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Pollution de l'air : sommes-nous protégés ?

Transparent, invisible, indispensable, l'air que nous respirons n'en est pas moins très pollué. Cette pollution est responsable de l'augmentation ces dernières années de nombreuses maladies respiratoires, allergiques et cardiaques mais aussi, d'un nombre important de décès.

La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le

Qu'est-ce que la pollution atmosphérique ?

Marina Carrère d'Encausse et Michel Cymes expliquent les effets de la pollution de l'air.

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que 5% des décès sont causés par la pollution atmosphérique, chaque année dans le monde.

La pollution de l'air définit un mélange de gaz nocifs et de particules émis directement par les voitures (première source de pollution), l'industrie (en particulier les incinérateurs qui rejettent de la dioxine) et la pollution aérienne, troisième source de pollution, responsable de 30% des rejets d'oxyde d'azote dans l'air.

Les polluants sont donc de différentes natures. Mais à partir d'une certaine quantité, ils peuvent généralement tous irriter les muqueuses et les bronches. C'est le cas de l'ozone ou du dioxyde d'azote, des gaz très irritants pour les muqueuses. Ils pénètrent facilement jusqu'aux voies respiratoires les plus fines et entraînent des irritations du nez, des yeux et de la gorge.

La fonction pulmonaire est alors altérée, avec de l'essoufflement et de la toux. En présence de ces gaz, les crises d'asthme deviennent plus fréquentes et plus graves. Chez les plus jeunes, ils favorisent les infections microbiennes des bronches : bronchites chroniques, sinusites et rhinites.

Mais le plus connu des polluants atmosphériques reste le monoxyde de carbone (CO), principalement issu de la fumée des gaz d'échappement. A faibles doses, il diminue la capacité d'oxygénation du cerveau, du coeur et des muscles. Il peut être à l'origine, à plus fortes doses, de problèmes cardiovasculaires, tels que l'angine de poitrine, voire l'infarctus du myocarde.

Est-il dangereux de faire son footing en ville ?

Quels sont les risques pour la santé lorsque l'on fait son footing en pleine ville ?

Difficile d'échapper à la pollution automobile, ce même si on est piéton. Une pollution d'autant plus gênante pour les sportifs, qui pratiquent une activité en ville...

Pollution industrielle : les incinérateurs

Les incinérateurs sont-ils dangereux ?

En matière de pollution industrielle, on peut citer les incinérateurs qui font parfois l'actualité pour leurs rejets hors normes de dioxine... A Fos-sur Mer, associations et habitants s'opposent désespérément, depuis des années, à la construction d'un nouvel incinérateur.

Pollution atmosphérique : notre air est-il encore respirable ?

La pollution atmosphérique à l'étude

Les particules fines sont des microparticules présentes dans l'atmosphère. Elles proviennent du trafic routier, plus particulièrement des moteurs diesels, mais également de l'industrie, de l'agriculture et de la combustion.

En suspension dans l'air, ces polluants entraînent des irritations du nez, de la gorge et des bronches. Les gaz et les particules fines, qui mesurent moins de 2,5 micromètres vont également s'engouffrer dans les voies respiratoires. Les particules les plus fines peuvent aller jusqu'aux alvéoles pulmonaires et provoquer un essoufflement et de la toux. Les conséquences : asthme, allergie, bronchite, voire cancer.

On parle de plus en plus de la pollution atmosphérique et des particules fines qui la composent. Le laboratoire interuniversitaire des systèmes atmosphériques (LISA) de l'université de Créteil mène actuellement une recherche pour comprendre comment fonctionne la pollution atmosphérique et évaluer l'interaction des différents polluants.

Le laboratoire interuniversitaire des systèmes atmosphériques de l'université de Créteil dispose d'une chambre de simulation atmosphérique en acier de 4 mètres cubes. Dans ce grand réacteur, les chercheurs reproduisent la pollution atmosphérique pour la comprendre.

Des gaz sont injectés dans cette chambre de simulation atmosphérique pour voir comment ils interagissent. "Au cours du temps, ces gaz réagissent entre eux et on détecte la formation de particules fines", explique le Pr Jean-François Doussin, enseignant-chercheur à l'université Paris Est-Créteil. Des particules fines qui ont tendance à augmenter en taille et en quantités au cours de la réaction chimique.

Reste à comprendre le mécanisme qui explique cette transformation des polluants. Pour cela, les particules fines sont prélevées sur un filtre et analysées en laboratoire pour déterminer les molécules qui les composent. Ces recherches permettraient ainsi de faire le lien entre cette composition chimique et son effet sur la santé.

Les réactions chimiques étudiées en laboratoire sont ensuite complétées par des prélèvements sur le terrain. Pendant les pics de pollution, comme celui de décembre 2013, les chercheurs mesurent l'intensité de la pollution. Ces mesures de terrain donnent accès à la compréhension des quantités et de la composition de la pollution.

