Un système de reconnaissance faciale pour diagnostiquer les maladies rares
Une application pour smartphone est capable d'identifier des centaines de maladies génétiques rares, à l'aide du deep learning. Un support précieux pour les médecins dans le diagnostic des maladies.
Il existe des maladies génétiques associées à certaines caractéristiques du visage du patient. Un exemple est le syndrome d'Angelman, une pathologie rare causant un retard mental et généralement caractérisée par un front large, un visage triangulaire et une peau claire et ridée. Les médecins réussissent parfois, simplement en observant le visage du patient, à poser un premier diagnostic, mais les maladies génétiques rares sont nombreuses et, pour parvenir à un diagnostic correct, la plupart du temps, un chemin long et coûteux est nécessaire.
Pour cette raison, les chercheurs du FDNA de Boston ont créé une intelligence artificielle qui, en se basant sur l'apprentissage en profondeur, permet un diagnostic rapide, basé simplement sur les caractéristiques du visage du patient, comme l'explique une étude publiée dans la revue Nature Medicine le 7 janvier 2019.
D'autres projets de recherche qui poursuivaient les mêmes objectifs, se limitaient au développement des programmes permettant de distinguer les personnes saines des personnes malades ou d'identifier une seule maladie. Cette dernière recherche, plus ambitieuse, présente une application, Face2Gene, qui utilise un programme d'analyse, DeepGestalt, capable d'identifier des centaines de maladies différentes. Pour le moment.
Une application plus efficace que les médecins
DeepGestalt apprend, en fonction du nombre d'informations qu’on lui fournit. Il a été entraîné par les chercheurs qui ont inséré dans le programme un grand nombre d'images de visages de patients, spécifiant la maladie dont ils sont atteints. Après cet entraînement, le programme arrive à reconnaitre tout seul une pathologie en se basant sur le visage. Si on lui fournit la photo d’un patient, il propose une liste des pathologies dont il est probablement affecté.
Les chercheurs, pour tester le programme, ont commencé par le soumettre à des problèmes binaires. La personne est-elle saine ou malade ? Présente-t-elle une maladie spécifique ou non ? (par exemple la Trisomie21) DeepGestalt a réussi à répondre à ces questions. Après avoir été conditionné avec des centaines de visages de personnes atteintes du syndrome de Cornelia de Lange, par exemple, il a identifié avec une précision de 96,88% les patients atteints, à partir de leurs photos. Un meilleur résultat que celui obtenu par des médecins, qui ont obtenu un taux de réussite de 75%.
Les chercheurs ont ensuite reproduit une situation plus similaire aux défis cliniques des médecins. Ils ont inséré dans l’application Face2Gene, 502 images de visages de patients et ont demandé au programme de faire un diagnostic entre 216 syndromes différents. L’application a répondu correctement avec une précision de 65%.Si on prend en compte les 10 premières pathologies proposées par le programme la précision a été de 91%.
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Les risques éthiques: attentions aux préjugés !
L'application Face2Gene est disponible gratuitement. Les médecins peuvent l'utiliser de manière complémentaire à d'autres analyses, notamment dans le cas de troubles génétiques très rares. Elle peut également servir pour formuler un premier diagnostic, pour effectuer ensuite d'autres examens plus ciblés. La précision de l'application s'améliore avec le temps car de plus en plus de professionnels de santé insèrent des photos, continuant ainsi à former le programme. Il y a actuellement environ 150 000 images dans la base de données Face2gene.
Yaron Gurovich, premier auteur de l'étude, met en garde contre les problèmes éthiques que ce système de collecte de données implique. Il existe un risque de préjudice ethnique. Le programme a été formé principalement avec des images de visages de caucasiens, il pourrait être moins efficace dans le diagnostic avec les visages d'autres groupes ethniques, comme l'a démontré une étude en 2017. Face2gene a posé un diagnostic de syndrome de Down correct dans 80% des cas quand il a analysé les visages d'enfants belges blancs et dans 37% des cas, lorsqu'il a analysé les visages d'enfants congolais. Evidemment, en ajoutant plus d’images, la reconnaissance des visages africains s’est améliorée.
"Nous savons que ce problème doit être résolu", a affirmé Gurovich, "et en progressant, nous pouvons réduire les préjugés".
Par Camilla de Fazio