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"Quand vous entrez chez les pompiers, vous signez pour faire de l’urgence vitale, pas le taxi"

À l’image du personnel des urgences, les pompiers ne faiblissent pas. En grève depuis le 26 juin, les soldats du feu sont à bout.

La rédaction d'Allo Docteurs
Rédigé le , mis à jour le
Les sapeurs-pompiers professionnels sont en grève depuis le 26 juin  —  © CGT SDIS 12 sur Facebook

“On ne peut pas demander l’impossible avec moins de monde”, déclare Jérôme François, sapeur-pompier professionnel dans le Val d’Oise et secrétaire général de l’UNSA-SDIS. Sur-sollicitation, manque de moyens humains et techniques... Les pompiers, en grève depuis le 26 juin dernier, expriment leur ras-le-bol. 

Sur leurs véhicules, sont tagués les slogans “gouvernement méprisant”, “en grève”, ou “service de secours en danger”. Comme le personnel des urgences, les pompiers portent des brassards pour montrer leur mécontentement. Ce mouvement symbolique (ils sont tenus d’assurer leurs missions) est suivi par 85% des pompiers professionnels, selon les syndicats. “Tous participent, même si certains sont plus expressifs, comme ceux des Pyrénées-Atlantiques, de l’Aube ou de la Côte d’Or”, détaille André Goretti, adjudant-chef à Antibes et président de la Fédération autonome SPP-PATS.

Une intervention pour “un dentier bloqué”

Dans l’imaginaire commun, les pompiers s’habillent de leurs vêtements de feu, déploient des lances à incendie, ou de grandes échelles pour intervenir lors de situations d’urgence… Mais ce n’est plus le cas, selon Jérôme François. Aujourd'hui, ils sont appelés pour “un dentier bloqué”, “un enfant de sept ans qui refuse de faire ses devoirs”, ou “une douleur à l’éjaculation depuis trois semaines”, détaille cet officier supérieur. 

En effet, les incendies ne représentent que 6% des interventions des soldats du feu. Celles qui concernent les “relevages à la personne” ont en revanche explosé : elles sont passées de 120.000 en 2010 à plus de 200.000 en 2017. Elles ne relèvent pourtant pas de leur domaine de compétences.

“Les pompiers sont usés, car les interventions ne les intéressent plus. Quand vous entrez chez les pompiers, vous signez pour faire de l’urgence, pas le taxi”, déplore-t-il. Selon lui, “le Samu a trop tendance à appuyer sur le bouton sapeur-pompier, parce que c’est moins cher que les ambulances”. Il dénonce "beaucoup d'abus" au bénéfice du doute et pointe du doigt une mauvaise organisation.

Il reconnaît tout de même le manque de moyens du Samu et le "déficit de médecins régulateurs” . D'ailleurs, pour André Goretti, président de la Fédération autonome SPP-PATS, "le service public de secours est malade".

Cette situation contribue aussi à l’engorgement des services d’urgences, selon ces deux professionnels. Ils affirment “vivre les mêmes maux” que le personnel des 213 services actuellement en grève. “Parfois, des pompiers arrivent aux urgences en véhicule avec le patient et attendent jusqu’à 3 heures. Si on nous appelle pour une urgence vitale, il n'y a plus de personnel pour intervenir", déplore André Goretti.

“Depuis trois ou quatre ans, certains quittent la profession”

Pourtant, d’après les derniers chiffres du ministère de l’Intérieur, les pompiers en activité sont un peu plus nombreux. Ils étaient 246.800 en 2016, contre 248.000 en 2017, dont 79% de volontaires. Mais leur charge de travail augmente. Le nombre d’interventions a bondi de 2,4% : plus de 4,6 millions en 2017, soit une toutes les sept secondes sur tout le territoire français. Pour Jérôme François, “soit on recentre les missions, soit on recrute beaucoup plus pour continuer les missions de transport”.

En compensant le manque de moyens du Samu ou même de la police, les pompiers ne s’y retrouvent plus… “En 30 ans de métier, je n’ai jamais vu ça. Depuis trois ou quatre ans, certains quittent le métier, et d’autres prennent des disponibilités pour trouver une autre profession” regrette Jérôme François. "Je vois que les gens souffrent”, ajoute-t-il.

Une manifestation à Paris prévue à la rentrée

Stopper cette sur-sollicitation et augmenter les moyens pour mettre fin au malaise dans la profession doit être au coeur des discussions, selon ces syndicalistes. D’autres revendications s’ajoutent à leur préavis de grève, comme la revalorisation de la prime de feu à 28%, ou une amélioration de leur régime de retraite.

Pour l’instant, ces deux porte-paroles affirment n’avoir eu aucun contact avec le gouvernement depuis le début de la grève. Pour André Goretti, “le mépris est total”. Une première réunion a eu lieu avec le Conseil de la Fonction Publique et Territoriale, mais pour Jérôme François “les propositions sont trop timides”. Le mouvement devrait continuer après le 31 août. Une grande manifestation dans la capitale devrait être organisée à la rentrée.

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