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Syndrome de Bartter et de Gitelman : les reins en danger

Les syndromes de Gitelman et Bartter sont des maladies rares qui perturbent le fonctionnement des reins. Provoquant des symptômes invisibles, ils ont pourtant un retentissement parfois considérable sur la qualité de vie, comme en témoigne Virginia. 

Dr Charlotte Tourmente
Rédigé le , mis à jour le
Crédit photo : ©Fotolia

"Ce qui me dérange le plus, c'est la tachycardie qui survient dès que je monte un escalier ou fais un effort, puis les douleurs articulaires qui sont fortes et durent plusieurs heures, commente Virginia, 33 ans, qui tient le blog Nouvelle vie sur son expérience de patiente.

"Les douleurs musculaires peuvent être fortes et concernent tous les muscles. Et je suis tout le temps épuisée du fait de l'hypokaliémie... je me lève épuisée, même après une nuit de douze heures ! J'ai également des vertiges régulièrement, liés aux dépôts de cristaux de calcium sur l'oreille interne." 

Potassium, sodium, magnésium...

Virgina a découvert qu'elle souffrait du syndrome de Bartter en 2018, à la suite de son accouchement. C'est une maladie d'origine génétique altérant les reins, et qui partage de nombreux symptômes et mécanismes avec le syndrome de Gitelman. Dans les deux cas, la réabsorption de différents sels, comme le potassium, le sodium, le magnésium, le calcium, ou encore le potassium, est perturbée.

Ce qui entraîne toute une série de symptômes plus ou moins invalidants selon les patients, l'âge du diagnostic et la prise en charge rapide : crampes, tétanie, soif intense avec émission abondante d'urines, calculs rénaux, accumulation de calcium dans les articulations, risque d'insuffisance rénale chronique à surveiller dans certains cas...

Le syndrome de Bartter prend plusieurs formes et il peut survenir chez le foetus, faisant courir le risque d'un accouchement prématuré, ou entraîner un retard de croissance chez les enfants. L'évolution est habituellement ralentie une fois la prise en charge médicale débutée, même si elle est influencée par la rapidité et l'âge du diagnostic. Chez les patients atteints d'un syndrome de Bartter, un suivi régulier est indispensable pour dépister la survenue d'une insuffisance rénale chronique. 

Des maladies génétiques, de diagnostic complexe

"Je suis hospitalisée en mars 2018 pour passer plein d'examens et tests, pas faciles à affronter... se souvient Virginia. Et le choc en mai 2018 avec cette phrase : vous avez le syndrome de Gitelman et/ou Bartter. L'un ou l'autre, ou les deux..." Le diagnostic repose sur une série d'examens : la prise de sang montre les anomalies des électrolytes et de certaines hormones, comme la rénine et l'aldostérone. La certitude est obtenue grâce aux tests génétiques.

Ces affections génétiques sont dites récessives (les deux parents doivent être porteurs de l'anomalie pour la transmettre à leur enfant). Elles touchent les reins qui servent à filtrer l'urine, et plus précisément la partie qui sert à ré-aborber les éléments nécessaires pour l'organisme et éliminer les déchets des urines : les tubules. 

Ceux-ci ne peuvent plus assumer leur rôle habituel, absorber le sel, ou chlorure de sodium. Les reins produisent trop de chlore et de sodium dans les urines, aboutissant à une cascade d'évènements : une légère déshydratation qui entraîne au final une augmentation de la sécrétion du potassium dans les urines, un faible taux de potassium dans le sang, un excès de calcium dans les urines.

Quelle prise en charge médicale ?

Aujourd'hui, aucun traitement ne parvient à guérir les deux syndromes mais heureusement, une fois la prise en charge débutée, les symptômes diminuent ou s'amendent. Celle-ci vise à compenser les pertes d'électrolytes pour le potassium et le magnésium. 

"Je prends 14 comprimés de potassium par jour et mon taux est encore limite, s'exclame Virginia. Je ne peux pas en prendre plus, de peur des dégâts au niveau de l'estomac et en-dessous d'un taux de 2,5, je dois aller aux Urgences pour perfusion..." 

Le traitement médical peut aussi faciliter la ré-absorption du potassium, avec certains diurétiques, comme la spironolactone ou de l'amiloride, ou de faibles doses d'inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine par exemple. 

Dans le syndrome de Bartter, on recommande aussi des anti-inflammatoires pour réduire l'inflammation qui existe dans cette affection.  Leur usage est toutefois limité par les effets secondaires, notamment gastriques.

Une vie quotidienne perturbée

"Dans la vie quotidienne, ce n'est pas toujours facile, reconnaît la jeune femme. J'ai un enfant et la maladie a été découverte après ma grossesse. J'avais peur au début mais finalement, mon fils, qui a 2,5 ans, s'adapte très bien. Je travaille dans un laboratoire à temps plein, avec un jour de télétravail en milieu de semaine ce qui limite la fatigue des trajets, et j’ai beaucoup de tâches assises ce qui est un grand avantage" témoigne Virginia.

"La station debout est pénible  mais j'ai une carte prioritaire (NDLR : carte donnant la priorité dans les files d'attente ou pour s'asseoir dans les transports en commun). Nous sommes nombreux à avoir une carte "Handicap", beaucoup sont en invalidité mais il y a des handicaps très variables selon les gens."

"C'est compliqué à faire comprendre à l'entourage extérieur car le handicap est invisible, déplore Virginia. J'ai droit à des refus quand je présente ma carte dans les transports en commun, à des moments où je n'ai plus l'énergie de batailler..."

"Ca ne se voit pas mais c'est tout de même un handicap ! Les autres doivent accepter que l'on est souvent fatigué, que ce n'est pas de la paresse et c'est dur à comprendre. Moi mon entourage proche comprend mais pour le reste, ce n'est pas facile à comprendre..."

Les associations de patients sont alors précieuses pour partager une vie quotidienne parfois bouleversée, s’échanger des astuces contre la gestion de la douleur par exemple et retrouver un nouvel équilibre.

"Sur les conseils de mon néphrologue, je me suis mise en contact avec un groupe de patients sur les réseaux sociaux. Face à l’absence d’une association spécialisée sur nos syndromes et pour combler ce manque nous avons créé une association qui s’appelle Gitelbart pour que les gens puissent se retrouver."

"Quand on découvre la maladie, on se sent seul et cela aide énormément de pouvoir parler de cette maladie si complexe, d’échanger sur toutes ces douleurs. De plus, on n'est pas forcément orienté vers les bonnes personnes notamment au début de la prise en charge, il y a très peu de spécialistes en France."

Le recours à une association peut permettre de remédier à la solitude et de gagner un temps considérable en ayant rapidement les bons contacts médicaux...

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