Résultats encourageants d'une thérapie génique pour une maladie rare du sang
Le syndrome de Wiskott-Aldrich est une maladie du système immunitaire et du sang, d'origine génétique, qui touche quelques centaines de personnes en France. Selon les premiers résultats d'un essai de thérapie génique franco-britannique portant sur sept enfants, six d'entre eux auraient vu leur état clinique s'améliorer. Ces travaux ont été publiés ce 21 avril 2015 dans le JAMA.
Le syndrome de Wiskott-Aldrich correspond un déficit immunitaire sévère, lié à une mutation d'un gène portée par le chromosome X(1) : le gène WAS.
Ce gène code pour la protéine WASp, qui contribue à donner aux cellules sanguines un nombre important de leurs propriétés mécaniques (formes, adhésion aux autres cellules…). La maladie se traduit "par des hémorragies, des infections graves et à répétition, de l'eczéma sévère et, chez certains patients, des réactions auto-immunes et l'apparition de cancers", rappellent les chercheurs dans un communiqué accompagnant la publication.
Le seul traitement de cette pathologie est, à ce jour, la greffe de moelle osseuse, où se trouvent les cellules souches qui se différencieront en cellules sanguines. Mais cette greffe nécessite un donneur compatible et nécessite des soins de compléments, à vie.
Corriger les cellules malades
Fin 2010, une évaluation de l'intérêt d'une thérapie génique, à destination de malades sans donneur compatible, a été initiée à Paris et à Londres. "Le traitement consiste à prélever chez les malades des cellules souches sanguines porteuses de l'anomalie génétique, puis à les corriger au laboratoire en [y] introduisant le gène WAS sain", explique-t-on à l'Inserm.
Les malades sont, parallèlement, traités par chimiothérapie afin d'éliminer leurs cellules souches malades ainsi que les cellules responsables des agressions auto-immunes.
Les cellules souches corrigées leur sont ensuite réinjectées. "Ces cellules [porteuses du gène sain] vont alors donner naissance aux diverses lignées cellulaires qui composent le sang (globules blancs et rouges, plaquettes)", sans défauts.
Les premiers résultats de ces travaux, publiés ce 21 avril dans le JAMA, portent sur sept patients âgés de 8 mois à 16 ans. Un patient étant décédé 7 mois après le début de l’étude, "du fait d’une infection préexistante à un virus de l'herpès résistant aux médicaments", les données cliniques exploitables ne concernent que six patients.
"Un bénéfice clinique durable"
Un peu plus de deux ans après le début de l’essai thérapeutique, "un bénéfice clinique durable" a été observé chez tous les patients. Les symptômes d’eczéma, ainsi que la "susceptibilité aux infections" est jugée "résolue" chez les six patients. Aucun épisode hémorragique grave n’aurait été enregistré depuis le traitement. Enfin, les réactions d’auto-immunité ont diminue pour cinq d’entre eux. Les chercheurs notent néanmoins que le taux de plaquettes corrigées détectable dans le sang "est très variable d’un malade à l’autre."
"L'un des patients a vu disparaitre son arthrite, un autre a vu une amélioration majeure de sa vascularite des membres inférieurs qui l’obligeait à se déplacer à l’aide d’un fauteuil roulant, a pu retrouver une activité physique normale", se réjouit-on au Généthon.
Si cette étude démontre le potentiel de la thérapie génique dans le syndrome de Wiskott-Aldrich, ses auteurs soulignent que "des essais contrôlés impliquant un plus grand nombre de patients sont nécessaires pour [en] évaluer les résultats et la sécurité à long terme".
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(1) Cette pathologie touche essentiellement les garçons, qui ne possèdent qu’un chromosome X. Les filles possédant deux chromosomes X. Si le gène défectueux n’est porté que par un seul des deux chromosomes, l’autre chromosome produira tout de même la protéine valide.
Source : Outcomes Following Gene Therapy in Patients With Severe Wiskott-Aldrich Syndrome. Salima Hacein-Bey Abina et coll. JAMA, 21 avril 2015. doi:10.1001/jama.2015.3253
Le coût des essais thérapeutiques
Les essais de thérapie génique coûtent cher, rappelait lors du dernier Téléthon Mme Laurence Tiennot-Herment, présidente de l'AFM-Téléthon. "Un lot de traitement de thérapie génique coûte jusqu'à 500.000 euros", détaillait-elle.
Pour conduire l’étude sur le syndrome de Wiskott-Aldrich, il a fallu produire 6 lots de médicament pour traiter 15 patients, pour un montant de plus de 3 millions d'euros. Pour mener l'essai jusqu'à l'autorisation de mise sur le marché, 4,5 millions d’euros supplémentaires devront être engagés.
L’AFM-Téléthon soutient une trentaine d’essais thérapeutiques (thérapie génique ou cellulaire, etc) en cours ou en développement, portant une vingtaine de maladies rares du sang, des muscles, du cerveau, du foie et de la vue.