avec le Xalkori.

Les chercheurs ont également constaté qu'il y avait nettement moins de métastases du cerveau avec l'Alecensa (9% des patients) qu'avec le Xalkori (41% des malades). Des effets secondaires sévères (fatigue, constipation et douleurs musculaires) ont été constatés chez 41% des participants de l'étude traités avec de l'Alecensa, contre 50% dans le groupe du Xalkori.

Une nouvelle thérapie prometteuse contre le cancer de la prostate

Ajouter un nouveau traitement anti-hormonal au standard contre le cancer agressif de la prostate a réduit jusqu'à 38% le risque de mortalité plus précoce des patients, selon deux essais cliniques dont les résultats ont été publiés le 3 juin 2017. Une avancée majeure dans le traitement de ce type de cancer.

L'abiratérone (Zytiga®) est une molécule qui bloque la production de testostérone, l'hormone mâle, par les testicules, la glande surrénale et la tumeur elle-même. Cette nouvelle molécule, combinée à la prédnisone (qui est un corticoïde et s'oppose à certains effets de la tumeur, comme l'augmentation de calcium, les douleurs, les vomissements,...), permet aussi de retarder de 18 mois (de 14,8 à 33 mois) la progression de ce cancer agressif, indique l'une des études cliniques de phase 3 dite LATITUDE, menée par le Dr Karim Fizazi, chef du service de cancérologie à l'Institut Gustave-Roussy, à Paris. 

"Le Zytiga® non seulement prolonge la vie, mais réduit aussi le risque de rechute de 70% et celui de complications osseuse de 50%", souligne le professeur James. L'étude LATITUDE parvient à une baisse du risque de décéder de 38% après une période de suivi de 30,4 mois ce qui fait que le gain de survie pourrait être encore plus grand sur une période plus longue. "Vu l'importance de ces bienfaits cliniques, nous pensons que le traitement standard des patients venant d'être diagnostiqués d'un cancer agressif de la prostate devrait changer", estime-t-il. Le professeur Fizazi relève "l'énorme besoin non satisfait d'améliorer le traitement pour les hommes venant d'être diagnostiqués d'un cancer métastatique de la prostate qui actuellement décèdent de la maladie en moins de cinq ans".

Le cancer de la prostate est la première cause de mortalité par cancer chez les hommes aux Etats-Unis avec 161.360 nouveaux cas par an ainsi que 26.730 décès, selon l'American Cancer Society. Cette tumeur est aussi le cancer le plus fréquent chez les hommes en France avec plus de 55 000 nouveaux cas par an et de 8.000 à 9.000 décès.

La grossesse n'est pas risquée pour les femmes ayant eu un cancer du sein

La grossesse ne présente pas de risque accru de rechute pour les femmes ayant eu un cancer du sein et dans certains cas le réduit même, indique une étude internationale rassurante, la plus étendue menée à ce jour sur ce sujet.

"Notre étude confirme que la grossesse après un cancer du sein ne devrait pas être découragée même chez les femmes dont la tumeur était hormono-dépendante", a souligné le Dr Matteo Lambertini de l'Institut Jules Bordet à Bruxelles, qui a dirigé ces travaux. Parmi les femmes dont le cancer mammaire était hormono-dépendant, soit 57% du total des participantes, plus de 40% avaient aussi des facteurs négatifs pour le pronostic comme une tumeur de grande taille ou qui s'est propagée aux ganglions. 

Sur les 1.207 participantes, 333 sont tombées enceintes dans une période médiane de 2,4 ans après le diagnostic, a précisé le Dr Lambertini. Aucune différence n'a été constatée dans le taux de rechute et de survie entre celles qui ont eu un enfant et les autres au cours d'une période de suivi de dix ans. Chez les femmes dont la tumeur du sein n'était pas hormono-dépendante, celles qui ont eu une grossesse avaient 42% moins de risque de décéder d'une rechute du cancer que les autres. Selon les chercheurs, cela suggère que la gestation pourrait en fait avoir des effets protecteurs contre une résurgence de la tumeur, suppute le Dr Lambertini.

Bien que la moitié des jeunes femmes venant d'être diagnostiquées d'un cancer du sein montrent un intérêt pour la maternité, moins de 10% tombent enceintes après leur traitement anti-cancéreux. Cette étude révèle également que les femmes ayant eu un cancer du sein hormono-dépendant tombent enceintes plus tardivement que celles dont la tumeur n'entre pas dans cette catégorie.

La méditation : une discipline à explorer

La méditation, la relaxation et l'aide psychologique deviennent des armes à part entière dans la prise en charge des cancéreux et des malades en rémission, montrent plusieurs études cliniques présentées au plus grand colloque mondial sur cette pathologie.

La diminution de la peur et de l'anxiété "était suffisamment importante pour améliorer le bien-être psychologique et émotionnel de survivants du cancer”, explique la Dr Jane Beith, cancérologue à l'Université de Sydney en Australie.

