Le tramadol, aussi dangereux que la morphine ?
Les médicaments à base de tramadol exposent à des risques d’effets indésirables graves, dont des surdoses mortelles, alerte la revue Prescrire. La revue appelle à la vigilance et au recours à d’autres médicaments antidouleur.
C'est le médicament antidouleur chouchou des Français. Le tramadol, cet antalgique de pallier II (sur une échelle de trois palliers) - destiné à traiter des douleurs modérées à sévères - est l'antidouleur le plus vendu. Pourtant, son utilisation ne doit pas être banalisée, alerte la revue Prescrire dans une publication datée du 1er mars 2020. La revue médicale indépendante met en garde une nouvelle fois sur les risques liés au tramadol, un médicament antalgique opioïde.
Cette molécule "expose à des risques qui exigent la même vigilance qu’avec la morphine" note Prescrire.
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De quels risques s’agit-il ? Le tramadol expose tout d'abord à plusieurs risques d’effets indésirables communs à tous les opioïdes : des troubles digestifs, neuropsychiques et respiratoires, une dépendance à la fois physique et psychologique et une accoutumance.
Surdoses mortelles
Mais ce n’est pas tout. Le tramadol entraîne également un risque d’effets indésirables spécifiques. Parmi ces effets indésirables, on observe des troubles du rythme cardiaque et une hypoglycémie. Celle-ci est particulièrement dangereuse chez les personnes diabétiques et à l’origine de possibles séquelles visuelles et neurocognitives chez tous les patients.
Enfin, le tramadol est le médicament opioïde le plus impliqué dans les surdoses involontaires et il est, avec la morphine, l’opioïde le plus impliqué dans les surdoses mortelles.
Consommation et mortalité sont liées
Des études britanniques et coréennes montrent même, selon Prescrire, un surrisque de mort lié au tramadol par rapport à d’autres antidouleurs.
Selon une autre étude britannique, de 2004 à 2014, "la mortalité imputée à l'utilisation du tramadol a augmenté parallèlement à sa consommation" note Prescrire. Puis, en 2014, quand la réglementation sur le tramadol a été renforcée, "la consommation a diminué et la mortalité aussi".
"Cela confirme qu'en cas d'utilisation d'un opioïde dit faible, malgré de grandes différences de réputation et de réglementation, il est prudent d'être au moins aussi vigilant qu'avec la morphine" conclut la revue Prescrire.
Se tourner vers le paracétamol et les anti-inflammatoires
Problème : en France, le tramadol est l’antidouleur le plus vendu depuis que le dextropropoxyphène (plus connu sous le nom de Di-antalvic) a été retiré du marché. Sa consommation a ainsi augmenté de 30 % depuis que le Di-antalvic® a été retiré du marché en mars 2011.
"La prise en charge de la douleur doit passer par une meilleure maîtrise des traitements antalgiques autres que médicamenteux, et de l'utilisation du paracétamol et des antalgiques AINS (ibuprofène, naproxène)" conseille aujourd’hui Prescrire.
De son côté, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) a publié le 16 janvier de nouvelles recommandations de prescription du tramadol pour limiter son mésusage et le risque de dépendance. Ainsi, dès le 15 avril 2020, la durée maximale de prescription des antalgiques à base de tramadol par voie orale sera réduite de douze à trois mois. "Au-delà de trois mois, la poursuite d’un traitement par tramadol (voie orale) nécessitera une nouvelle ordonnance" a précisé l’Agence.