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Hôpital psychiatrique du Rouvray : "nous sommes constamment en train de pallier une urgence"

Un an après un premier mouvement social, l’hôpital psychiatrique du Rouvray entame à nouveau une grève. Le protocole signé à l’époque n’est toujours pas respecté et les conditions de travail restent catastrophiques.

La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le

Un an après, rien n’a changé. A Sotteville-lès-Rouen, en Seine-Maritime, l’hôpital psychiatrique du Rouvray entame une nouvelle grève illimitée à compter du 19 septembre 2019. "Trois des quatre syndicats de l’hôpital (CFDT, CGT et Sud) ont déposé un préavis de grève qui commence aujourd’hui" nous raconte Jean-Yves Herment, infirmier psychiatrique et délégué syndical CFDT au Centre Hospitalier du Rouvray. "Mais la véritable mobilisation et les actions coups de poing que l'on prévoit auront plutôt lieu la semaine prochaine."

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"On ne voit rien arriver"

Il y a plus d’un an, en juin 2018, Jean-Yves faisait partie des sept personnels de l’hôpital qui s’étaient lancés dans une grève de la faim alors que le mouvement durait déjà depuis le mois de mars.

Au terme de ce mouvement social, les grévistes avaient obtenu gain de cause : "30 postes d’infirmiers et d’aides-soignants pour l’unité hospitalière, la création en urgence d’une unité transitoire pour les patients mineurs et une réorganisation avec un renforcement des effectifs par quart de travail" note principalement l’infirmier. Les syndicats avaient alors signé un protocole avec l’Agence Régionale de Santé et la direction de l’hôpital.

Mais aujourd’hui, "ce protocole n’est toujours pas respecté " déplore Jean-Yves Herment. "On ne voit rien arriver, la direction de l’hôpital ne se soumet pas à ses obligations réglementaires."

Elément déclencheur de cette nouvelle grève : la découverte par le personnel de l’hôpital d’un tableau des effectifs la semaine dernière. "Les postes promis ne sont pas encore recrutés et au lieu de renforcer les unités, ces postes servent à remplacer les départs en retraite" s’indigne l’infirmier et délégué syndical. "Nous ne demandons rien de plus que l’an dernier, nous voulons juste que le protocole signé soit enfin respecté" explique-t-il.

Un taux d’occupation de 110%

Car la situation est toujours catastrophique dans l’unité de psychiatrie du Rouvray. "Le taux d’occupation de l’hôpital est d’environ 110%. On a toujours des patients installés sur des lits de camps, dans des bureaux sans fenêtre et sans sanitaire et des chambres de deux occupées par trois patients" recense le gréviste.

Du côté des effectifs, "on n’est souvent que trois quand on devrait être quatre" constate Jean-Yves Herment. Conséquence, "nous sommes constamment en train de pallier une urgence, de courir après quelque chose. On ne prend jamais le temps de réfléchir au patient car on est moins nombreux que nécessaire pour pouvoir faire du bon travail" regrette-t-il aussi.

Autre problème toujours d’actualité : celui de l’hospitalisation de patients mineurs avec les adultes. "Actuellement on a deux adolescentes de 16 ans hospitalisées aves nos patients adultes" révèle l’infirmier. "Pourtant, les patients mineurs qu’on reçoit sont généralement des enfants ou des adolescents qui ont subi des violences souvent à caractère sexuel et là ils sont à nouveau placés dans un endroit où ils sont soumis à de la violence."

Une pénurie de professionnels sur tout le territoire

Et malheureusement, le cas de l’hôpital du Rouvray n’est pas un cas isolé. "Je suis référent au niveau national pour la CFDT et je vois que le problème des effectifs se pose dans beaucoup d’établissements" note Jean-Yves Herment. La question du salaire, directement liée à celle des effectifs est également fréquente : "car si les hôpitaux psychiatriques ont du mal à recruter, c’est aussi parce que ce sont des professions mal payées."

Au-delà de ces problématiques partagées partout, des différences existent entre les petits et les gros services de psychiatrie. "Les gros services urbains de psychiatrie débordent de patients. C’est moins le cas dans les petits établissements de petites villes mais le problème pour eux est alors le manque de médecin pour fonctionner" observe le délégué syndical. "Sur tout le territoire, on fait donc face à une pénurie structurelle de professionnels hospitaliers, que ce soit des infirmiers ou des médecins."

Urgences générales ou psychiatriques, même combat

La solution, selon les syndicats : plus de moyens. "Et cela ne signifie pas uniquement que nous avons besoin de chèques : il faut rouvrir les hôpitaux de jour qui permettent des prises en charge ambulatoires pour désengorger les urgences psychiatriques" détaille Jean-Yves Herment. Un problème finalement "très similaire à celui des urgences générales".

Hasard du calendrier, les deux députées Martine Wonner (LREM) et Caroline Fiat (LFI), publient le 18 septembre un rapport qui appelle à "sortir enfin la psychiatrie de l'hôpital" en "redéployant 80%" du personnel de cette filière "au bord de l'implosion" vers la ville "à l'horizon 2030".

A cause de son emploi du temps et de l’actualité chargée de cette semaine au centre Hospitalier du Rouvray, Jean-Yves Herment n’a pas encore eu le temps de se pencher sur ce rapport : "Je pense être d’accord sur les notions du rapport mais je ne m’avance pas avant d’avoir complètement creusé le sujet.". Une tâche auquel il s’attèlera dans les prochains jours.

Signature d'une note de service

En réponse à la grève du 19 septembre, la Direction du Centre Hospitalier du Rouvray a "signé la note de service officialisant la mise en place des maquettes organisationnelles de fonctionnement telles que validées par les syndicats en dérogation du protocole d’accord du 29 juin 2018", selon un communiqué de l’hôpital. Par cette signature, la Direction dit apporter "la preuve du respect de ses engagements en terme d’effectifs" et assure que "les 20 postes supplémentaires" seront bien "affectés dans les unités d’hospitalisation" pour atteindre un effectif totale de 439 postes dans l’unité des pôles adultes.
Par ailleurs, concernant l’hospitalisation des mineurs, "une réunion avec les responsables des pôles enfants/adolescents et adultes et les organisations syndicales" devrait être organisée "avant la présentation du projet à l’ARS le 4 octobre".

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