Faire la bise au travail, un acte loin d’être anodin
Aude Picard-Wolff, maire du village de Morette, a décidé d’arrêter de faire la bise à ses collaborateurs. En cause : des risques de contagion des maladies et une situation d’inégalité femmes-hommes
Faire la bise des dizaines de fois par jour, Aude Picard-Wolff, maire de la petite commune de Morette (Isère), n’en peut plus. "Le rituel de la bise me pèse et me gêne. […] Aujourd'hui, c'est un geste qui est devenu systématique et qui ne signifie plus rien. C'est aussi le risque de se transmettre des virus. Surtout en période de grippe, lorsqu'on se frotte les joues à chaque bise. Cela devient insupportable", a-t-elle expliqué au Parisien.
"Moins vous vous approchez de quelqu’un, moins vous véhiculez certaines particules virales"
Aussi a-t-elle décidé d’arrêter de faire la bise à ses 73 collaborateurs, élus de la communauté de Saint Marcellin Vercors Isère (SMVIC). Et de les en avertir par mail. "Depuis de nombreux mois, je suis arrivée plusieurs fois en retard au conseil communautaire car je ne souhaitais tout simplement pas faire la bise aux 73 conseillers communautaires. Un jour, mon rhume m'a même bien arrangée. Il était plus facile et plus rapide de dire que j'étais malade que d'expliquer à chacune et à chacun pourquoi je ne voulais plus les embrasser", explique-t-elle.
Une décision comprise par le Pr Elisabeth Bouvet, infectiologue à l'hôpital Bichat. "Faire la bise ne transmet pas le même genre de maladies qu’une poignée de mains. La bouche n’est pas loin des muqueuses, donc on transmet plus facilement certains agents infectieux. Mais à ma connaissance, aucune n’étude n’a été faite sur le sujet. Ce qui est sûr, c’est que moins vous vous approchez de quelqu’un, moins vous véhiculez certaines particules virales", explique-t-elle. Autant de raisons de se protéger, surtout en période de grippe, où "il faut prendre le plus de précautions possible", selon le Pr Bouvet.
"Pouvoir faire comme les hommes avec les autres hommes"
Mais les risques d’infection ne sont pas les seules motivations d’Aude Picard-Wolff. L’élue évoque en effet un traitement de faveur différent entre les femmes et les hommes. "Je souhaite pouvoir faire comme les hommes avec les autres hommes : serrer la main à toutes les femmes et à tous les hommes à la place des deux bises habituelles", affirme-t-elle. Car ce n’est un mystère pour personne : le devoir de la bise revient bien plus souvent aux femmes qu’aux hommes, qui peuvent se contenter d’une poignée de main avec une grande partie de leurs collaborateurs sans que cela ne choque personne.
En outre, arrêter de faire la bise à tous les élus de la SMVIC – et ne pas avoir à leur expliquer pourquoi – permettrait à la maire de Morette de gagner un temps considérable. Aude Picard-Wolff le crie haut et fort : elle souhaite tout simplement "pouvoir arriver à l’heure". Et demande donc au président de la communauté de communes "que l'on réfléchisse à ce sujet dans le cadre du fonctionnement de notre conseil". Un positionnement qui, étonnamment, divise au sein de la SMVIC. D’après Le Parisien, certains élus continueraient à trouver ce débat "futile" et "ridicule". Les arguments d’Aude Picard-Wolff n’ont donc, a priori, pas trouvé grâce à leurs yeux.