La drépanocytose, une maladie des globules rouges
C'est la maladie génétique la plus répandue en France et dans le monde. La drépanocytose est une maladie du sang provoquant des symptômes de sévérité variable. Comment la soigner ? Comment vivre avec cette maladie ?
C'est la première maladie génétique dans le monde avec une estimation de plus de 5 millions d'individus atteints (source : Orphanet). C'est aussi la maladie génétique la plus répandue.
Chaque année, en France, un nouveau-né sur 1 323 nait avec une drépanocytose, également appelée anémie falciforme, selon le Vidal. On compte entre 30 000 malades d'après les chiffres gouvernementaux.
La région d'Ile-de-France et l'Outre-mer sont les régions les plus touchées, puisqu'elles concentrent davantage de populations africaines, antillaises, maghrébines, moyen-orientales ou indiennes.
Qu'est-ce que la drépanocytose ?
Le nom "drépanocytose" vient du grec drepanon qui signifie faucille, car dans cette maladie, certains globules rouges prennent une forme de faucille ou de croissant. Un globule rouge sain est circulaire, alors qu'un globule rouge caractéristique de la maladie est déformé.
Cette anomalie est due à une mutation génétique au niveau de l'hémoglobine, substance contenue dans les globules rouges et qui sert à transporter l'oxygène dans le corps. L'hémoglobine est constituée de 4 chaînes, assemblées entre elles (deux chaînes alpha et deux béta).
Dans la drépanocytose, ce sont les chaînes béta qui sont anormales. Par conséquent, les globules rouges deviennent plus rigides et peuvent obstruer la circulation sanguine, dans les vaisseaux et empêcher la distribution de l'oxygène dans l'organisme.
Drépanocytose : quels symptômes ?
Cela entraîne une série de complications graves comme une anémie (qui se manifeste par un essoufflement, une fatigue, une paleur de la peau, des verties...), une insuffisance respiratoire, mais aussi des crises vaso-occlusives très douloureuses qui surviennent dans différentes parties du corps (os, abdomen, rein, cerveau, rétine...), ou la formation d'ulcères.
Dans les cas les plus graves, un accident vasculaire cérébral peut survenir et aller jusqu'à entraîner le décès.
Les patients ont aussi un risque plus élevé de contracter de graves infections bactériennes en raison d'une destruction progressive de la rate, organe-clé pour la destruction des globules rouges et leur recyclage, qui ne remplit plus son rôle dans le système immunitaire.
Un certain nombre de complications chroniques peuvent survenir chez l'adulte et nécessitent un dépistage régulier : complications articulaires, hypertension artérielle pulmonaire, atteinte cardiaque, rénale, oculaire ou encore hépatique (au niveau du foie).
Un trouble de l'érection ou un priapisme (érection prolongée et douloureuse) peut survenir également, ou un ulcère au niveau des jambes, etc.
Les manifestations et la sévérité de la maladie sont très variables d'une personne à l'autre, mais aussi chez une même personne, d'une période à l'autre. Elles sont freinées par une bonne prise en charge médicale.
La drépanocytose touche autant les hommes que les femmes.
Quel dépistage pour la drépanocytose ?
Chez les bébés de parents à risque, un dépistage ciblé est réalisé afin de repérer les dommages éventuels sur les organes.
Il est réalisé à partir d'une goutte de sang chez les nourrissons après 72 heures de vie.
Un bilan complet pour les nourrissons à risque
Durant le bilan effectué, les patients passent une batterie d'examens pour vérifier que leurs organes n'ont pas souffert de la maladie. Le bilan commence par un examen clinique avec le médecin référent qui suit le patient depuis sa naissance : coloration de l'œil, mobilité des articulations, auscultation des voies respiratoires...
Même une petite bronchite peut alerter le médecin car le système immunitaire des malades est fragilisé. Les risques d'infection sont donc plus importants pour ces patients drépanocytaires.
Un examen approfondi de la respiration des patients est également réalisé. Les médecins essaient de mesurer la vitesse du souffle, les capacités pulmonaires et aussi la quantité d'air que le malade peut mobiliser. Car la drépanocytose a aussi un effet sur les poumons et donc le souffle. Pour compléter l'examen des voies respiratoires, les malades effectuent une radio du thorax.
Le marathon médical se poursuit avec un examen déterminant pour détecter d'éventuelles complications neuro-vasculaires : une échographie du crâne. L'échographie du crâne permet d'étudier la circulation du sang dans les artères cérébrales. Les globules rouges malades sont rigides, collants et ils abîment les parois artérielles qui vont réagir en s'épaississant ce qui entraîne un rétrécissement de l'artère et au maximum une occlusion complète de l'artère. Cela peut alors gêner l'oxygénation du cerveau en aval.
