Comment anticiper la perte d'autonomie ?
Rester autonome, c'est anticiper. Mais à partir de quand ? À partir de quel âge consulter un gériatre ? Les généralistes sont-ils suffisamment formés aux problèmes du vieillissement ?
Les réponses avec le Dr Christophe Trivalle, gériatre, et avec le Dr Philippe Denormandie, chirurgien orthopédiste :
"Il faut se préparer autour de la cinquantaine pour rester autonome. C'est une bonne période. Vers la cinquantaine il faut commencer à réfléchir, notamment avant le passage à la retraite. Avant la retraite, il faut se préparer et anticiper ce que l'on va faire après la retraite. En général, il y a une cassure assez importante au moment de la retraite où les personnes n'ont pas bien préparé, n'ont pas anticipé… Tout dépend aussi de l'investissement qu'ils avaient dans leur travail mais ceux qui étaient très investis dans leur travail, quand ils s'arrêtent du jour au lendemain, il n'y a plus rien derrière et cela prédit un mauvais vieillissement.
"Il y a aussi des premiers signes dès 50-55 ans, qui commencent à apparaître et où il faut anticiper. On peut citer la baisse de l'audition, on a du mal à entendre les conversations quand on est au restaurant, quand il y a un peu de bruit… Il faut alors essayer de se faire appareiller le plus tôt possible parce qu'il est très difficile de supporter les appareils auditifs. Beaucoup de personnes en achètent mais ne les mettent jamais. Plus on s'y prend tôt, plus on les supportera et plus à 70-75 ans, on entendra et on gardera du lien social.
"Les généralistes ont une patientèle assez âgée. Il est donc intéressant qu'ils soient formés à la prise en charge des personnes âgées. Le gériatre intervient en général auprès des personnes âgées de plus de 75 ans et des personnes plutôt poly-pathologiques, qui ont plusieurs maladies. Les personnes de plus de 75 ans qui sont en bonne santé et qui vont bien continuent à être suivies par leur généraliste, il n'y a pas de souci. Il y a des gériatres qui commencent à faire des consultations de prévention. Et à ce moment-là, ils voient des personnes autour de la cinquantaine."
"On a plutôt tendance à subir la dépendance. Il faut imaginer les choses beaucoup plus tôt. Cela me fait penser au monde du handicap. Dans le monde du handicap, on se bat pour maintenir des capacités alors que dans le monde de la personne âgée, on subit vite et on est dans une logique de dépendance. Il faut changer de paradigme. Il est logique d'écouter son corps. L'élément le plus important, c'est de se dire comment je peux maintenir mes capacités quel que soit l'âge, qu'on soit handicapé jeune ou qu'on ait 58 ans ou 70 ans… Maintenir des capacités signifie que la personne et son environnement s'interrogent régulièrement sur le problème sensoriel, le problème auditif mais aussi le problème des pieds, de la nutrition…
"Il faut voir comment on est à l'écoute de son corps et de faire en sorte que dès je sens que j'ai une petite capacité qui diminue, je me re-questionne avec mon environnement pour voir s'il n'y a pas des moyens pour maintenir les capacités ou en tout cas d'adapter au mieux les capacités. On est à ce moment-là dans une logique positive et pas dans une logique négative. Et en France on est dans une logique assez négative. En Allemagne et dans d'autres pays la vision est beaucoup plus positive. Il y a encore une révolution. La loi autonomie va dans ce sens mais on sent que l'on part de loin. Il ne faut pas dire tout d'un coup que la dépendance ne concerne que les gériatres. Le maintien de l'autonomie est un sujet qui intéresse tout le monde."
"La situation est en train de basculer car il y a un plan de prévention national de la perte d'autonomie. Et on essaie justement d'anticiper en étant plus positif. Pour ne pas devenir dépendant, il faut avant s'être entretenu et avoir fait des démarches suffisantes pour être en bon état de santé. Il faut essentiellement se concentrer sur la nutrition et l'exercice physique qui sont deux points clés."