Selon elle, environ 50% de tous les malades en rémission, quelque soit le type de tumeur, et 70% des jeunes femmes ayant survécu à un cancer du sein, font part d'une crainte importante de rechute. Cette peur reste stressante au point d'affecter l'efficacité du suivi médical, le comportement et les relations avec l'entourage et au travail, et d'une façon générale, empoisonne la vie, explique la Dr Beith. Pour son étude, effectuée avec 222 patients sans plus aucune trace de cancer, la moitié, pris au hasard, a participé à cinq séances de 60 à 90 minutes avec un thérapeute professionnel tandis que les autres n'ont reçu aucune aide psychologique. Cet accompagnement a consisté en des exercices d'assouplissement musculaire, de relaxation et de méditation.

Une application pour augmenter l'espérance de vie des malades

Une application web par laquelle des malades atteints d'un cancer avancé peuvent en temps réel signaler leurs symptômes a produit des effets bénéfiques substantiels, dont une espérance de vie allongée, a révélé un essai clinique. Celle-ci représente un gain de 20% (31 mois comparés à 26 mois) et ce, avec une meilleure qualité de vie, a précisé le Dr Ethan Basch, professeure de médecine au centre du cancer Lineberger de l'Université de Caroline du Nord à Chapel Hill, principal auteur.

L'étude, menée de septembre 2007 à janvier 2011 et qui comptait 58% de femmes, est également publiée en ligne dans le Journal of the American Medical Association (JAMA). Les calculs ont été effectués en juin 2016 après que 67% des participants furent morts, mois marquant une durée de suivie de sept ans.

"Le gain de survie pourrait paraître modeste mais en fait il est supérieur à ce qui est obtenu avec de nombreux médicaments très coûteux qui ciblent les cancers avancés", pointe le Dr Basch. "Les malades qui suivent une chimiothérapie ont souvent des symptômes sévères (nausées, douleurs, fatigue, difficultés respiratoires) et les médecins comme les infirmières n'en sont informés que la moitié du temps", explique le chercheur. "Nous avons constaté que le système d'application web pour signaler ces symptômes en temps réel alerte l'équipe soignante qui peut agir sans attendre pour soulager les malades", poursuit-il.

La fréquence des alertes était en général d'au moins une fois par semaine. En cas d'aggravation, ils correspondaient avec les infirmières par courriel, quand les malades du groupe témoin devaient en informer celles-ci par téléphone. Ce système d'alerte par l'application "Symptom Tracking and Reporting" a permis de nettement réduire les visites aux urgences pour ces patients qui ont aussi mieux toléré la chimiothérapie sur la durée, restant ainsi plus actifs. Tous ces facteurs ont contribué à l'allongement de leur vie.

Parmi les difficultés pour généraliser cette application qui n'est pas commercialisée, les chercheurs citent la conception des dossiers médicaux électroniques et le fait que les médecins ne seraient pas payés par les assurances dans le système actuel. Mais, souligne le professeur Basch, ce système est "prometteur" à la fois pour soulager les souffrances des malades et améliorer la qualité de leur existence pendant les derniers mois de vie tout en permettant d'économiser des millions de dollars.

Un traitement prometteur contre le cancer de l'ovaire

Un essai clinique sur un traitement destiné aux patientes atteintes d’un cancer de l’ovaire et porteuses d’une mutation génétique BRCA a donné des résultats très encourageants.

On estime qu’environ 2 femmes sur 1.000 sont porteuses d'une mutation du gène BRCA1 ou du BRCA2. Des gènes qui participent à la réparation des lésions que l’ADN subit régulièrement. La présence de mutations dans l’un de ces deux gènes perturbe cette fonction et fait augmenter fortement le risque de cancer du sein et de l’ovaire.

Sans cette fameuse protéine BRCA, les lésions de l'ADN sont si nombreuses, qu'il est impossible de les réparer. Pour les chercheurs, la meilleure solution est donc d'aggraver la situation dans les cellules tumorales en détruisant l'autre équipe de réparation de l'ADN, les PARP (poly-ADP-ribose-polymérases). En l'absence totale de ces "raccommodeurs" de génome, ces cellules malades vont mourir par excès de mutations non contrôlées. C'est le principe d'un médicament innovant dans le traitement du cancer de l'ovaire : l'olaparib.

"Les résultats sont spectaculaires puisque chez les patientes qui n'ont pas l'olaparib, c'est-à-dire à qui l’on fait de la chimiothérapie et que l'on surveille, la rechute survient malheureusement dans un délai moyen d'un peu moins de six mois. Si vous donnez ce médicament, le bénéfice est d'un peu plus d'un an", a expliqué à nos journalistes le Pr Eric Pujade-Lauraine, oncologue, professeur à l’Université Paris-Descartes.

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