Le radiologue explore ensuite les artères carotides au niveau des cervicales. Puis il procède à l'échographie abdominale pour regarder le foie et les voies biliaires, souvent détériorés par la drépanocytose.
Enfin le dernier examen réalisé est une échographie cardiaque. Il est primordial de surveiller la fonction cardiaque des malades drépanocytaires sur le long terme. Le cœur peut en effet être un peu dilaté, et la dilatation excessive peut fatiguer le cœur sur le long terme. Les résultats de ces différents examens sont délivrés par le médecin référent quelques jours après le bilan.
Bientôt un dépistage généralisé en France ?
En novembre 2022, la Haute autorité de santé (HAS) a recommandé mardi 15 novembre de généraliser à tous les nouveaux-nés le dépistage de la drépanocytose, maladie génétique aux effets potentiellement graves.
La généralisation du dépistage de la drépanocytose est déjà intégrée au projet de loi de financement de la sécurité sociale. Cette mesure serait expérimentée trois ans, puis pourrait être indéfiniment étendue si elle apparaissait probante.
Le dépistage à la naissance permet d'engager immédiatement des traitements de nature à alléger les symptômes et éviter les complications.
Vivre avec la drépanocytose et ses traitements
Si la maladie ne se guérit pas encore, on peut traiter les symptômes et prévenir certaines complications. Les douleurs sont traitées par des antalgiques et nécessitent parfois de la morphine tant elles sont importantes. L'oxygénothérapie peut être utilisée et fait appel à l'administration d'oxygène, grâce à un concentrateur d'oxygène.
Les formes sévères de la maladie se traite par un traitement de fond, l'hydroxyurée ou hydroxycarbamide. Elle peut diminuer la fréquence des crises vaso-occlusives très douloureuses. Le traitement est incompatible avec une grossesse et les femmes doivent prendre une contraception, il pourrait avoir une influence sur la fertilité masculine (un prélèvement de sang est habituellement fait avant le début du traitement).
Les complications sont traitées au cas par cas : transfusion pour soigner une anémie, soins locaux pour les ulcères, opération des calculs biliaires, médicaments protecteurs du rein, kinésithérapie respiratoire en cas de pneumonie,...
Les échanges transfusionnels et la greffe de cellules souches
Lorsque l'hydroxycarbamide n'est pas assez efficace, en général chez l'adolescent et l'adulte, les médecins peuvent proposer des échanges transfusionnels, autrement dit une saignée pour soustraire les globules rouges anormaux et des transfusions sanguines multiples qui vont permettre de remplacer les globules rouges anormaux de la personne drépanocytaire par des globules rouges normaux provenant de donneurs de sang sains.
Les patients drépanocytaires ont besoin de transfusions sanguines régulières pour suppléer au manque d'hémoglobine et rester en vie. Mais, à la longue, ces transfusions entraînent une surcharge en fer dans les organes qui nécessitent un traitement secondaire.
La solution pourrait venir de la greffe de cellules souches, par le biais d'une greffe de moelle osseuse, et elle permet d'obtenir la guérison dans 85% des cas. Les cellules souches sont les cellules à l'origine de toutes les cellules du sang, dont les globules rouges. En détruisant la moelle osseuse du malade et en la remplaçant par celle d'un donneur, il y a possibilité d'obtenir une guérison totale.
Peu de patients sont greffés chaque année car la greffe est réservée aux formes très sévères de la maladie ou en cas de risque de mortalité précoce ; c'est en effet un traitement très lourd, nécessitant 6 semaines d'hospitalisation et pouvant provoquer des complications parfois mortelles.
C'est pourtant le seul traitement curatif. La limite, c'est que ce traitement requiert un donneur compatible, un frère ou une sœur, mais c'est le seul traitement curatif de la maladie à l'heure actuelle.
Les espoirs de la thérapie génique
La thérapie génique, qui consiste à réparer le gène défectueux, offre un espoir considérable aux patients. En 2022, un essai de phase I/II a étudié la piste de modifier les cellules souches d'un patient (en réparant le gène) et à lui transplanter à nouveau. Cette technique a amélioré l'état de santé de 3 patients atteints de drépanocytose.
Drépanocytose : trop peu de donneurs de sang compatibles
En France, les réserves de sang sont en dessous du seuil d’alerte. Cette situation impacte directement les drépanocytaires car à cette pénurie s’ajoute celle de la difficulté à récolter du sang de donneurs ethniquement proche des malades, du sang plus compatible.
Pour trouver les lieux de collecte et donner votre sang, rendez-vous sur : www.dondesang.efs.sante.fr
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