Des bénévoles au secours des migrants à la frontière franco-italienne
Le grand froid frappe la région de Montgenèvre dans les Hautes-Alpes depuis bientôt un mois. A ces difficiles conditions météorologiques, vient s'ajouter le contrôle des forces de l'ordre ainsi que le harcèlement des policiers contre les maraudeurs de l’association "Tous Migrants".
Entre le village de Clavière, côté italien et Briançon, côté français dans le col de Montgenèvre, tous les jours, des hommes, des familles avec enfants, originaires d’Iran, d’Afghanistan, d’Afrique de l’Ouest viennent chercher un avenir meilleur. Ils traversent cette frontière dans le froid, de jour comme de nuit après des heures de marche sans aucun équipement.
Des bénévoles, comme Baptiste, de "Tous Migrants" leur viennent en aide. A chaque maraude, ils risquent d’avoir des ennuis avec les forces de l’ordre sur place.
"L’idée c’est d’aider les gens, ce n’est pas de les faire passer. Donc là si tu veux tout ça c’est l’Italie. C’est quand ils sont arrivés en France tout seul, l’idée c’est de les mettre à l’abri. La, frontière, elle fait comme ça. Donc là si un migrant est là en bas il est côté italien … c’est considéré comme une aide au passage … pour éviter d’avoir des problèmes avec la justice" explique Baptiste.
Les bénévoles rencontrent souvent des problèmes avec la justice. Pourtant ils revendiquent le droit de mettre à l’abri des exilés qui arrivent frigorifiés, affamés et parfois blessés par leur parcours. De l’autre côté, il y a les forces de l’ordre qui cherchent à reconduire les migrants à la frontière.
Une petite victoire a eu lieu pour les associations puisque dernièrement le tribunal administratif de Marseille leur a donné raison. Il a suspendu l’arrêté du préfet des Hautes-Alpes sur l’interdiction de porter assistance à des migrants. Les policiers et militaires surveillent de très près les maraudeurs, les migrants ainsi que les journalistes.
Une aide médicale bienvenue
Cette aide c’est "Médecins Du Monde" qui l’apporte. Engelures, infections cutanées, insomnie, le Dr Jean-Luc Pesle, qui est bénévole voit passer tous types de problèmes. Il a pris en charge un homme originaire d’Iran, il y a trois mois alors qu’il traversait la Grèce. Il a été renversé par un poids lourd et opéré sur place. Il a continué son périple sans suivi médical. Aujourd'hui, il demande au médecin un scanner car il est inquiet :
"Je vérifie qu’il respire bien. Dis-lui qu’il n’y a pas d’urgence à ce qu’on lui fasse un scanner. Moi, je vais faire ce que je peux faire ici avec la pharmacie que j’ai, qui est limitée quand même mais je pense que pour eux c’est important, ils vont pouvoir continuer leur voyage. Ce petit regard sur eux, je pense que c’est déjà pas mal. Good Luck for your travel. Les symptômes qu’ils ont c’est quelque chose qui montre toute leur souffrance".
Pour prendre en charge cette souffrance, il n’y a pas que Médecins du Monde sur place. Le Refuge Solidaire17 qui est situé à une quinzaine de km du Col de Montgenèvre accueille les migrants. Cet endroit est une ancienne caserne des CRS de Montagne. Pauline qui travaille dans ce lieu explique son fonctionnement.
"On leur donne à manger … Là c’est le réfectoire, donc c’est là où les gens mangent, les gens dorment sur les matelas par terre, on essaie prioritairement de donner un lit et un dortoir. On reste un lieu de transit, les gens restent deux/trois jours et après ils repartent".
Des violations des droits humains
Tous les migrants qui traversent cette frontière n’ont pas la chance d’arriver jusqu’à ce refuge. Souvent la PAF, la police aux frontières les emmène dans leurs locaux.
Durant une maraude, les bénévoles ont appris l’interpellation d’une famille qui venait de traverser la frontière alors que le Dr Jean-Luc Pesle voulait leur apporter les premiers soins.
- "Bonjour, on a su que vous aviez récupéré une famille. On est une équipe santé. On a su que la PAF avait récupéré une famille de migrants et je voudrais savoir si on peut les examiner. J’aimerais faire un peu de forcing. Ils y ont droit et ça n’est pas toujours fait".
Après avoir longtemps attendu dans le froid et juste après l’arrivée de la police italienne, la réponse des forces de l’ordre française arrive enfin aux bénévoles.
- "Peut-être qu’on va avoir des nouvelles là. Il y a les Italiens qui arrivent pour récupérer la famille peut-être. Eux, ils ont le droit de rentrer".
- "On ne peut pas rentrer là, on ne sait pas s’ils ont demandé un médecin ou pas. A mon avis, j’ai un petit doute. Je pense qu’on n'y arrivera pas".
Le Dr Pesle est résigné mais les maraudes se poursuivront malgré tout. Le Refuge Solidaire est censé fermer ses portes en avril, à l’issue de la trêve hivernale, à la demande non pas des bénévoles, mais de la communauté de commune du briançonnais.