Du laboratoire à la réalité, même constat : pendant les pics de pollution, les concentrations de particules que l'on respire sont beaucoup plus élevées. Ces recherches permettent de prévoir l'évolution de la pollution atmosphérique et d'aider à la prise de décision comme la circulation alternée, qui a été mise en place en février 2014.

Pollution de l'air : où est-on le plus exposé ?

Cyclistes, piétons, automobilistes... où est-on le plus exposé à la pollution ?

Asthme, accidents vasculaires cérébraux, cancers ou encore infertilité, la pollution de l'air a une incidence néfaste sur la santé. Chaque jour, un adulte inhale environ 15 mètres cubes d'air. Cet air est composé à 99% d'oxygène et d'azote, mais il contient aussi de nombreux polluants comme les particules fines, le dioxyde d'azote, et l'ozone... Selon l'OMS, en 2012, près de sept millions de personnes sont décédées prématurément dans le monde à cause de la pollution de l'air.

En juillet 2015, un rapport du Sénat a estimé que le coût sanitaire annuel de la pollution de l'air extérieur se situe entre 68 et 97 milliards d'euros par an en France. En janvier 2016, la Cour des comptes a pointé "l'incohérence de l'action publique" en constatant que "la lutte contre la pollution de l'air n'était pas une priorité, en dehors des pics de pollution".

L'air que l'on respire n'est pas le même partout. Même en ville, l'exposition à la pollution de l'air est différente en fonction du lieu où l'on se trouve. En voiture, à vélo ou à pied... il n'est pas évident de savoir à quelle exposition de polluants nous sommes confrontés. Pour le savoir, nous avons demandé à l'association Respire de faire le test.

Pour tester l'exposition en voiture, un capteur de particules fines est installé. Il enregistre en temps réel la présence de ces polluants invisibles à l'œil nu et les retransmet en direct sur un graphique. "La réglementation autorise d'avoir un niveau de particules fines de 50 microgrammes par mètre cube", explique Sébastien Vray, porte-parole de l'association Respire. Et contrairement à ce que l'on croit, être en voiture ne met pas à l'abri de la pollution : "En voiture, on est au coeur de la pollution, au coeur des émissions de particules fines et d'autres gaz comme le dioxyde d'azote dont on parle peu, mais qui est pourtant un gaz très nocif et très irritant pour les bronches".

Quand on est piéton, l'exposition est pratiquement la même que pour un automobiliste. Mais quand on est piéton, "on peut emprunter une autre route pour moins s'exposer", souligne Sébastien Vray. D'une rue à l'autre, l'exposition à la pollution est différente. À vélo ou à pied, pour être moins exposé aux particules fines, mieux vaut donc éviter les grandes artères. Faites quelques mètres de plus pour rejoindre les rues parallèles.

Le chauffage au bois, source de pollution aux particules fines

Le chauffage au bois des particuliers est une source de pollution de l'air aux particules fines

Le chauffage au bois des particuliers est aussi une source de pollution de l'air aux particules fines. Grenoble–Alpes Métropole a mis en place la Prime Air Bois, une aide financière destinée aux particuliers qui souhaitent changer leur ancien chauffage au bois, antérieurs à 2002, par des appareils plus performants et moins polluants.

Encaissée entre les massifs du Vercors et de la Chartreuse, Grenoble n'offre pourtant pas à ses habitants l'air pur de la montagne. La ville est fréquemment confrontée à des épisodes de pollution. Pour cette raison, la qualité de l'air est régulièrement mesurée grâce à des capteurs. "Les capteurs agissent un peu comme notre respiration", explique Didier Chapuis, directeur territorial Air Rhône-Alpes. "Ils vont prélever de l'air comme on respire de l'air. Et cet air passe dans les analyseurs spécifiques pour chacun des polluants afin d'être analysé et de savoir quelle est la concentration de polluants que l'on a dans l'air ambiant".

Les appareils enregistrent en continu la présence des polluants. Parmi ceux-ci, les particules fines. Et les résultats des analyses sont surprenants car les voitures ne sont pas les premières responsables de cette pollution comme le confirme Didier Chapuis : "Sur le bassin grenoblois, pratiquement la moitié des émissions de particules en suspension sont liées au résidentiel. Et quand on parle du résidentiel, pratiquement l'ensemble des émissions est lié au chauffage au bois non performant".

Ces chauffages au bois non performants sont très présents dans l'agglomération grenobloise. Il s'agit des cheminées à foyer ouvert, des poêles ou des inserts datant d'avant 2002, très polluants et toxiques pour la santé : "La combustion du bois dans le chauffage intérieur, quand on inhale les fumées qui sont dégagées de cette combustion, on va avoir une potentielle toxicité voire une intoxication au long cours. Les fines particules traversent tout l'arbre respiratoire pour aller jusqu'au bout, jusqu'aux alvéoles, traverser les alvéoles et venir dans la circulation générale. C'est la raison pour laquelle nous avons une exposition globale", explique le Dr Nhân Pham-Thi, pneumologue.

