Le lymphome, un cancer peu connu mais fréquent
Chaque année, près de 24.000 Français sont atteints du lymphome, un cancer peu connu qui s'attaque au système lymphatique. Pour se soigner, la chimiothérapie, la radio-immunothérapie, les anticorps monoclonaux ou encore la greffe de moelle osseuse ont une place de choix.
Ils représentent la moitié des cancers du sang, soit 23 800 cas (1 800 nouveaux cas de maladie de Hodgkin et 22.000 nouveaux cas de lymphome non hodgkinien). Ce sont les cinquièmes cancers les plus fréquents chez l'adulte. Le lymphome est également le cancer le plus souvent diagnostiqué chez les adolescents de 15 à 17 ans et le troisième cancer le plus fréquent chez les enfants de moins de 14 ans.
Pourtant, le grand public le connaît très mal. Le lymphome est un cancer du système immunitaire, normalement censé nous protéger contre les agressions extérieures. Son diagnostic n'est pas toujours évident car les symptômes peuvent être confondus avec d'autres maladies. Le plus souvent, les patients observent un gonflement des ganglions, mais d'autres signes comme une fièvre persistante ou des sueurs nocturnes peuvent indiquer la présence de la maladie.
Qu'est- ce qu'un lymphome ?
Les lymphomes sont des cancers qui touchent le système lymphatique. Ce système regroupe la moelle osseuse, le thymus, la rate et plus d'une centaine de ganglions qui sont tous reliés les uns aux autres par des vaisseaux qui transportent un liquide transparent, la lymphe. C'est dans la lymphe que circulent les cellules de défense immunitaire.
Parmi elles, les globules blancs et plus précisément les lymphocytes, qui sont les cellules touchées par le lymphome et où débute le cancer. Par exemple, un lymphocyte devient anormal et se multiplie de façon anarchique pour former une tumeur maligne. Les cellules cancéreuses apparaissent au niveau des organes qui filtrent la lymphe comme la rate, le thymus et les ganglions. Ces organes deviennent alors progressivement plus gros et palpables. Comme les cellules lymphatiques circulent partout, un lymphome risque de se développer dans d'autres parties du corps.
Lymphomes hodgkinien ou non hodgkinien
On distingue deux grandes familles de lymphomes. Tout d'abord, le lymphome hodgkinien (ou maladie de Hodgkin) se manifeste essentiellement dans les ganglions lymphatiques, généralement situés au dessus du diaphragme. Il survient chez des sujets jeunes, aux alentours de 30 ans et sont les moins fréquents. On dénombre 1 800 nouveaux cas chaque année.
Les lymphomes non-hodgkiniens, eux, représentent 90% des lymphomes et 22.000 nouveaux cas par an. Ils sont plus hétérogènes puisqu'ils surviennent un peu partout : dans les ganglions lymphatiques, la rate, la moelle osseuse...
On les regroupe en 2 catégories : ceux dont l'évolution est lente, comme les lymphomes folliculaires, et ceux dont l'évolution est agressive et rapide, comme les lymphomes diffus à grandes cellules B.
Lymphome : établir un diagnostic
Pour établir le diagnostic de lymphome et déterminer le type de lymphome, il faut pratiquer une biopsie. C'est l'examen d'un ganglion ou d'un fragment de ganglion. Un examen essentiel car ce n'est qu'une fois le type de lymphome identifié qu'on peut décider du traitement à suivre.
Quand une grosseur suspecte apparaît, il est nécessaire de réaliser une biopsie. Si les anatomopathologistes préfèrent avoir le ganglion en entier après une exérèse chirurgicale, quand la masse et les ganglions sont profonds et pas facilement accessibles, il est nécessaire de recourir à des techniques de ponction guidées par l'imagerie ou par voie chirugical dans les ganglions profonds comme dans le thorax et l'abdomen.
L'analyse du fragment du ganglion ou du ganglion entier permet de savoir s'il s'agit d'un lymphome. Pour établir le diagnostic, de nombreuses étapes sont nécessaires. La première consiste à récupérer les cellules sur des lames. Les lames sont ensuite trempées dans plusieurs solutions qui vont fixer et colorer les cellules. Elles peuvent alors être observées au microscope.
Le fragment du ganglion est ensuite mis dans une petite boîte appelée cassette. Il est par la suite déshydraté dans un appareil pendant au moins une heure. Puis la cassette est enrobée de paraffine pour préserver le tissu et permettre sa coupe. Les morceaux sont ensuite déposés sur des lames, puis colorés.
