Les violences faites aux femmes plus nombreuses dans les Outre-mer qu'en métropole
Les violences faites aux femmes sont plus nombreuses dans les Outre-mer que dans l'Hexagone, selon un rapport du Conseil économique, social et environnemental (Cese), qui préconise la création de plus de "places refuges" pour les femmes victimes.
Validé ce 29 mars, ce rapport du Conseil économique, social et environnemental (Cese) recommande un "rattrapage" en terme de politique publique dans les Outre-mer, au vu "des inégalités en terme de moyens mis en œuvre" pour lutter contre les violences faites aux femmes.
Les auteurs du rapport, Ernestine Ronai et Dominique Rivière, soulignent le manque de données statistiques disponibles pour dresser un panorama complet des violences faites aux femmes dans chacun des territoires ultramarins. Mais en se basant sur quelques études parcellaires déjà menées, le Cese souligne par exemple qu'à La Réunion, "les taux de violences sont du même niveau qu’en métropole alors qu’ils sont beaucoup plus élevés en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie" (études de 2002 et 2003).
Sur ce dernier territoire, le taux déclaré de violences faites aux femmes est sept fois plus élevé qu'en métropole, selon une étude de 2016.
Un problème dans tous les territoires
Le bilan 2016 de la délinquance souligne aussi que les cas de coups et blessures volontaires dans la sphère familiale sont les plus fréquents en Polynésie (4,2 faits pour 1.000 habitants) et en Nouvelle-Calédonie (3,5), contre 1,5 pour la moyenne métropolitaine.
En Guyane, une enquête de 2015 révèle que la violence au sein des ménages est deux fois supérieure à l'Hexagone. À La Réunion (étude de 2015), les violences sexuelles hors du ménage concernent 7% de la population (4,4% en Hexagone) ; au sein du ménage, 3,9% des personnes sont exposées à la violence d'un proche (2,4% dans l'Hexagone). Enfin, dans huit territoires sur onze, le taux de coups et blessures volontaires dans la sphère familiale est significativement plus élevé que le niveau métropolitain, en particulier à Saint-Martin, en Polynésie française, Nouvelle-Calédonie et Guyane.
Un contexte socio-économique difficile
Le Cese note parmi les facteurs aggravants des violences faites aux femmes dans les Outre-mer, "des histoires plurielles marquées par la violence (colonisation, esclavage, bagne)" et une insularité et la faible superficie de certains territoires qui "peuvent entraver la libération de la parole des victimes et rendre inopérant l’éloignement de la personne violente ou le choix d'un lieu anonyme pour un accueil".
Il souligne aussi "un contexte socio-économique difficile", avec des taux de chômage plus élevés que dans l'Hexagone, "une vie commune de plusieurs générations dans un même logement [...] qui peut favoriser une promiscuité générant des violences intrafamiliales", et une proportion de personnes sans diplôme plus élevée.
Déployer les dispositifs qui existent déjà en métropole
Parmi ses 40 recommandations, le Cese insiste sur la nécessité de déployer dans les Outre-mer le téléphone Grave Danger (téléphone portable pour alerter les secours). Il devrait être généralisé depuis août 2014 mais il "ne fait pas encore l'objet d’un déploiement dans tous les Outre-mer du fait de la diversité des opérateurs téléphoniques sur ces territoires et des problèmes de réseau".
Il recommande de mieux doter les Outre-mer en lieux d’écoute et d’orientation pour les femmes victimes, de mettre en place dans tous les territoires des "numéros verts dont les écoutants doivent être des professionnels" et "le dispositif des intervenants sociaux en commissariat et gendarmerie".
Il recommande aussi que les campagnes de sensibilisation contre les violences faites aux femmes soient renforcées, et que "les supports innovants de diffusion, tel un projet de feuilleton [de type telenovela] initié à Mayotte" soient encouragés.
Le Cese préconise d’accroître "significativement" dans les Outre-mer l'offre de places dans les centres d’hébergement et dans les établissements d’accueil mère-enfants, pas assez nombreuses, et conseille aussi la création de bons de taxis ou de transport afin d'aider les victimes dans leurs différentes démarches (porter plainte, atteindre les unités-médico judiciaires ou des lieux de mise en sécurité, etc.).
avec AFP