Pour lutter contre cette pollution, la métropole grenobloise propose une prime Air Bois, une aide financière de 800 euros qui aide les habitants à acheter des chauffages plus performants. L'agence locale de l'énergie et du climat rend également visite aux habitants afin de leur donner quelques conseils sur le ramonage, le stockage du bois et surtout l'allumage du feu. Pour Christophe Ferrari, président de la métropole, sensibiliser les particuliers sur ces émissions est en effet une priorité.

Aujourd'hui 15.000 cheminées non performantes sont utilisées. Avec cette prime financière, l'agglomération espère qu'un tiers de ces appareils soit changé. Cela entraînerait une baisse de 10% des émissions de particules fines sur le territoire.

Certaines PM2,5 sont spécifiques de la combustion du bois ; leur détection permet d'estimer la contribution du chauffage dans la pollution globale, et également de déduire la part des PM10 associées.

Pollution : la vallée de l'Arve retient son souffle

La vallée de l'Arve est la plus polluée de France. Située au pied du Mont-Blanc, elle compte 155.000 habitants. Entre décembre 2016 et janvier 2017, la vallée de l'Arve a enregistré un triste record : 35 jours consécutifs de pics de pollution aux particules fines. La mobilisation des citoyens est sans précédent et elle prend place en dehors du cadre classique des associations environnementales ou des partis politiques.

Au pied du plus haut sommet d'Europe, les habitants de la vallée de l'Arve qui s'étend de Chamonix à Genève respirent un air loin d'être pur. Le taux de particules fines dans l'air peut atteindre jusqu'à 120 microgrammes par mètre cube pendant les pics de pollution. Un taux bien au-delà des recommandations de l'Organisation mondiale de la santé. En cause principalement, le chauffage au bois, les usines et les voitures et les poids lourds qui empruntent le tunnel du Mont-Blanc. Et comme la vallée est encaissée, les polluants stagnent.

Dans la vallée, la colère gronde. Les citoyens sont de plus en plus nombreux à se mobiliser pour dénoncer l'inertie des pouvoirs publics. Comme le 7 décembre 2016, après un appel sur les réseaux sociaux, plus de 1.000 citoyens se sont rassemblés devant la mairie de Sallanches.

Si les habitants n'ont pas encore gagné le combat, la mobilisation citoyenne permet au moins une couverture médiatique sans précédent sur le sujet. Pour le Dr Frédéric Champly, médecin urgentiste, le premier à avoir lancé l'alerte en 2015, il était temps : "Il y a un impact sur la santé : des pathologies cardiovasculaires, des pathologies respiratoires (cancer du poumon, insuffisance respiratoire...), une altération de la qualité vasculaire avec un risque accru d'infarctus du myocarde, avec un risque accru d'accidents vasculaires cérébraux… Des études de l'OMS montrent qu'il y a 60 à 70 morts prématurées par an dans la vallée de l'Arve".

Le Dr Champly a été sollicité par des citoyens engagés sur la pollution de l'air dans la vallée de l'Arve pour se présenter aux élections législatives du mois de juin 2017.

Pollution de l'air : des malades attaquent l'État

Clotilde Nonnez est la première Française à déposer plainte contre l'Etat pour pointer sa responsabilité de pollueur. Elle souffre en effet d'une bronchopneumopathie chronique et est très sensible aux effets de la pollution atmosphérique. Aujourd'hui, ce combat prend de l'ampleur et une trentaine de personnes entament la même démarche.

Les plaignants sont accompagnés par une association parisienne qui pointe la responsabilité des pouvoirs publics. Sébastien Vray, président de l'ONG "Respire", a eu l'idée du recours administratif contre l'Etat car pour lui, avoir le nez qui coule ou la gorge qui gratte pendant un pic de pollution ne doit pas être une fatalité.

Sébastien Vray travaille au développement d'une application mobile, ayant pour but d'aider à faire le lien entre pollution de l'air et apparition des maladies. L'idée est de transformer chacun de nous en capteur d'air : "Une personne qui a l'application, qui a les poumons qui sifflent, peut le signaler. Cela crée un point sur la carte. Et nous, nous allons interroger Airparif pour dire qu'à cet endroit, il y avait X microgrammes de particules fines, X microgrammes de dioxyde d'azote...".

Chacun des signalements n'a pas valeur scientifique mais le pari de l'application repose sur l'effet de masse. Dans une grande ville comme Paris, pendant un pic de pollution, ces informations pourraient gagner en crédibilité. Il y a pour le moment une trentaine de plaignants dans ce recours administratif contre l'Etat. Mais ils pourraient être beaucoup plus nombreux quand le jugement sera rendu.

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