24 heures après la biopsie, le tissu est enfin prêt à être analysé. Une interprétation plus précise peut être faite. Objectif : affiner le diagnostic. Encore 24 heures plus tard, l'analyse est complétée par une immunohistochimie, une méthode qui utilise les anticorps pour détecter les antigènes.
Au total il faut compter en moyenne une semaine pour établir le diagnostic après la biopsie, même si le résultat prend parfois plus de temps.
Lymphome : le TEP-scanner pour un diagnostic précis
Les examens d'imagerie sont de plus en plus précis et aident les médecins à poser les diagnostics et améliorer la prise en charge des malades. Ils font appeler au scanenr, parfois à l'IRM, et surtout au TEP-scanner, appelé PET-scanner en anglais, qui permet de déceler des tumeurs de très petite taille et d'évaluer l'activité de la tumeur.
Le TEP-scan permet de repérer les tumeurs cancéreuses : on injecte au patient du glucose marqué par un produit radioactif. Une fois dans le corps, celui-ci se fixe sur les cellules malignes.
Une heure après l'injection, le patient est installé sous un scanner. Les images acquises permettent de localiser le glucose, véritable marqueur des cellules malignes. Les données sont ensuite analysées par un médecin.
Contrairement aux examens radiologiques classiques, le TEP-scan permet de voir les tumeurs d'une taille inférieure à 5 millimètres. Cet examen permet aussi de mesurer rapidement l'efficacité du traitement et de l'adapter si besoin.
Lymphome : préparer les patients au traitement
L'annonce de la maladie est un moment très fort et traumatisant pour les patients. Souvent bouleversés, le moment est mal choisi pour leur expliquer le déroulement de leur traitement. Depuis la mise en place du dernier plan cancer, de nouvelles consultations d'accompagnement se multiplient dans les hôpitaux. Ces rendez-vous post-diagnostiques et pré-traitements, avec une infirmière, permettent aux patients de mieux se préparer aux chimiothérapies et aux autres traitements.
L'objectif de ces entretiens est de vérifier avec le patient qu'il a bien compris leur principe et leur déroulement. C'est aussi l'occasion pour le patient de poser toutes les questions qu'il souhaite. Chaque entretien avec l'infirmière est unique car elle doit s'adapter aux attentes de chaque patient.
Le rendez-vous avec l'infirmière intervient en général huit à dix jours après l'annonce de la maladie par le médecin. Parler de la maladie mais surtout de comment mieux vivre son traitement, l'infirmière donne aussi quelques conseils pratiques. Souvent très émus, les patients retiendraient à peine 30% des informations qu'ils ont reçus pendant la consultation. Une prise en charge psychologique leur est proposée dès le début du traitement.
La greffe de moelle osseuse pour traiter certains lymphomes
La plupart des lymphomes continuent d'être traités par la chimiothérapie et/ou radiothérapie, les anticorps monoclonaux (voir paragraphe ci-dessous).
Mais dans certains cas, les malades doivent recevoir une greffe de moelle. Cette greffe ou autogreffe de moelle osseuse permet de consolider le traitement et de réduire le risque de rechute.
Selon le Dr Pauline Brice, hématologue, la greffe de moelle osseuse est un traitement standard dans les rechutes d'un lymphome de Hodgkin, elle était jusqu'à récemment beaucoup utilisée en consolidation d'un traitement. Actuellement, les greffes de moelle osseuse sont moins fréquentes grâce aux nouvelles molécules et aux anticorps et grâce à l'utilisation du TEP-scanner qui permet de vérifier rapidement que les patients sont chimio-sensibles et qu'ils n'auront pas besoin d'une consolidation intensive avec autogreffe.
Lymphome : des traitements moins invasifs
Comme tous les autres cancers, les lymphomes sont traités par chimiothérapie et radiothérapie. Mais depuis quelques années, des médicaments plus efficaces et moins invasifs permettent de lutter plus efficacement contre ces tumeurs.
Les anticorps monoclonaux peuvent être prescrits après une chimiothérapie ; ils ciblent plus précisément les cellules tumorales. "Avec la chimiothérapie et les anticorps monoclonaux, on va attaquer la cellule tumorale sous différents angles. Avec les anticorps monoclonaux on va attaquer la cellule tumorale par un endroit différent que celui par lequel on attaque avec la chimiothérapie. C'est la conjonction de ces attaques à différents endroits qui vont permettre d'obtenir de meilleurs résultats", explique le Pr Paul Coppo, hématologue à l'hôpital Saint-Antoine (Paris).
