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Kératocône : la cornée déformée

Une cornée qui se déforme en cône ? C'est le kératocône, une maladie de l'oeil peu connue. Comment les lunettes et les lentilles peuvent-elles corriger la déformation ? Quand peut-on avoir recours à la chirurgie ? Comment se déroule une greffe de cornée ?

La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le
Marina Carrère d'Encausse et Antoine Piau expliquent le kératocône

Le kératocône est une déformation évolutive de l'oeil, et plus précisément de la cornée. La cornée est très bombée voire conique.

La cornée est une membrane transparente. Normalement, elle suit la courbure de l'oeil. Elle a un rôle très important dans la vision car elle reçoit et filtre les rayons de lumière avant de les diriger vers la rétine, située à l'arrière de l'oeil. La rétine transforme ensuite ces rayons en signaux, interprétés par le cerveau en images.

Une cornée atteinte de kératocône se ramollit, elle devient trop souple et s'abîme jusqu'à se déformer. Elle perd sa forme sphérique et prend la forme d'un cône. Les rayons qui la traversent sont dérivés et mal perçus par la rétine. Résultat, l'image est déformée, on voit flou, les images se dédoublent. Un astigmatisme survient, puis une myopie. 

Les causes du kératocône restent encore inconnues bien qu'on soupçonne un caractère génétique. Le kératocône est souvent découvert à la puberté. Un facteur génétique pourrait intervenir mais un facteur de risque a été bien identifié : le fait de se frotter les yeux, qui créé un micro-traumatisme de la cornée. L'allergie pourrait également intervenir sans que l'on comprenne pourquoi, tout comme les anomalies du tissu de la cornée.

Des lunettes ou des lentilles comme traitements

Les traitements du kératocône sont adaptés à sa gravité et à son évolution. L'affection débute en général à la puberté. L'évolution est très variable d'un patient à l'autre, mais elle se stabilise souvent après 30 ou 40 ans. En pratique, l'astigmatisme s'aggrave, l'asymétrie de l'oeil s'accentue et la cornée s'amincit. Au pire, des opacités apparaissent sur la cornée, qui perd sa transparence, et le patient ne voit plus rien.

Mais s'il y a aggravation, elle se fait surtout avant l'âge de 20 ans, la découverte de cas est rare après 30 ans.

Les lunettes ne sont suffisantes que dans les formes peu évoluées. Il faut donc passer aux lentilles assez rapidement, même si les médecins essayent de retarder le plus possible ce passage car les lentilles restent agressives pour les yeux.  Les lentilles souples ne suffisent que dans les cas les plus légers, il faut ensuite passer aux lentilles semi-rigides.

Pour les cas les les plus sévères, "l'orthokératologie" pourrait être intéressante. Elle consiste en des lentilles rigides à porter la nuit. Grâce à leur rigidité, elles redonnent une forme normale de la cornée. Toutefois, la technique est toujours en cours d'évaluation.

Un spécialiste de l'adaptation des lentilles, appelé contactologue, est préférable pour la prise en charge. 

Autre problème : étant parfaitement adaptées aux anomalies des yeux, les lentilles coûtent très chères, plus de 100 euros la lentille. Lorsqu'elles ne sont plus tolérées, il est nécessaire de passer à la chirurgie, avec la pose d'anneaux intra-cornéens, dans la cornée (voir paragraphe ci-dessous). 

La chirurgie du kératocône

On utilise une technique appelée photo-abalation au laser excimer. Elle consiste à polir le sommet du kératocône.

La greffe de cornée

Dès lors que le patient voit très mal et que les lentilles ne suffisent plus, et la greffe de cornée est indispensable, c'est le cas chez une personne sur dix. Elle est réalisée lorsque la pose d'anneaux intra-cornéens (voir paragraphe ci-dessous) ne suffit plus. Elle répond à des critères bien précis.

La plupart du temps, le chirurgien greffe toute la cornée mais il existe une autre technique, mieux tolérée, qui consiste à ne greffer que les deux premières couches.

Kératocône : la pose d'anneaux cornéens

Lorsque l'oeil ne tolère plus les lentilles, il faut envisager une alternative chirurgicale comme la pose d'anneaux intra-cornéens. L'anneau sert à rééquilibrer la forme de la cornée et à pallier les déformations. Tout le monde ne peut pas en bénéficier, il est nécessaire notamment de ne pas présenter d'opacité au milieu de la cornée.

Pratiquée depuis 1997, cette technique semble avoir fait ses preuves à moyen et long terme et les anneaux sont en général bien tolérés par les patients. Mais dans les cas les plus extrêmes de kératocônes, elle ne fait que retarder la greffe de cornée, solution de la dernière chance pour préserver la vue.

Stabiliser l'évolution du kératocône, avec le cross-linking

Jusqu'à récemment, on savait comment corriger les effets de la maladie mais on ne savait pas comment la freiner, alors que certaines formes sévères de kératocône évoluent très vite et peuvent aboutir à la perte quasi totale de la vision. Ce sont celles qui touchent les adolescents et les jeunes adultes.

Mais depuis 2007 une nouvelle technique permet de bloquer l'évolution du kératocône. C'est le cross-linking. Cette technique permet de rigidifier la couche principale de la cornée, le stroma, ramollie par le kératocône. La technique est simple, il s'agit d'une réaction chimique à un produit qui va durcir la cornée.

Pour cela, il faut d'abord gratter à la brosse la première couche de la cornée, qu'on appelle l'épithélium. Il s'agit d'une couche fine protectrice qui se renouvelle très régulièrement. On découvre ainsi la partie atteinte par le kératocône, le stroma. On dépose sur ce stroma des gouttes de vitamine B2 régulièrement pour imprégner la cornée. L'oeil est ensuite placé sous un faisceau de rayon UVA pendant plusieurs minutes. À l'heure actuelle, il s'agit du seul traitement efficace et durable, entre cinq à dix ans.

Le cross-linking est une intervention coûteuse, entre 500 et 1.300 euros par oeil. La Sécurité sociale ne rembourse qu'à hauteur de 250 euros environ. 

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