Vaccination : à quoi va servir le "collectif citoyen" souhaité par Emmanuel Macron ?
Les futures campagnes de vaccination soulèvent de nombreuses interrogations éthiques, scientifiques et démocratiques. Emmanuel Macron souhaiterait que le public participe à la réflexion à travers un "collectif citoyen". Dans quel but ?
Le maître-mot de cette pandémie est la confiance ! Selon les derniers sondages, la moitié des Français n’envisageraient pas de se faire vacciner.
Des chiffres qui placent la France en tête des pays les plus réfractaires au plan mondial, c’est pourquoi Emmanuel Macron a décidé que le public participera à la réflexion sur la stratégie vaccinale.
La nouvelle idée d’Emmanuel Macron est de faire participer les citoyens au processus de décision. Tout ce qui vient d’en haut est aujourd’hui rejeté par une partie de la population. Il faut donc faire appel aux Français.
C’est pourquoi un collectif de citoyens destiné à réfléchir à la stratégie vaccinale du Covid-19 va être créé dans les prochaines semaines. Le président l’avait annoncé lors de son allocution le 24 novembre dernier. L’objectif affiché, est la transparence pour faire tomber les peurs et les fantasmes autour des vaccins.
Fonctionnement de ce collectif citoyen
Ce collectif sera constitué de 30 Français avec des anti-vaccins, des réticents, des pros vaccins etc….
Ces citoyens seront en dialogue avec le conseil d’orientation vaccinal présidé par Alain Fisher, "Monsieur vaccin". Ces citoyens ne vont pas travailler dans leur coin mais en collaboration avec le comité des scientifiques, le comité des élus locaux et le comité des parties prenantes (assos, syndic etc...).
A travers eux, le conseil d’orientation vaccinal veut identifier les freins, la défiance et l’acceptabilité des Français vis-à-vis de la vaccination. A priori ils seront aussi force de propositions. Le but est de mettre en place une stratégie pour que le plus de Français se fassent vacciner.
Une procédure nouvelle
Ce n'est pas vraiment nouveau puisqu'en 2016 Marisol Touraine était déjà très inquiète de la défiance des français face aux vaccins. Elle avait créé un jury citoyen présidé par Alain Fisher. A l’époque, les citoyens avaient échangé avec des scientifiques et participé avec des spécialistes à l’élaboration de propositions qui avaient été remises à la ministre de la Santé. L’une des recommandations était l’obligation vaccinale pour les enfants.
Un collectif utile à l’époque
La part des propositions issues de ce collectif de citoyens qui a été retenue n'est pas connue. En revanche, le collectif s'est plaint dans la presse parce que leurs recommandations divergeaient de celles présentées au public notamment sur leurs réticences aux vaccins contenant de l’aluminium. Il est parfois compliqué de faire de la démocratie participative au plan national. C’est aussi ce qui s’est passé avec la convention climat et les 150 personnes tirées au sort.
Un outil politiquement intéressant
L’idée à la base est séduisante. Quand il a été annoncé un tirage au sort de citoyens, c'était une façon de gagner des points. Les Français entendaient alors : "On va vous écouter ". Le problème est le résultat. Avec ce qui s’est passé avec la convention climat, il y a une certaine défiance. Certains des citoyens qui ne sont ni élus, ni spécialistes du sujet mais à qui a été donné une forme de légitimité ont formulé des propositions. Il leur avait été promis de toutes les appliquer.
Or, aujourd’hui, c'est loin d’être le cas pour de multiples raisons. Le problème est que le collectif a maintenant une voix médiatique, ses membres sont en colère et se retournent contre son créateur, Emmanuel Macron. Le bilan est politiquement plutôt négatif.
Emmanuel Macron serait-il en train de reproduire la même erreur avec le collectif sur les vaccins ? Les mêmes causes produisent-elles les mêmes effets ?
Des collectifs citoyens à tout prix
C’est clairement un aveu de faiblesse de nos dirigeants. Soit les politiques qui mettent en place ces collectifs considèrent qu’ils sont déconnectés de la population, soit ils le font de façon démagogique en sachant qu’ils n’appliqueront pas leurs recommandations. Dans les deux cas c'est grave.
Par ailleurs, 30 Français peuvent-ils être représentatifs de la population ?
Ces collectifs citoyens représentent un affront aux yeux des élus notamment à l’assemblée nationale et au Sénat qui eux sont censés représenter le peuple français. Marine Le Pen, (députée du Pas-de-Calais) expliquait ce qu’elle pense de ce collectif citoyens lors de son passage sur France inter.
Elle n’est pas la seule à avoir cet avis. Ls Républicains aussi se demandent quelle est la légitimité de ces collectifs qui ne sont pas élus. En revanche, du côté des EELV le procédé est plutôt plébiscité. Julien Bayou pense que c’est un outil démocratique fabuleux à condition de retenir les avis des citoyens. Comme ça n’a pas été le cas pour la convention climat, il considère que le gouvernement est antidémocratique.
La conclusion est que ni les citoyens tirés au sort ni l’opposition ne sont satisfaits. Emmanuel Macron crée son propre piège et ce n'est pas terminé d’entendre parler de ce collectif citoyens sur les vaccins.