Fatigue, nausées, perte de cheveux… la chimiothérapie est lourde d'effets secondaires. Elle détruit les cellules cancéreuses mais elle détruit aussi les cellules saines. Les anticorps monoclonaux, eux, savent choisir. Lorsqu'une cellule saine devient cancéreuse, ses propriétés changent. À sa surface on trouve un élément particulier : des protéines. Comme un missile à tête chercheuse, les anticorps monoclonaux reconnaissent cette protéine et n'attaquent que les cellules malades qui les portent. Il s'agit par exemple du rituximab.
"Le médicament en l'occurrence l'anticorps va se déverser dans le sang, se répandre dans tout l'organisme. Il va donc y avoir un véritable effet systémique, disséminé de la chimiothérapie et de l'anticorps à tout l'organisme. Ce traitement a l'avantage pouvoir traiter tous les sites potentiellement atteints par le lymphome, ce qui est bien souvent le cas", souligne le Pr Paul Coppo.
À chaque type de lymphome correspond des traitements anti-monoclonaux différents. On les utilise aussi en traitement d'entretien pour éviter les rechutes. Grâce à eux, près de 20% de patients supplémentaires a pu être sauvés, et voir leur espérance de vie améliorée.
Après une cure de chimiothérapie et d'anticorps monoclonaux, il est fréquent que les patients soient très affaiblis. Les deux traitements ont attaqué les globules rouges et blancs, ainsi que les plaquettes présentes dans le sang. Dans ce cas, une greffe de moelle osseuse saine, prélevée chez le patient avant traitement, permettra de relancer la production de cellules saines.
Lymphomes : des thérapies ciblées prometteuses
Les traitements biologiques, immunothérapie comprise, font désormais partie de l'arsenal thérapeutique contre les lymphomes.
Leur objectif est d'améliorer la survie globale et la qualité de vie des patients atteints de ces cancers. Il s'agit par exemple du rituximab ou de l'obinutuzumab contre certains lymphomes non hodgkiniens, de l'interféron ou des immunotoxines.
Chez un patient atteint de lymphome, les cellules de défense ont à leur surface des protéines qui participent à la prolifération des cellules malades. Le médicament ingéré va se lier à ces protéines pour bloquer leur action chimique. Il empêche ainsi les cellules tumorales de croître et de proliférer.
Pour contrôler l'efficacité du traitement, les patients sont suivis régulièrement. L'occasion pour le médecin de vérifier à la palpation la présence ou non de ganglions, le symptôme le plus courant du lymphome.
Lymphome : l'espoir de l'immunothérapie
Si les chimiothérapies et les radiothérapies sont les traitements les plus classiques dans le traitement des lymphomes, on a aussi recours aujourd'hui à l'immunothérapie. L'objectif est de renforcer de l'intérieur le système immunitaire du patient pour qu'il puisse lutter lui-même contre la maladie.
À la différence d'une chimiothérapie qui détruit les cellules cancéreuses, l'immunothérapie va utiliser notre propre système de défense en le stimulant. Les cellules tumorales contiennent en surface des protéines qui empêchent le système immunitaire de se défendre. L'immunothérapie injectée contient des anticorps qui bloquent l'action de ces protéines. Cela permet au système immunitaire du patient de reconnaître à nouveau et d'éliminer les cellules malignes.
Cellules CAR-T, une nouvelle immunothérapie
Pour traiter les lymphomes les plus agressifs, un nouveau protocole de recherche consiste à modifier génétiquement les lymphocytes du patient pour qu'ils détruisent les cellules cancéreuses. Les cellules CAR-T (chimeric antigen receptor-T) font partie de l'immunothérapie. Trois médicaments (Kimriah®, Yescarta®, Tecartus®) sont désormais disponibles en France.
L'objectif du traitement est de redonner aux cellules immunitaires du patient la capacité de lutter contre le lymphome. Première étape, pendant plusieurs heures, une machine prélève un certain type de globules blancs appelés lymphocytes T (ceux qui détruisent les cellules étrangères au corps). Les échantillons sont ensuite envoyés dans un laboratoire pour être transformés.
Un virus inoffensif est alors introduit dans les lymphocytes. Ce virus a la capacité de modifier génétiquement la cellule. De nouveaux récepteurs apparaissent à la surface de ces lymphocytes. Une fois armés, ils sont réinjectés dans l'organisme et vont combattre les cellules cancéreuses : après les avoir identifiées, ils les détruisent.
40 à 50% des patients présentent une réponse complète ; parmi eux, 80% ne montrent pas de signe de progression au bout de 2 ans.
Ces résultats d'essais cliniques sont à confirmer en vie réelle évidemment. Mais ces médicaments ne sont pas anodins : la quasi-totalité des patients présente des effets secondaires sérieux, raison pour laquelle ces médicaments ne sont délivrés que par des centres agréés (source : France espoir lymphome).