Santé et travail : quand le cancer menace
Quand on parle de cancer d'origine professionnelle, on pense surtout à l'amiante à l'origine de cancers du poumon et de mésothéliome. Mais d'autres cancers peuvent être provoqués par les substances manipulées, comme des leucémies, des cancers ORL, de la vessie… On estime que 15 % des cancers qui surviennent aujourd'hui peuvent avoir une origine professionnelle, pourtant rarement reconnue.
Cancers professionnels : causes et mécanismes
En temps normal, les cellules ne se divisent que si elles en reçoivent l'ordre. Certains signaux de l'organisme les poussent à se multiplier, tandis que d'autres vont à un autre moment bloquer leur division. Grâce à ce mécanisme, même quand par hasard au cours des multiplications, une cellule anormale apparaît, un programme interne se déclenche et la conduit à se détruire, c'est l'apoptose.
Ces différents ordres permettent un contrôle précis de la vie d'une cellule et évitent aussi l'apparition de cellules malades. Mais ces ordres ne peuvent être exécutés que grâce à la présence au niveau de l'ADN de gènes particuliers. D'un côté, les proto-oncogènes conduisent à la prolifération normale des cellules. Et de l'autre côté, les anti-oncogènes vont inhiber la prolifération. Tant que l'équilibre entre les deux groupes est maintenu, tout va bien et la cellule continue à suivre les signaux qui lui parviennent.
Mais l'ADN est sensible aux agressions externes, notamment au niveau de ces gènes régulateurs. Il peut être endommagé par l'exposition à des substances chimiques comme l'amiante, le radon, le benzène ou l'arsenic. Quand les gènes régulateurs sont lésés par ces substances et qu'ils ne sont pas réparés, une cellule peut devenir cancéreuse. Elle ne répond plus alors aux signaux de contrôle, elle échappe à la mort cellulaire programmée et devient capable de se diviser indéfiniment pour former une tumeur cancéreuse.
Dans certains milieux professionnels, les travailleurs sont justement exposés à des agents cancérigènes à des doses élevées et de façon répétée. Autrement dit, leurs gènes sont plus souvent agressés que le reste de la population. Ils ont donc plus de risque de développer un cancer.
En France, selon l'INRS (Institut National de Recherche et Sécurité), 2 370 000 de salariés sont exposés à des produits cancérigènes : commerce et réparation automobile, métallurgie, industries du bois et du papier, industrie des produits minéraux et construction ainsi que des salariés dans les secteurs de l'éducation, la santé et les services personnels.
Faire reconnaître un cancer professionnel
Pour faire reconnaître l'origine professionnelle de son cancer, une des premières étapes peut être de passer par un centre de consultation de pathologie professionnelle à l'hôpital. On en compte 32 en France, leur mission est de vous aider et de vous conseiller dans vos démarches.
Si vous pensez avoir un cancer professionnel, il ne faut pas hésiter à consulter ces centres mais la patience est de mise. Ces consultations sont débordées, il faut souvent plusieurs mois avant d'obtenir un rendez-vous.
Enfin vous pouvez également vous adresser à votre médecin traitant. Des délégués de l'Assurance-maladie forment et informent les médecins traitants sur les risques professionnels. Exposez-lui précisément votre parcours, les différentes substances auxquelles vous avez été exposé et vos conditions de travail.
Quand l'origine professionnelle n'est pas reconnue
La Sécurité sociale reconnaît une quinzaine de cancers d'origine professionnelle, comme les cancers liés à l'amiante qui représentent aujourd'hui 85 % des cancers reconnus par l'ATMP (branche accidents du travail et maladies professionnelles de l'Assurance-maladie).
En dehors de cette liste, c'est-à-dire des tableaux de la Sécurité sociale, il est souvent très difficile d'obtenir la reconnaissance de l'origine professionnelle. Les plus pugnaces doivent aller en justice pour obtenir gain de cause.
L'ATMP reconnaît 500 maladies professionnelles réparties sur 117 tableaux. Seulement 13 à 14 tableaux sont dédiés aux cancers.
Aujourd'hui quand un risque de cancer professionnel est avéré l'employeur et la médecine du travail ont obligation d'en informer les salariés. Les molécules classées cancérogènes doivent également être retirées s'il existe une alternative moins dangereuse.
Les associations de malades estiment qu'aujourd'hui 90 % des cancers professionnels ne sont pas déclarés ou reconnus, notamment parce que les salariés ont peur de perdre leur travail. En cas de cancer professionnel, c'est à la victime d'apporter la preuve de son exposition et de faire constater dans un certain délai sa maladie par un médecin.
En savoir plus : vos questions, nos réponses sur les cancers professionnels
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