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Les kystes de Tarlov, une affection invalidante

Maladie méconnue, les kystes de Tarlov et les kystes méningés, situés le long de la colonne vertébrale ont parfois un retentissement majeur et peuvent nécessiter une chirurgie.

Dr Charlotte Tourmente
Rédigé le

Des symptômes nécessitant un diagnostic rapide

Les kystes de Tarlov sont des poches remplies de liquide céphalo-rachidien, le liquide dans lequel baignent la moelle épinière et le cerveau. Ils se situent entre les racines des nerfs émergeant entre les vertèbres sacrées (en bas du dos). Ils prennent le nom de kystes méningés ou radiculaires sur le reste de la colonne vertébrale. L'origine des kystes est mal connue, même si une cause traumatique, autrement dit liée à un choc ou un accident, est évoquée.

"La fréquence varie de 5 à 7% si l'on parle des kystes sacrés seulement et si l'on prend la totalité de la colonne, on arrive à 13 à 14%", analyse le Dr Robin Srour, neurochirurgien et spécialiste des kystes de Tarlov. "Les kystes ne provoquent souvent aucun symptôme mais s'ils compriment les racines nerveuses, les kystes de Tarlov sont alors responsables de douleurs du sacrum dans le bas du dos, dans les fesses, le bassin et les jambes. "

"Au départ en juin 2014, j'avais surtout des douleurs lombaires (NDLR : dans le bas du dos) de temps en temps, puis elles sont descendues jusqu’au coccyx et sont devenues permanentes et violentes, raconte Marine qui souffre d'un kyste de Tarlov. Avant l'opération d’avril 2018, je ne pouvais même plus m'asseoir et j'étais soit debout soit allongée ! Et même debout j’avais de forts picotements et des décharges électriques dans les jambes, qui limitaient de plus en plus la marche, ainsi que des douleurs au niveau du périnée et de grosses migraines."

Les kystes peuvent aussi provoquer d'autres symptômes, comme une sensation de faiblesse ou de gonflement le long de la colonne vertébrale, une sensibilité diminuée voire une anesthésie, une sciatique, des douleurs pelviennes, ou encore des troubles urinaires, intestinaux et sexuels. S'ils grossissent, les kystes de Tarlov peuvent comprimer de plus en plus les nerfs. S'ils sont pris en charge rapidement, les symptômes sont réversibles mais la compression peut entraîner une détérioration irréversible, avec majoration des symptômes ou apparition de nouveaux signes.

L'errance diagnostique, trop fréquente 

Le diagnostic du kyste n'est pas toujours simple et comme les kystes de Tarlov sont très mal connus, ils sont rarement recherchés... "Il y a eu une errance médicale pendant 4 ans, déplore Marine. J'ai consulté des neurologues, des neurochirurgiens, des rhumatologues, des chirurgiens orthopédiques et je suis allée dans un centre de la douleur mais les médicaments n'étaient pas assez efficaces et avaient beaucoup d'effets secondaires. J’ai également essayé la mésothérapie mais sans soulagement de la douleur."

C'est grâce à l'IRM qu'un nom est mis sur l'affection dont Marine souffre. Un kyste de 8 cm est repéré chez Marine sur l'IRM ; dans son cas, la compression n'était pas visible sur l'IRM mais grâce un orthopédiste, elle apprend que toutes les compressions ne sont pas forcément visibles... Le scanner, un électromyogramme, examen pour évaluer les nerfs, et une myélographie complètent l'évaluation.

Devant la dégradation de son état et l'échec des médicaments sur ces douleurs, Marine se tourne alors vers un neurochirurgien, recommandé par l'association française de la maladie des kystes de Tarlov. 

La prise en charge, dérivation, ou chirurgie

Plusieurs traitements sont proposés. "Il est possible de faire une dérivation du kyste s'il est volumineux, explique le Dr Srour. On met un cathéter et on dérive le liquide vers la cavité abdominale." La technique fait courir de risque d'une hypotension intracrânienne et a des résultats insatisfaisants d'après le neurochirurgien. Car si le kyste communique avec les espaces contenant le liquide céphalo-rachidien, il se remplira à nouveau de liquide.

