La mère de Lou, 11 ans, dénonce la responsabilité de l’hôpital Necker dans le décès de sa fille
Une fillette de 11 ans est morte en décembre dernier à l’hôpital Necker à Paris des suites d’une péritonite après de longues heures d'attente aux urgences. Pour ses parents, sa mort aurait pu être évitée.
Démissions en masse, urgences en grève, soignants à bout de souffle... La crise qui frappe l’hôpital public pose question : la qualité des soins est-elle toujours assurée dans des services sous-tension ? C’est dans ce contexte que l’hôpital Necker à Paris a connu un drame en décembre dernier : une petite fille de 11 ans, Lou, est décédée.
La fillette renvoyée plusieurs fois chez elle
Pour ses parents, sa mort aurait pu être évitée. Après avoir longuement attendu aux urgences, au moment de sa prise en charge la petite fille souffrait d’une péritonite. Le diagnostic de torsion intestinale n’aurait pas été posé à temps.
« Les urgences étaient bondées, décrit Stéphanie, et quand Lou a dit qu’elle avait extrêmement mal (une douleur évaluée à 12/10) malgré tout elle a attendu des heures et des heures. »
Lou est examinée, puis renvoyée chez elle pour une angine. Le lendemain, la douleur est si vive que Stéphanie la ramène aux urgences de l'hôpital Necker de Paris. Après différents examens, une fois de plus, elle rentre à la maison.
Une « incompétence fondamentale et une négligence »
Pour la maman, cette dernière décision reflète une « incompétence fondamentale et une négligence. » « Ce n’est pas possible de renvoyer un enfant avec une douleur telle en disant « Madame, écoutez, vous vous inquiétez pour rien ! » »
Impuissante face à la douleur de sa fille, Stéphanie se décide à l’emmener dans un cabinet privé pour faire d’autres examens. « L’échographiste juste en voyant le visage de Lou, elle était pâle, elle s’était mordue la bouche de douleur, a pris peur », explique la maman. « Elle s’est dit "non mais j’ai même pas besoin de faire d’échographie, elle est en péritonite, ça ne va pas du tout." Elle a appelé tout de suite la chirurgie viscérale en disant "vous allez direct là-bas, il faut qu’elle soit prise en charge." »
Une péritonite détectée trop tard
Malgré l’urgence, Lou attend encore de nombreuses heures avant d’être opérée. Une fois au bloc opératoire, les chirurgiens découvrent une gangrène de l’intestin grêle. Plusieurs interventions ne parviendront pas à sauver la petite fille. Elle décède quelques jours après.
« Je suis extrêmement attristée car la perte d’un enfant, ce n’est pas possible, aucun parent ne doit vivre ça et aucun enfant ne doit subir le calvaire que Lou a subi… Aujourd’hui à Paris, en France, à l’hôpital Necker ! Une référence mondiale ! C’est juste impensable. »
« La sécurité des patients n’est pas assurée »
En pleine crise de l’hôpital public, ce drame questionne la qualité de la prise en charge des patients aux urgences. « La sécurité des patients n’est pas assurée comme elle devrait l’être », assure le Dr Christophe Prudhomme, médecin urgentiste et porte-parole de l’Association des Médecins Urgentistes de France. « Prendre en charge les gens correctement cela signifie que, en cas de doute, on doit hospitaliser. Mais comme on n’a pas de lits, même quand on a un petit doute, on donne des consignes aux parents et on les renvoie à la maison », se désespère-t-il. « C’est ça, le problème. On en permanence sur le fil du rasoir et en étant sur le fil, statistiquement cela entraîne une surmortalité évitable. »
Manque de temps
Manque d’effectifs, manque de moyens… Et manque de temps, pourtant nécessaire auprès des plus jeunes patients. Comme avec Lou, handicapée à la suite d'une erreur médicale à la naissance. Pour Anne Gautier, porte parole du collectif Handi-Actif France, le handicap est un frein supplémentaire dans certains services d’urgences.
« On peut penser quand même que la petite Lou a pâti de son handicap et que les médecins ont jugé qu’elle n’était pas digne de confiance puisqu’elle était handicapée. Nous pouvons dire que tous les enfants souffrent de ce manque de moyens (de l’hôpital), mais comme il faut un peu plus de temps pour faire un diagnostic à un enfant handicapé, si les médecins n’ont plus ce temps, il ne faut pas s’étonner qu’ils passent à côté de diagnostic aussi basiques. »
"La responsabilité « morale » d'Agnès Buzyn"
Le Dr Christophe Prudhomme s’exclame : « In fine, qui est responsable de cette mort ? C’est une chaîne, mais en haut de la chaîne y a un chef. Le chef, c’est Agnès Buzyn ! Elle a une responsabilité morale sur ce décès et ça il faut le dire dans les médias ! Il faut que les parents portent plainte pour qu’on aille rechercher les responsabilités jusqu’en haut de la chaîne de décisions. »
L’hôpital Necker n’a pas souhaité faire de commentaire sur ce dossier. Une médiation a été proposée aux parents de Lou. Une date devrait être fixée prochainement.