Covid-19 : la course au vaccin s'accélère
Plus d’une centaine de projets de vaccin contre le coronavirus ont été lancés dans le monde. En France, des essais cliniques pourraient être lancés dés cet été et les premiers résultats seraient alors disponibles à l’automne.
"Le vaccin, ce n’est pas pour demain, parce qu’il faut se donner le temps de le développer, l’évaluer, vérifier ses effets indésirables", affirmait ce 13 mai sur France Inter la professeure Odile Launay, infectiologue et responsable du centre de vaccinologie de l'hôpital Cochin à Paris.
Malgré ces freins, le développement du vaccin contre le Covid-19 "va extrêmement vite, avec des données assez encourageantes, chez l’animal" notamment. Mieux, selon l’infectiologue, "on devrait pouvoir démarrer des essais d'efficacité cet été, qui permettent de vérifier si les personnes vaccinées font moins d’infections ou bien des infections moins graves. On espère que la France pourra y participer."
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Un calendrier étalé de juillet à décembre 2020
A l’Institut Pasteur, ce sont trois projets de vaccins anti-Covid-19 qui sont engagés. Le plus avancé s’appuie sur un vaccin de la rougeole modifié et devrait donner des premiers résultats en octobre, selon la coordinatrice des programmes vaccins, Christiane Gerke.
Première étape attendue en juillet : les "feux verts" réglementaires pour démarrer les essais cliniques, précise-t-elle. Essais cliniques qui démarreront immédiatement après ces autorisations. Les premiers résultats de la phase I, qui correspond à la première administration du vaccin à l’humain pour tester l’innocuité du vaccin, sont attendus pour la fin octobre. La phase II ou phase II/III, qui vise à évaluer l’efficacité du vaccin, est prévue quant à elle pour début décembre.
Qui vacciner en premier ?
Malgré un contexte d’urgence pour le Covid-19, les essais cliniques d’efficacité n’ont pas vocation à être utilisés comme première campagne de vaccination ciblée. Mais dès que suffisamment de données auront été collectées sur la qualité, la sécurité et l'efficacité du vaccin, "un classement pour utilisation en urgence par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) peut être demandé" précise Christiane Gerke. L’objectif : permettre "l’utilisation de produits qui ne sont pas encore autorisés."
Mais comment choisir les populations à vacciner en priorité, sachant qu’une fabrication à large échelle pour vacciner l’ensemble de la population sera longue ? "Cela dépendra de la performance du vaccin en phase d'essais II/III dans les différentes catégories d'âge, ainsi que du nombre de doses de vaccin disponibles, de l'évolution de l'épidémie, de notre compréhension des mécanismes de gravité différenciée et des connaissances que nous allons acquérir dans les prochains mois" répond Christiane Gerke.
Déjà huit essais cliniques lancés dans le monde
Et la France n’est pas la seule à participer à cette course au vaccin. L’OMS comptabilise à la date du 11 mai 110 projets dans le monde, dont huit déjà à l'essai. Cette centaine de projets se classe en huit catégories différentes selon le type de vaccin : vaccins "vivants atténués" ou "inactivés", vaccins dits "sous-unitaires" à base de protéines (présentant un antigène au système immunitaire, sans particules virales), vaccins dits "à vecteur viral", qui utilisent des virus fabriqué pour susciter une réaction immunitaire chez l'homme.
Parmi les projets figurent également des vaccins "à ADN" ou "à ARN" qui sont des produits expérimentaux utilisant des morceaux de matériel génétique modifié.
Plus il y a de pistes, plus il y a de chances de réussite
Cette multiplicité des pistes engagées pour obtenir un vaccin anti-Covid-19 est un point très positif pour les chances de succès final. "Le fait qu'il y ait beaucoup de types de vaccins différents donne de bons espoirs sur le fait qu'on trouve quelque chose qui fonctionne et qui donne une protection chez l'homme", confie à France Info la virologue française Marie-Paule Kieny. Mais "la route vers un vaccin efficace est escarpée et seule une poignée de vaccins pourront réussir", tempère la chercheuse britannique Sarah Caddy de l'université de Cambridge.
Est-il exclu de ne jamais parvenir à élaborer un vaccin efficace? "En recherche, rien n'est exclu", répond le directeur scientifique de l'Institut Pasteur Christophe d'Enfer. "Vous connaissez l'exemple du VIH où plus de 30 ans après sa découverte on n'a toujours pas de vaccin" contre le sida, soulignait-il, fin avril, devant une mission d'information à l'Assemblée nationale.
Assurer une "distribution équitable"
Si un vaccin efficace et sans danger est développé à la fin de l’année 2020 ou en 2021, il faudra répondre à la question de l’utilisation et de la disponibilité de ces nouveaux produits. "Tout le monde a peur d'une appropriation par les pays qui auraient mis en place le plus rapidement les capacités de production sur leur sol", commente Marie-Paule Kieny. Pour se préparer à ce risque, l'OMS a organisé fin avril une réunion internationale pour notamment s'assurer d'une "distribution équitable de vaccins". Mais ni la Chine ni les Etats-Unis n’ont participé à cette réunion.