Covid-19 : le point sur les traitements
Depuis l'apparition de la Covid-19, plusieurs traitements sont testés, parfois avec des annonces fracassantes rapidement infirmées, d'autres sont prometteurs. Un an après le début de l'épidémie, on vous aide à faire le point.
Les traitements testés depuis un an ont des modes d'action différents. Certains combattent directement l'infection, d'autres freinent la tempête cytokinique, cet emballement du système immunitaire observé dans les cas graves, et il y a aussi des traitements qui empêchent les complications comme les embolies ou les thromboses.
Combattre directement l'infection
Hydroxychloroquine
Certains traitements, utilisés pour combattre directement l’infection, ont fait l'objet d'annonces chocs, balayées par une analyse scientifique rigoureuse. En tête de ces traitements, l'hydroxychloroquine, promue par le Pr Raoult, est habituellement prescrite dans le paludisme et certaines maladies auto-immunes.
Dans le cas du Covid-19, elle a parfois été utilisée en association avec l’azithromycine, un antibiotique destiné à lutter contre certaines bactéries. Plusieurs essais cliniques, dont l'essai Solidarity de l'OMS, ont finalement montré que l'hydrochloroquine ne réduisait pas la mortalité et n'avait pas d'effet positif sur les patients hospitalisés. De plus, les bénéfices sont trop faibles en comparaison des risques, notamment cardiaques.
Lopinavir/ritonavir
De la même façon, l'association de deux traitements prescrits contre le VIH, le lopinavir/ritonavir, n'a pas pu montrer d'activité significative sur le virus ni de réduction de mortalité. Comme pour l'hydrochloroquine, l'Organisation mondiale de la Santé a donc mis un terme en juillet 2020 à l'essai Solidarity, puisqu'elles ne réduisent pas la mortalité.
Remdesivir
Le remdesivir, utilisé contre le virus Ebola, avait suscité un espoir mais à grande échelle, l'essai Discovery a montré qu'il n'évitait ni les formes graves ni les morts. Son utilisation n'est donc plus officiellement recommandée depuis novembre 2020 par l'Organisation Mondiale de la Santé.
Regeneron®
En revanche, le traitement par anticorps monoclonaux, comme le Regeneron® administré à Donald Trump, confirme son intérêt. Un malade infecté par le virus produit des anticorps pour l'empêcher de rentrer dans les cellules du corps.
Les chercheurs sélectionnent alors les plus efficaces. Ils les dupliquent en laboratoire pour pouvoir les administrer à d'autres malades. Leur processus d'évaluation a été accéléré par l'European Medical Agency et l'Académie de médecine a recommandé dans un communiqué de presse en date du 08/02/2021 d'accélérer leur mise à disposition.
"C'est une piste intéressante en prévention, confirme le Dr Adrien Lemaignen, infectiologue. Mais ils sont chers, leur efficacité en cas d’hospitalisation n’a pas été clairement démontrée et ils seront probablement moins efficaces sur les nouveaux variants."
Plasma thérapeutique
Autorisée en mai 2020 en France, l'administration de plasma thérapeutique, consiste à transfuser du plasma de patients guéris de la maladie (le plasma étant la partie liquide du sang sans les cellules comme les globules rouges).
Mais une limite de taille freine son utilisation : le plasma doit contenir un taux très élevé d'anticorps anti-covid-19 pour être efficace, ce qui représente une faible proportion de donneurs.
D'après une étude indienne publiée dans le British Medical Journal en octobre 2020 et la revue Cochrane, ce traitement n'évite pas l'évolution vers une forme grave et ne diminue pas la mortalité. Le plasma resterait intéressant pour les patients qui ont un déficit immunitaire.
Combattre la tempête cytokinique
D'autres traitements ont été testés pour combattre la tempête cytokinique, qui traduit un emballement disproportionné du système immunitaire. Cette réaction est observée dans les formes graves et peut provoquer le décès.
Corticoïdes
Les corticoïdes, mieux connus sous le nom de cortisone, sont des puissants anti-inflammatoires. On parle de corticothérapie pour qualifier un traitement à base de corticoïdes et elle s'est avérée particulièrement intéressante dans la covid-19.
"La corticothérapie à base de dexaméthasone a changé nos pratiques et le pronostic des patients, s'enthousiasme le Dr Lemaignen. On l'utilise tous les jours chez les patients avec une pneumonie qui ont un besoin en oxygène."
Recommandée dans les formes graves pour réduire la mortalité et diminuer le risque d'aller en réanimation, la dexaméthasone se révèle particulièrement bénéfique chez les patients qui ont besoin d'aide pour respirer. "La corticothérapie inhalée est encore à l'essai pour les formes modérées, reprend l'infectiologue. C'est une piste intéressante à confirmer."
Interféron
Substance produite naturellement par le corps pour lutter contre une infection, l’interféron a une action anti-virale, raison pour laquelle il a été étudié dans un essai clinique. Mais il s'avère que dans les formes graves, il participe à la tempête cytokinique. "Par voie générale en intraveineux et associé à un anti-viral, il n'a aucune efficacité et les essais ont été arrêtés, confirme le Dr Lemaignen. Mais il y a encore un essai en cours, avec de l'interféron inhalé en nébulisation car il y aurait une action locale au niveau pulmonaire." Et donc un intérêt pour les patients avec une pneumonie.
Tocilizumab
Le tocilizumab, prescrit dans la polyarthrite et d'autres maladies articulaires inflammatoires semble intéressant pour son effet anti-inflammatoire. Si les études divergent sur son intérêt, l'essai Recovery a montré en février 2021, qu'il pourrait réduire le risque de décès dans les formes sévères, associé à un corticoïde.
Colchicine
La colchicine, est couramment prescrite dans la goutte pour contrer l'inflammation des articulations. Elle a été testée dans une étude canadienne et a fait l'objet d'une annonce enthousiaste par ses auteurs en janvier 2021. Les résultats n'ont pas résisté à une lecture poussée. "Elle n'est pas miraculeuse, estime le Dr Lemaignen. De plus, la colchicine est potentiellement très dangereuse".
Elle fait en effet partie de ces médicaments dont la dose thérapeutique, qui soigne, est proche de la dose toxique, qui provoque des effets secondaires graves. Une légère variation de sa concentration dans le sang peut avoir des répercussions graves pour le patient.
Les autres pistes à l'étude
Camostat mesylate
De nombreuses pistes sont encore à l’étude. Le camostat mesylate, administré par comprimé, a une action anti-virale. "Il possède un mode d’action intéressant, reprend le Dr Adrien Lemaignen. Mais nous ne pouvons pas nous prononcer tant que nous n'avons pas les résultats des études cliniques en cours."
Fluvoxamine
Un antidépresseur, la fluvoxamine pourrait confirmer d'intéressants effets anti-inflammatoires. Testés à la fin 2020, sur 150 personnes, un essai plus large est en cours et des études sur le plan méthodologique doivent être menées pour confirmer le potentiel de certains antidépresseurs, comme le Prozac®.
De nombreuses autres pistes sont à l'étude mais elles devront faire leurs preuves dans des essais cliniques plus poussés.