Sida : peut-on diminuer les traitements ?
Vingt ans après leur arrivée sur le marché, les trithérapies ont fait la preuve de leur efficacité. Mais pour les patients séropositifs, ce traitement à prendre tous les jours reste contraignant et les effets secondaires à long terme non négligeables. Aujourd'hui, le nouveau défi pour la recherche est donc de réduire les doses de médicaments. L'une des pistes étudiées par une équipe de chercheurs français est de proposer un traitement à prendre seulement quatre jours par semaine, au lieu de sept.
Richard Cross est un professeur de chant bien connu des plateaux de télévision. Mais depuis quelques années, ce séropositif militant essaie aussi d'attirer les projecteurs sur une autre façon de se soigner.
Contrairement à la plupart des malades, il ne prend plus quotidiennement son traitement : "Je prends les médicaments juste deux fois par semaine parce que la charge de ces médicaments dans le sang dépasse facilement une semaine. Quand je le prends le lundi et le mardi, l'effet du médicament va tenir jusqu'à la semaine d'après pour maintenir le HIV à un niveau indétectable. Je n'ai donc aucun intérêt de continuer à prendre pendant cinq jours des médicaments qui ne servent à rien. C'est de la surmédication inutile", explique-t-il.
Seul impératif pour Richard Cross, effectuer des analyses sanguines plus fréquentes afin de surveiller sa charge virale.
Quatre jours de traitement au lieu de sept
Richard s'est lancé seul dans cette voie thérapeutique pour atténuer les effets secondaires des antirétroviraux car malgré l'évolution des trithérapies ces dernières années, leur impact à long terme reste toujours incertain.
Aujourd'hui, les études scientifiques sont loin de valider une prise de médicaments deux jours par semaine. La dernière en date, l'étude pilote 4D, évalue l'efficacité d'une trithérapie à quatre jours par semaine.
"L'étude 4D consistait à donner un traitement réduit chez des personnes en succès thérapeutique avec une charge virale indétectable au départ. Un traitement réduit où l'on donnait la trithérapie quatre jours par semaine", précise le Dr Pierre de Truchis, infectiologue. Résultat : au bout d'un an, les chercheurs ont constaté un succès important de cette stratégie de traitement réduit car "pour les cent patients qui ont démarré avec une charge virale indétectable au début, 96 d'entre eux ont gardé cette charge virale indétectable tout au long de l'étude pendant un an".
Mais il est encore trop tôt pour recommander cette approche aux patients. D'autant qu'elle nécessite un encadrement médical strict sinon cette réduction de médicaments peut s'avérer dangereuse comme le confirme le Dr de Truchis : "Beaucoup de patients viennent en consultation et ont fait d'eux-mêmes une réduction de leur prise de façon inadaptée. Dans ce cas, on risque l'apparition de virus résistants".
Un allégement thérapeutique et financier
Pour confirmer cette stratégie, il faut maintenant produire une nouvelle étude en double aveugle et qui intègre 700 patients.
"On va comparer un groupe de patients qui prend le traitement toute la semaine avec celui qui prend le traitement quatre jours, d'où le nom de 4D. Et on va essayer de montrer que prendre le traitement quatre jours est aussi efficace que le prendre toute la semaine. Cette stratégie est visible en France, les patients l'attendent mais elle n'est absolument pas visible au niveau international (…) Nous avons donc besoin d'être extrêmement solides sur les résultats que l'on va produire", explique le Pr Jean-François Delfraissy, infectiologue.
Enfin, dernier argument avancé par les partisans de cette nouvelle approche thérapeutique : les potentiels économies générées par une plus faible consommation d'antirétroviraux.