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Recherche : la psychiatrie délaissée

En santé, la recherche, c'est le nerf de la guerre. Grâce à elle, des progrès spectaculaires ont été faits dans la prise en charge du cancer ou du sida. Mais pour cela, il a fallu investir beaucoup d'argent. Et malheureusement en terme de finances, toutes les maladies ne sont pas logées à la même enseigne. En France, la psychiatrie est un domaine qui souffre cruellement du manque de moyens. Aujourd'hui, les maladies mentales ne captent que 2% des budgets alors que 20 à 38% de la population générale sont, à un moment donné, concernés par une pathologie mentale.

La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le

La psychiatrie est en pleine révolution. Si des années de recherche ont permis de mieux comprendre l'origine des maladies mentales, un mélange de génétique, de biologie, de facteurs environnementaux… il est parfois difficile d'aller plus loin, faute d'argent.

Le professeur Krebs rêve de pouvoir détecter les maladies mentales avant leur apparition. Repérer les patients à risque dès l'adolescence à l'aide d'une simple prise de sang, l'objectif est peut-être à portée de main, à condition de trouver 1,5 million d'euros. Du coup, le Pr Krebs consacre un cinquième de son temps, non pas à ses recherches mais à chercher de l'argent. Elle a déposé douze demandes de subventions en 2015, et comme pour la plupart de ses collègues psychiatres, les refus sont nombreux : "En 2015, pour la psychiatrie, le pourcentage de réussite à l'ANR (Agence nationale pour la recherche) était de 2%. C'est une question de savoir où l'on souhaite investir. Il faut tout de même se rappeler qu'environ 20% de la population vont avoir au moins une fois une maladie psychiatrique".

Pour l'OMS, les maladies mentales risquent d'occuper en 2020 la première cause mondiale de handicap. Et même si l'enjeu est colossal, la recherche en psychiatrie ne bénéficie d'aucun traitement de faveur. L'Agence nationale de la recherche étudie près de 35.000 projets par an. Ceux de la petite communauté des psychiatres sont noyés au milieu des autres. "Il est possible que des domaines plus petits en taille, en communauté, en nombre de propositions déposées… reçoivent moins de financements de l'ANR. Mais ce n'est pas l'ANR qui décide de cela, nos appels sont ouverts", explique Michael Matlosz, président directeur général de l'Agence nationale de la recherche.

Pour le Pr Marion Leboyer, psychiatre qui dirige une fondation dédiée à la recherche, il est temps que l'Etat prenne conscience du retard et qu'il investisse : "Tant que la recherche ne sera pas soutenue en psychiatrie comme elle l'a été dans les plans cancer ou les plans Alzheimer, avec une vraie action privée et publique, pour le soutien à l'innovation de la recherche en psychiatrie, la qualité des soins, la qualité de la formation qui est un autre souci ne sera pas au rendez-vous. Et on ne fera pas tout ce qu'on peut faire aujourd'hui pour améliorer la prise en charge de ces personnes. Les maladies mentales comme les autres maladies ont droit à l'innovation". D'autant que ce manque d'investissements a un coût pour la société. En France, les maladies mentales coûteraient 108 milliards d'euros à l'Etat.

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