Une hormone au secours des troubles sociaux de l’autisme ?
La vasopressine améliore les comportements sociaux chez les personnes souffrant de troubles du spectre autistique (TSA), selon deux études. Doper les concentrations de cette hormone ou la bloquer constituent deux pistes de traitement efficace.
Comportement répété en boucle, incapacité à croiser le regard d’autrui ou à montrer de l’affection… Comment réduire les troubles sociaux chez les personnes souffrant d’autisme ? La piste d’une thérapie hormonale efficace pour améliorer lea sociabilité des patients est à l’étude, selon deux publications à paraître le 8 mai 2019 dans la revue Science Translational Medicine. Dans les deux cas, une hormone bien connue pour influencer les comportements sociaux donne des idées de traitement des scientifiques : la vasopressine.
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Une hormone en spray nasal chez les enfants
La première étude a été menée par chercheurs en psychiatrie et en sciences du comportement à l’université de Stanford (États-Unis). Elle porte sur 30 enfants âgés de six à douze ans et souffrant de troubles du spectre autistique (TSA). Pendant un mois, ils ont reçu tous les jours par spray nasal soit de la vasopressine (pour 17 d’entre eux), soit un placebo (pour les 13 autres). Les chercheurs ont évalué leurs compétences sociales au début et à la fin de cette expérience notamment grâce à des questionnaires remplis par les parents et à des tests d’interprétation des émotions d’autres personnes à partir de leur expression faciale.
Résultat : les jeunes patients ayant reçu la vasopressine présentaient de meilleures compétences sociales au terme du traitement que ceux ayant reçu le placebo. Plus précisément, "cette étude pilote a déterminé qu’un traitement à la vasopressine par spray nasal pendant quatre semaines comparé à un placebo améliorait les capacités de communication sociale, diminuait les symptômes d’anxiété et réduisait les comportements répétés chez les enfants avec un TSA" écrivent les chercheurs dans leur publication.
Un antagoniste de l’hormone chez les adultes
La deuxième étude a quant à elle été menée par des experts travaillant pour les laboratoires Roche. Elle a porté sur 223 hommes adultes souffrant de TSA. La substance utilisée pour ces travaux est le balovaptan, un antagoniste des récepteurs de la vasopressine. Autrement dit, il s’agit d’une molécule qui se fixe à la place de la vasopressine sur les récepteurs de l’hormone et bloque donc son action. Pendant 12 semaines, les patients ont reçu du balovaptan à faible, moyenne ou forte dose ou un placebo, par voie orale. Les scientifiques ont alors observé que les hommes traités au balovaptan faisaient preuve d’une communication accrue et de meilleures compétences sociales que les autres. Mieux, plus la dose de balovaptan est élevée, plus grands sont les progrès.
"Un intervalle optimal pour le fonctionnement de la vasopressine"
Ainsi, la piste hormonale est prometteuse, d‘autant que dans ces deux cas, les substances utilisées étaient bien tolérées par les patients et les effets secondaires restaient minimes. Mais une question reste en suspens : pourquoi l'action d'augmenter la quantité de vasopressine et celle de bloquer cette même hormone par un antagoniste possèdent le même effet bénéfique sur les symptômes de l’autisme ? La docteure Karen Parker, autrice principale de la première étude, confie son hypothèse au site New Scientist : "La meilleure façon pour moi d’expliquer cela pourrait être qu’il existe un intervalle optimal pour le fonctionnement de la vasopressine et qu’il n’est pas bon de s’en écarter vers le haut ou vers le bas ". Des études supplémentaires sont désormais nécessaires pour valider cette hypothèse et pour affiner la compréhension du mécanisme hormonal en jeu.
De plus, les prochaines études devront dépasser les limites de ces deux travaux : le premier ne porte que sur un échantillon réduit de jeunes patients et sera donc à reproduire sur un plus grand nombre de sujets. Le deuxième comporte quant à lui un conflit d’intérêt puisque le balovaptan est commercialisé par le laboratoire Roche lui-même. L’essai devra donc être reproduit par des scientifiques indépendants, sur un nombre plus conséquent de participants incluant également des femmes.