Les tests d'autodiagnostic en libre accès sont-ils utiles ?
Après l'automédication, la tendance est à l'autodiagnostic. Des autotests vendus en pharmacie promettent de réaliser un diagnostic en quelques minutes à partir d’une seule goutte de sang.
Etes-vous allergique ? Souffrez-vous d'une carence en fer ? Etes-vous bien immunisé contre le tétanos ? Pour obtenir la réponse à ces questions, rien de plus simple : aujourd'hui, des kits vendus en pharmacie vous promettent un diagnostic en quelques minutes en réalisant le test vous-même.
Simples d'utilisation, le principe de ces autotests est toujours le même : il faut déposer une goutte de sang sur un révélateur puis ajouter du diluant. Dix minutes plus tard, un résultat positif ou négatif apparait sous forme de bandes colorées. Un test à faire chez soi mais qui nécessite tout de même un certain accompagnement.
Parmi toute la gamme d'autotests disponibles sur le marché, l'un d’entre eux a retenu notre attention : celui qui évalue le taux de PSA (Prostate Specific Antigen), un marqueur biologique surveillé en cas de cancer de la prostate. En guise d'évaluation, l'autotest ne donne en réalité qu'une seule indication : si le taux de PSA se situe en dessous de 4, le test est négatif, s’il est au dessus de 4, il est considéré comme positif.
Pour mieux comprendre, nous l’avons soumis au Pr François Degrandchamps, urologue à l’hôpital Saint-Louis, à Paris (AP-HP). "Si le taux de PSA est au-dessus de 4, cela signifie soit que la prostate est trop grosse, c’est l’adénome, c’est bénin. Soit on est en face d’un cancer de la prostate et donc dans les deux cas de figure, il faut consulter", explique-t-il. Selon ce spécialiste, "le problème se pose en cas de résultat négatif. Car un test négatif n’élimine pas un cancer de la prostate agressif. Le danger est donc la fausse assurance d'avoir une prostate en bonne santé au motif que le test est négatif", poursuit-il.
Et l'avis de cet urologue est loin d’être isolé. L'Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM) avait interdit en 2012 la mise sur le marché de ces tests d'autodiagnostic du PSA. Mais trois ans plus tard, sa décision avait été annulée par le Conseil d'Etat. Et ce malgré l'avis d'une autre autorité sanitaire : la Haute autorité de santé (HAS). En effet, pour la HAS "il n y a pas de démonstration robuste du bénéfice d'un dépistage du cancer de la prostate par dosage de PSA".
Selon Christian Saout, secrétaire général délégué du Collectif interassociatif sur la santé, cette situation doit être mise au clair pour protéger l’intérêt des patients : "L’adéquation de la pertinence du test par rapport aux recommandations scientifiques doit être totale. Cela ne sert à rien de mettre en circulation des tests qui ne respectent pas les recommandations scientifiques ou qui ont un niveau de fiabilité inadmissible. Il faut élaborer une « police sanitaire » de ces tests", affirme-t-il.
Aujourd'hui, ces tests sont vendus une quinzaine d'euros et ils ne sont pas remboursés par l'Assurance maladie, contrairement à des examens prescrits par un spécialiste.