Anxiolytiques, cannabis, alcool : le cocktail détonnant des étudiants en médecine
Entre la première et la deuxième année, les étudiants en médecine passent d’une consommation accrue d'anxiolytiques et antidépresseurs à un usage excessif d’alcool, de tabac et de cannabis, selon une étude française.
Médicaments, tabac, cannabis, alcool… Des chercheurs en psychiatrie de l’université Aix-Marseille se sont intéressés aux comportements d’addiction des étudiants en première et deuxième année de médecine, avant et après le concours de la PACES.
Selon leurs observations, les premières années consomment plus de médicaments quand les deuxièmes années se tournent davantage vers la psychothérapie mais aussi vers la consommation de drogues licites et illicites. Ils publient leurs résultats dans le Journal of Affective Disorders le 15 janvier 2020.
A lire aussi : Près d’un étudiant en médecine sur deux en burn-out
Deux fois plus d’antidépresseurs en première année
Pour réaliser cette étude, les chercheurs ont demandé aux étudiants de 35 universités de médecine françaises de remplir un questionnaire anonyme en ligne entre décembre 2016 et mai 2017. Un total de 4.345 étudiants s’est prêté au jeu, dont 3.051 premières années et 1.294 deuxièmes années.
Résultat : les consommations évoluent entre la première et la deuxième année. Côté médicaments, "les étudiants de première année consommaient deux fois plus d’antidépresseurs et 1,5 fois plus d’anxiolytiques que ceux de deuxième année" notent les chercheurs dans leur étude. "En revanche, les étudiants de deuxième année étaient presque deux fois plus susceptibles d’être suivis en psychiatrie" précisent-ils. En cause : "un manque de temps" probable en première année dû à la préparation du concours de la PACES pour demander un examen de la santé mentale, proposent les auteurs.
Combiner études et vie sociale en deuxième année
En parallèle, les résultats de cette enquête montrent que les étudiants en deuxième année sont "quatre fois plus à risque d’exprimer une consommation dangereuse d’alcool" et que la probabilité qu’ils fument est 25% plus forte. Ils consomment également plus de cannabis et recherchent plus d’effets sédatifs et stimulants. Une observation "suggérant des difficultés plus importantes pour combiner leurs études et leur vie sociale", interprètent les chercheurs.
Une "expérience traumatique"
En somme, "ces résultats suggèrent que le concours de première année pourrait être vécu comme une expérience traumatique par les étudiants" selon le docteur Guillaume Fond, co-auteur de l’étude. "Ils pourraient consommer des psychotropes pour faire face à la pression des études dans un premier temps, puis amorcer une psychothérapie dans un second temps - ce qu'on retrouve plus fréquemment chez les femmes - ou bien se tourner vers des produits psychoactifs licites ou non - plus fréquents chez les hommes" poursuit-il.
Vers des programmes de prévention en santé mentale ?
Mais ce que ces résultats suggèrent aussi, c’est le besoin "urgent" de "développer des programmes de prévention de santé mentale" chez les étudiants en médecine. Les auteurs citent l’apprentissage de méthodes de gestion du stress, des sessions de discussion mais aussi des actions de prévention de la toxicomanie. Pour orienter au mieux les programmes de prévention à mettre en place, "ces données devraient être confirmées par d’autres travaux" tempèrent les chercheurs.
Et bien que la PACES telle qu’elle est actuellement connue disparaisse dès la rentrée prochaine, le PASS (Parcours Spécifique Accès Santé) et la LAS (Licence avec option Accès Santé) resteront des filières sélectives et devraient également constituer une source majeure de stress pour les étudiants.