Distilbène : le laboratoire condamné à verser 3 millions d’euros au petit-fils d'une patiente traitée
L’homme souffre d'infirmité motrice cérébrale. Le tribunal a fait le lien entre sa condition et l'anomalie utérine de sa mère, dont la mère avait elle-même pris du Distilbène.
La justice a encore une fois reconnu que le Distilbène avait des effets sur les petits-enfants des femmes qui en ont pris pendant leur grossesse. Le 28 février, le Tribunal de Grande Instance de Nanterre a condamné le laboratoire UCB Pharma et son assureur à payer environ 2,96 millions d'euros à un homme indirectement victime du médicament. Celui-ci, aujourd'hui âgé d'une trentaine d'années, est né prématurément à cause de l'anomalie utérine de sa mère, elle-même liée à la prise de Distilbène de sa grand-mère. Il souffre d’infirmité motrice cérébrale.
Des souffrances endurées depuis l’enfance et un accompagnant au quotidien
Le laboratoire ne commercialise plus le médicament depuis 1983. Il doit aujourd’hui réparer le préjudice du jeune homme, notamment les souffrances endurées depuis son enfance, le financement d'un accompagnant au quotidien ou l'incidence sur sa vie professionnelle. "UCB fera face à ses responsabilités comme elle l'a déjà fait dans des cas semblables", a déclaré Jean-Michel Joubert, porte-parole d'UCB en France. Le laboratoire ne s’est pas encore prononcé sur un éventuel appel. Cette décision "évite à la famille des tracas administratifs et l'inquiétude éventuelle d'une rente qui n'est pas versée par le laboratoire dans les délais fixés", a de son côté réagi Martine Verdier, avocate de la famille.
En 30 ans, 200.000 femmes enceintes auraient pris du Distilbène
Prescrit entre 1948 et 1977 pour éviter les fausses couches, le diéthylstilbœstrol (D.E.S, oestrogène de synthèse commercialisé en France sous les noms de Distilbène et Stilboestrol Borne) a eu des conséquences dramatiques sur la santé des bébés exposés in utero. En 30 ans, 200.000 femmes enceintes auraient reçu du D.E.S, et 160.000 enfants sont nés de ces grossesses.
Outre les cancers génitaux, 40 ans d'études épidémiologiques ont confirmé que les "filles du Distilbène" présentaient un risque accru de malformations génitales et une fréquence élevée d'accidents de reproduction. Certains "fils du Distilbène" ont, pour leur part, développé des kystes au niveau de l'épididyme, des hypospadias ou des anomalies des testicules.
Une étude épidémiologique publiée en 2011 a par ailleurs montré que les petits-enfants des femmes traitées avec cette hormone de synthèse sont 40 à 50 fois plus exposés au risque de malformations génitales. La même année, dans une décision qui a fait jurisprudence, la cour d'appel de Versailles a reconnu un lien entre la prise de Distilbène et ce handicap à la deuxième génération.