Boire un peu chaque jour, c'est bon pour la santé ?
L'Institut national sur l'abus d'alcool et l'alcoolisme (NIAAA), référence scientifique américaine et mondiale sur la question, va lancer une large étude destinée à vérifier si la consommation d'alcool modérée comporte des bienfaits pour l'organisme. Selon le New York Times, le programme serait en réalité payé par les industriels du secteur, avec pour but de masquer la dangerosité d'une consommation excessive.
8.000 personnes, à travers les États-Unis, l'Europe, l'Afrique et l'Amérique du Sud auront une mission pendant six ans : boire un peu tous les jours ou ne pas boire du tout selon le groupe auquel ils appartiendront.
Le but : déterminer lequel des deux groupes est en meilleure santé à la fin de l'étude. Ou plutôt : montrer que l'alcool est bon pour la santé, pour le coeur notamment, s'il est consommé chaque jour en quantité réduite. Car cette analyse à grande échelle est financée en majeure partie par des alcooliers, comme Anheuser-Busch, Heineken, Pernod Ricard ou Carlsberg.
L'étude est étonnamment supervisée par l'Institut national sur l'abus d'alcool et l'alcoolisme (NIAAA), à la pointe de la recherche sur ce domaine aux Etats-Unis. Mais de nombreux médecins chargés de mener à bien l'étude possèdent des liens d'intérêt avérés avec ces fabricants d'alcool, liens détaillés par le New York Times.
Les personnes alcoolo-dépendantes sont les vrais clients des industriels
"Il n’y a strictement aucun doute sur le fait que cette étude a pour but d'encourager les gens à boire", s'insurge le Pr Michel Reynaud, président du Fonds actions-addictions. Laisser entendre que l'alcool a des effets bénéfiques sur la santé pourrait "vite se répandre", notamment par le biais des réseaux sociaux, redoute l'addictologue.
Surtout, commander des études sur les potentiels bienfaits de l'alcool est un bon moyen de détourner les yeux du public du vrai problème : la consommation excessive et les dangers qu'elle comporte. "La courbe de mortalité est exponentielle, professe le Pr Reynaud. Avec un verre on augmente notre risque de mortalité de 10%, mais il est de plus de 50% à quatre verres et il double à cinq verres".
Boire de fortes doses comporte donc des "dangers terrifiants" pour la santé. Un aspect que les alcooliers tentent de faire oublier car les personnes alcoolo-dépendantes constituent leurs principaux clients. Ces dernières ne représentent que 8% de la population mais boivent presque la moitié de l'alcool vendu dans l'Hexagone selon le site Addict Aide, qui s'appuie sur des chiffres de 2014 de l'OFDT et de Santé Publique France.