Ma vie avec un syndrome d'Elhers-Danlos
PORTRAIT - Des entorses et des luxations à répétition, l'épuisement permanent et la douleur insupportable,… Mélissa les connaît trop bien. A 25 ans, elle souffre d'une maladie rare, le syndrome d'Elhers-Danlos, qui lui gâche la vie. Elle a pourtant réussi à retrouver le sourire, grâce à sa combativité et le contact avec d'autres patients.
Les symptômes envahissent la vie de Mélissa dès l'âge de 3 ans ; surnommée "Madame Maladroite" dans son enfance tellement elle se cogne, elle multiplie les entorses et les luxations au niveau de nombreuses articulation. Elle souffre également d'une douleur insupportable depuis l'enfance, non soulagée par les traitements, ainsi que d'une grande fatigue. Tous les pans de sa vie, qu'ils soient personnel, social ou professionnel, subissent les répercussions de ces signes invalidants et pourtant négligés par le corps médical.
L'errance diagnostic, la croix des maladies rares
Comme beaucoup de maladies rares, le diagnostic peine à être trouvé. Une situation très éprouvante pour les patients qui souffrent de leur maladie, de l'absence de diagnostic et de l'incompréhension de l'entourage. "Souvent les gens pensaient que je le faisais exprès, que je simulais, que j'étais folle, se souvient-elle. J'étais incomprise et démunie face à ce qui m'arrivait."
Enfin, en 2012, un orthopédiste évoque le syndrome d'Ehlers-Danlos (voir encadré) et convainc Mélissa de contacter le centre de référence des maladies génétiques du tissu conjonctif. Après deux longues années d'attente, le téléphone sonne enfin : "En 2014, le centre m'a convoquée, explique Mélissa. Trois jours plus tard et après plus de six heures de consultation, le diagnostic tombe : je souffre du syndrome d'Elhers-Danlos."
Sortie de la consultation munie de nombreuses ordonnances, la jeune femme se sent à la fois soulagée et paniquée. Soulagée de mettre un nom sur le diagnostic, après des années d'errance médicale, et de savoir que les symptômes n'étaient pas dans sa tête. Paniquée d'avoir tant d'ordonnances sans aucun conseil ni aucune indication."Je me suis retrouvée dans un désert, déplore-t-elle. Seule face à cette maladie qui nécessite beaucoup de soins et de matériel médical, ce qui m'a fait très peur alors que j'étais âgée de 24 ans seulement."
L'isolement, corollaire de la maladie
Alors elle apprend à gérer les différents symptômes, à faire face à la complexité des tâches administratives et des dossiers à remplir, à faire le deuil de la vie qu'elle connaissait et à affronter l'isolement. Cette ancienne bonne vivante, adorant la danse, la fête et les musées, se retrouve contrainte au repos forcé, allongée sur son canapé. "La plupart du temps je suis en consultation médicale, en séance de kinésithérapie ou de balnéothérapie. Je prends maintenant un traitement sur le long terme et je teste également différentes méthodes de médecines douces", raconte Mélissa.
Du fait de la maladie et de l'impossibilité de sortir, elle a hélas perdu beaucoup d'amis : "J'ai dû faire face à l'abandon de nombreux amis qui n'ont pas imaginé à quel point cette maladie est handicapante et que si je refusais de sortir, c'est tout simplement que je ne le pouvais pas", analyse-t-elle. A l'annonce du diagnostic, elle tente de mettre fin à ses jours mais sa combattivité et une psychothérapie l'aident à rebondir. La jeune femme lutte pour conserver une certaine force et de la combattivité, et a toujours un soutien psychologique.
La vie professionnelle, un parcours du combattant
La jeune femme s'est lancée dans une formation d'infirmière : "J'ai eu l'accord par mon médecin pour faire cette formation. A condition de savoir gérer ma fatigue et de ne pas en faire trop comme j'en ai toujours eu l'habitude… Mais entre les stages, les cours, les révisions, les partiels et mon travail d'aide soignante à domicile, je ne pouvais me permettre de me reposer…", se remémore Mélissa. Sans disposer du temps ni des moyens de suivre ses soins, elle cumule d'un côté les luxations, entorses et autres raisons de se retrouver aux Urgences, et de l'autre, les nuits de garde à l'hôpital suivies de journées en stage. "C'est cette passion qui m'a permis de refaire surface suite à ma tentative de suicide et de me battre contre cette maladie qui évoluait de façon négative", explicite la jeune infirmière.
Mais son métier se révèle très ardu et éprouvant, parallèlement à la majoration de son handicap. Les remarques très désobligeantes et le manque de soutien de ses collègues la minent. Elle est alors mise en arrêt de travail pour épuisement moral et professionnel. Depuis novembre 2015, Mélissa se bat pour son reclassement professionnel, via une formation de naturopathe, dont son employeur lui refuse le financement : "J'espère que je pourrais enfin trouver le métier qui me fera autant rayonner que celui d'infirmière."
Aider les autres patients, un sens à la vie ?
Depuis plusieurs mois, Mélissa s'est tournée vers d'autres patients, atteints du syndrome d'Elhers-Danlos, via les réseaux sociaux. Une activité qui l'aide à rebondir et à donner un sens à sa vie : "Je me bats maintenant pour exercer auprès des personnes atteintes de cette maladie encore méconnue. Je veux les accompagner, leur donner des conseils. Je pense que j'ai su faire de ma maladie ma force", s'enthousiasme l'infirmière.
Elle rédige également un blog, pour raconter sa vie avec la maladie. Si elle ne danse plus au son de la musique, elle vit toujours à son rythme et elle a retrouvé le sourire et l'espoir…
Le syndrome d'Elhers-Danlos
Cette maladie rare regroupe différentes affections héréditaires, toutes caractérisées par une atteinte du tissu conjonctif et plus précisément du collagène.
Le tissu conjonctif est essentiel dans le corps : il est présent dans la peau, les os, les tendons, les ligaments, les muscles… Il donne au corps sa souplesse et son élasticité.
Lorsque le collagène est altéré, les répercussions sont nombreuses et variables selon le type du syndrome : atteintes musculaires, articulaires, cardio-vasculaires, cutanées, digestives, neurologiques avec la douleur…