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Abus sur des enfants handicapés : une lanceuse d’alerte relaxée

Céline Boussié, qui était jugée pour avoir dénoncé la maltraitance d’enfants handicapés dans un IME, a été relaxée.

Maud Le Rest
Rédigé le , mis à jour le

"La justice a reconnu que pendant 20 ans, ces enfants ont été maltraités et abandonnés. Elle leur a rendu leur dignité", a affirmé Céline Boussié, ex-salariée de l'institut médico-éducatif (IME) de Moussaron, dans le Gers, à Allodocteurs.fr.

En 2013, cette dernière avait alarmé sur les maltraitances que subissaient des enfants lourdement handicapés au sein de l’IME dans lequel elle travaillait. Le 22 novembre, elle a été innocentée par le tribunal correctionnel de Toulouse. Son procès avait commencé le 19 septembre, après que l'IME avait porté plainte contre elle pour diffamation. La journaliste d’Europe 1 Wendy Bouchard, qui présentait une émission dans laquelle Céline Boussié lancé l’alerte, était aussi visée par cette procédure. Elle a également été relaxée.

L’IME placé sous administration provisoire

"Je peux désormais envisager plus sereinement l'avenir, même s'il me reste encore à passer devant les prud'hommes pour ma procédure de licenciement, qui a débuté en 2014", a expliqué la lanceuse d’alerte au sortir de son procès. Celle-ci avait sollicité la presse et l'Agence régionale de santé (ARS) quelques mois plus tôt. L’ARS avait alors diligenté une enquête, qui avait révélé, en juillet 2013, de "graves dysfonctionnements" et des "violences institutionnelles" au sein de l’IME de Moussaron. Le ministère des Personnes handicapées avait placé l'IME sous administration provisoire quatre mois plus tard et déposé une plainte contre X pour "abus de bien social et abus de confiance dans la gestion de la société". Ce qui n’avait néanmoins pas empêché l’établissement de porter plainte contre Céline Boussié et de la licencier. Puis, en 2014, un documentaire sur l'IME de Moussaron réalisé par Nicolas Bourgouin et diffusé dans Zone Interdite, sur M6, avait révélé des images d’enfants attachés, enfermés, ou couchés dans des lits trop petits.

Une jeune fille enfermée pendant dix jours

"Ce combat est un combat pour l'humain", a affirmé Céline Boussié au sortir du tribunal. C’est "un message d'espoir magnifique pour les travailleurs sociaux, pour les lanceurs et lanceuses d'alerte [...]. Le message, c'est qu’il faut parler, libérer la parole. Ne pas le faire, c'est au détriment des personnes fragiles et vulnérables", a-t-elle ajouté. En France, c'est la première fois que la justice relaxe un lanceur d'alerte poursuivi pour diffamation. "Ce dossier est symbolique. La maltraitance des enfants en situation de handicap est un vrai sujet de société. Là-dessus, la France a 40 ans de retard ! La notion de maltraitance institutionnelle n’est même pas inscrite dans le Code pénal" déplore Céline Boussié.

A lire aussi : "Handicap : Céline Boussié jugée pour avoir dénoncé des maltraitances sur des enfants"

En septembre dernier, lors de son procès, elle avait raconté les maltraitances que vivaient les enfants de l’IME gersois, et des extraits du reportage de Nicolas Bourgouin avaient été diffusés. "Trait pour trait, c'est ce que je voyais", avait assuré l’accusée, qui avait par ailleurs dénoncé "l'enfermement d'une jeune fille pendant dix jours" et "des coups portés aux enfants". "Cette victoire est celle de tous les lanceurs d'alerte et de tous les travailleurs sociaux qui dénoncent des faits anormaux comme je l'ai fait", se réjouit Céline Boussié.

Des cas de maltraitance à Cherbourg et en Gironde

"Et il existe des cas similaires dans d’autres IME", ajoute l’ancienne salarié. "Ca ne veut pas dire qu’on constate des cas de maltraitance dans tous ces établissements, mais quand il y en a, ils sont très graves. Demain sera par exemple rendu un jugement dans l’affaire de Jacqueline et Michel Thomas, dont l’enfant, qui avait été placé à l’IME de Cherbourg, est décédé suite à des maltraitances il y a sept ans. Par ailleurs, sept éducateurs de l’IME d’Eysines, en Gironde, ont été témoins d’actes de violences entre enfants. Ils ont parlé et ont été lourdement sanctionnés : deux d’entre eux ont subi trois mois de mise à pied sans solde. Ces éducateurs ne peuvent plus parler à la presse, sous peine d’être de nouveau sanctionnés", déplore-t-elle.

En ce qui concerne l’IME de Moussaron, "une fermeture n’est pas d’actualité", note la lanceuse d’alerte. "L’IME a été mis sous administration provisoire le 21 novembre 2013. Il a donc fallu attendre quatre ans pour que soit reconnu le calvaire de ces enfants. Cependant, l’équipe de direction n’a toujours pas été renouvelée", précise-t-elle.

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