Journée mondiale du psoriasis 2018 : mieux connaître le rhumatisme psoriasique
La Journée mondiale du psoriasis fait un zoom sur le rhumatisme psoriasique. Objectif : diminuer l'errance diagnostique pour accélérer la prise en charge des patients.
"Vers 15 ans, j'ai commencé à avoir des douleurs dans les genoux sans les mettre en lien avec le psoriasis, raconte Azania, âgée de 31 ans et qui souffre de cette affection de peau depuis l'âge de 5 ans. J'ai souffert le martyr une dizaine d'années sans savoir ce que j'avais..."
A l'occasion de la Journée mondiale du psoriasis, la Fédération Française de Formation Continue et d'Evaluation de dermatologie-venéréologie et l'association France Psoriasis lancent ainsi une campagne de sensibilisation PsoRhuderm sur le rhumatisme psoriasique pour alerter les patients à l'aide de vidéos sur Youtube.
"Le plus souvent, les symptômes sont là depuis au moins 2 ans, avant que le diagnostic soit posé, confirme le Dr Derancourt, représentant de la FFFCEDV. Le retard diagnostique est lié à la segmentation de la médecine : on répond à la demande d'un patient, et le patient comme le médecin n’abordent pas toujours les autres symptômes en relation avec d’autres organes La méconnaissance de l'existence du rhumatisme psoriasique par les patients est également en cause." Autre facteur contribuant au retard selon le médecin, un certain fatalisme de la part des patients : "Comme il n'y a pas de traitement curatif pour le psoriasis, certains patients considèrent qu'il n'y a pas de traitement et ne viennent plus consulter le spécialiste, déplore le médecin. Il y a des traitements efficaces, même s'ils ne sont pas curatifs !"
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Un diagnostic souvent retardé
" La douleur chronique est épuisante, on se réveille et on a mal : je dormais mal, je n'étais pas en état de travailler, souvent absente et en arrêt, reprend Azania. Et c'est très difficile quand on ne comprend pas pourquoi... Ma vie sociale était très réduite car j'annulais souvent mes soirées à cause de mes douleurs et les autres ne comprenaient pas. Au début, leur regard était très difficile : je passais pour la demoiselle fainéante, qui ne devrait pas avoir aussi mal et qui simulait."
Le diagnostic du rhumatisme psoriasique est posé sur un faisceau d'arguments prenant en compte la localisation des atteintes articulaires, des radiographies, la présence d'un psoriasis, une prise de sang pour chercher une inflammation et des facteurs parfois retrouvés en cas de psoriasis (en sachant qu'une prise de sang négative n'exclut pas le diagnostic). "Un été, ma mère a fait des recherches sur Internet et m'a orientée vers un rhumatologue spécialiste de la maladie, qui m'a fait faire des examens très poussés. On s'est orientés vers le rhumatisme psoriasique il y a 6 ans et j'ai intégré un protocole."
Un retard de prise en charge
"Le retard diagnostique pose le problème de la prise en charge, reconnaît le Dr Derancourt. Certains patients, avec peu de symptômes cliniques mais des signes potentiellement destructeurs sur l'imagerie, auraient pu bénéficier d'un traitement de fond d'emblée." On distingue en effet deux types de traitements : celui qui soulage les symptômes et le traitement de fond, qui peut ralentir l'évolution de la maladie et la destruction articulaire.
Un patient peut n'avoir besoin que d'anti-inflammatoires au coup par coup, plus efficaces dans ce cas que le paracétamol, quand un autre nécessite les deux types de traitements. "Quand il y a des signes cliniques quotidiens et dérangeants, ainsi que des signes radiologiques, on prescrit un traitement de fond, détaille le dermatologue. On dispose de thérapies ciblées, les biothérapies (ou anti-TNF alpha) qui permettent de traiter les articulations et la peau, et qui sont très efficaces." Selon les molécules, elles s'administrent par perfusion à l'hôpital toutes les 8 semaines (infliximab), ou par voie sous-cutanée (étanercept toutes les semaines), ou encore toutes les 2 semaines (adalinumab). Ou le méthotrexate, une thérapeutique plus ancienne, est également prescrit et il s'avère efficace sur les atteintes dermatologiques et articulaires au niveau des membres seulement
"On a donc plus d'une dizaine de thérapeutiques différentes en traitement de fond, selon la gravité, les effets secondaires, la voie d'administration que préfère le patient, s'enthousiasme le Dr Derancourt. C'est appréciable car cela donne le choix quand on a une insuffisance d'efficacité !"
Aujourd'hui, Azania souffre parfois de quelques douleurs mais le calvaire des douleurs chroniques qui la réveillaient la nuit et l'épuisaient est enfin terminé : "J'ai été traitée dès que j'ai eu le diagnostic mais j'ai testé beaucoup de traitements avant d'en avoir un efficace". Mais si elle a pu accomplir son rêve, être maman, elle n'oublie pas les autres malades : "C'est vraiment important d'en parler et de faire connaître le rhumatisme psoriasique aux gens, au gouvernement, à la CPAM. On se dit que c'est juste une maladie de peau alors que ça a beaucoup de conséquences sur la vie des patients !"