Déserts médicaux : même les morts attendent le médecin...
Quand un proche meurt à domicile, les familles ont de plus en plus de mal à faire constater ce décès par un médecin. L'attente peut durer des heures, parfois même des jours entiers. Une situation insupportable.
Catherine a perdu sa mère quelques jours après ses 86 ans. Une mort naturelle, à domicile, simple en apparence... Pourtant, tout s'est rapidement compliqué : impossible de faire venir un médecin pour certifier le décès. "On a découvert maman le dimanche soir à 20h30. Ce n’est pas facile de trouver un médecin à cette heure-là. En même temps, à SOS médecins, ils sont censés se déplacer à n'importe quelle heure. Bien sûr, il faut soigner les vivants, je le comprends tout à fait… mais il est incompréhensible qu’aucun médecin ne vienne", témoigne Catherine Dumont-Coret.
Comme elle, en France, de nombreuses familles font face au manque de médecins pour certifier un décès à domicile. Confronté plusieurs fois à cette situation dans sa commune, le maire de Laigneville, dans l'Oise, n'a pas hésité à faire preuve d'humour noir pour alerter les autorités publiques. Il a rédigé un arrêté symbolique sur lequel on peut lire : "Le maire de la commune de Laigneville considérant la pénurie de médecin et considérant le temps mis à constater un décès sur la commune arrête qu’il est interdit aux Laignevillois de décéder en leur domicile". D'autres élus s'inquiètent de la situation. "Sur la communauté de communes, qui représente 24.000 habitants, nous n'avons plus que quatre médecins qui sont totalement débordés… Ils n'arrivent déjà pas à assumer leur garde normale, ils ne peuvent pas, en plus, constater des décès à domicile".
Mais pour Jaques Battistoni, président de MG France, l'un des principaux syndicats de médecins, le problème est ailleurs : "L'Assurance maladie rembourse la maladie, elle ne rembourse pas le décès. L'acte est rémunéré 100 euros mais seulement entre 20h00 le soir et 8 h le matin. En dehors de ces horaires, l'acte n'est pas rémunéré. Du coup, on établit souvent une feuille de soins au nom d'un membre de la famille présent à ce moment-là".
En France, seul un médecin est habilité à rédiger un certificat de décès. Ce document est indispensable pour lever le corps, réaliser les démarches administratives et organiser les obsèques. En juillet 2017, un député de Seine-et-Marne a proposé de déléguer cet acte médical à d'autres spécialités. Aux infirmiers libéraux par exemple. La ministre des Solidarités et de la Santé ne s'est toujours pas prononcée sur la question.