La chirurgie, les  différentes techniques

Autre possibilité pour certains kystes qui ne communiquent pas ou peu : "on draine le kyste de son liquide et on injecte de la colle dedans pour empêcher que le liquide entre à nouveau à l'intérieur, ajoute le chirurgien. C'est une technique réservée aux kystes non communicants ou peu communicants et on fait avant un examen appelé saco-radiculographie pour savoir si le kyste se remplit ou pas de liquide." Limite de taille, la technique n'a pas d'efficacité à long terme, elle dure environ 6 mois-1 an car la colle finit par être résorbée... et elle n'est pas possible avec les petits kystes, de moins d'un cm. "Pour le neurochirurgien, elle est surtout très utile en test thérapeutique : si l'on ponctionne et que cela va mieux, c'est que les signes sont en rapport avec le kyste et qu'il est symptomatique

La chirurgie est également une possibilité : "on ouvre la paroi du kyste, on enlève le liquide et on le remplace par de la graisse ou des muscles pour reboucher l'orifice de communication. Mais l'étanchéité n'est pas à 100% et la paroi du kyste peut contenir des fibres nerveuses qui peuvent être touchées." Les complications comprennent les fuites de LCR, avec des maux de tête et vomissements et il y a un risque de "méningocèle" (les méninges qui protègent la moelle épinière "sortent" entre une vertèbre et le disque). Le neurochirurgien doit donc mettre en balance les symptômes et la gêne du patient d'une part et les risques de la chirurgie....

Enfin, il y a une troisième technique "de ponction du kyste et de renforcement de la paroi avec de la dure-mère synthétique". C'est la seule que pratique le Dr Srour, qui la juge la moins invasive possible et adaptée au mécanisme des kystes. " C'est une faiblesse de la dure-mère qui se dilate, détaille le chirurgien. Je ponctionne le kyste avec une aiguille pour réduire sa taille et je renforce la paroi défaillante en mettant de la dure-mère synthétique. Cela empêche le remplissage du kyste il n'y aura plus de dilatation kystique en regard de la faiblesse de la paroi.

"Sur les 100 malades opérés dans le service, il y a eu 80% de bons résultats, avec des patients satisfaits", estime le Dr Srour qui n'a toutefois pas d'étude scientifique évaluant la technique. Marine a ainsi bénéficié de cette technique mais les nerfs avaient hélas souffert de la compression prolongée : « Je suis mieux debout mais surtout allongée mais j'ai toujours des douleurs à la position assise. Comme avant l'opération, je ne pouvais plus rien faire donc je m'estime bien moins gênée !"

"Pour les 20% restant, les gens sont un peu améliorés ou pas du tout, reprend le neurochirurgien. Si les manifestations cliniques durent depuis plusieurs années, les douleurs ne sont plus mécaniques mais neuropathiques : le nerf est abîmé avec le temps et même en enlevant la compression du liquide, il reste l'atteinte neuropathique... Il faut donc sensibiliser les patients à cette notion avant la chirurgie pour qu'ils n'attendent pas trop." Selon lui, il faut tout même attendre 2 ans, à long terme pour évaluer la récupération définitive du nerf, grâce à l'électromyogramme.

Attention, cette troisième technique ne s'adresse pas à tous les patients : "la sélection des patients doit être très précise car tous ceux qui ont un kyste n'ont pas forcément des signes en rapport avec ce kyste. Il faut donc chercher des perturbations à l'EMG (périnéal pour les kystes sacrés, des membres supérieurs pour les kystes cervicaux et des membres inférieurs en cas de kystes lombaires). Les patients présentant des symptômes concordant avec les atteintes à l'EMG, sont ceux qui auront le plus de bénéfices de cette technique.

Un traitement adapté à l'intensité de la douleur doit absolument être mis en place. Un diagnostic et une prise en charge plus précoces de cette affection encore méconnue faciliterait grandement la qualité de vie des patients...

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