Les failles des méthodes de contraception naturelles
La Fédération Nationale des Collèges de Gynécologie Médicale alerte sur l’absence de fiabilité des moyens de contraception "naturels". Sa présidente rappelle les contraintes et les risques inhérents à leur utilisation.
Suivi de la courbe de température, observance de la glaire cervicale, méthode du retrait ou encore abstinence périodique, les méthodes de contraception dites "naturelles" sont de retour. "Avec la crise de confiance dans la pilule, on est de plus en plus dans le « tout sauf le médicament »", regrette le Dr Pia de Reilhac, gynécologue médicale et présidente de la Fédération Nationale des Collèges de Gynécologie Médicale (FNCGM). Or, "ces techniques contraceptives ont un taux d'échec de 17 à 20%", souligne la médecin, avec, in fine, le risque d’une grossesse non désirée.
"La femme n'est pas un robot"
Pour la présidente de la FNCGM, aller vers les moyens de contraception naturels, "c’est un choix possible, à condition de savoir que la probabilité d’être enceinte est plus élevée qu’avec les autres méthodes", insiste-t-elle. Pour le retrait, par exemple, le taux d'efficacité est de 78% et de 75% pour l'abstinence périodique, contre 99,9% pour l'implant hormonal, plus de 99% pour le stérilet hormonal ou au cuivre, 92% pour l'anneau vaginal et 91% pour la pilule*.
"Ces méthodes naturelles présentent d’énormes contraintes", fait remarquer le Dr de Reilhac. "Il n'est pas si simple que cela de suivre son cycle car il faut être très vigilant, et même en l’étant, on peut être enceinte", ajoute-t-elle. "L'être humain n'est pas un robot, le corps varie, change, et la fonction de reproduction n'échappe pas à la règle", précise-t-elle. Divers phénomènes (état de santé, stress, inquiétude, grippe) peuvent, notamment, décaler les périodes d'ovulation.
"Si une grossesse non désirée chez les femmes vivant en couple stable n‘est pas forcément un drame, la situation peut devenir beaucoup plus délicate chez une jeune femme qui n'aura pas forcément de compagnon attitré et pour qui l’idée d’avoir enfant est encore loin", ajoute la gynécologue, avec un risque acru de recours à l'IVG.
En janvier 2018, un hôpital de Stockholm a d'ailleurs lancé une alerte auprès de l'agence nationale du médicament suédoise après avoir constaté que 37 avortements avaient été réalisés par des femmes utilisant l’application Natural Cycles, censée être capable d’identifier la période de fertilité d’une femme en fonction de sa température corporelle.
Les femmes jeunes en première ligne
Selon les dernières rapports de l’INED (Institut national d’études démographiques), les chiffres des IVG, stables depuis 2010 (environ 220.000 par an), sont les plus élevés chez les 20-24 ans, avec une augmentation des avortements multiples pour cette tranche d'âge. Ainsi, 10% de ces jeunes femmes ont déjà fait 2 IVG et 4%, 3 IVG ou plus. "D’où la nécessité de faire attention aux méthodes naturelles", insiste la gynécologue qui ajoute que "les autres méthodes de contraception, qui sont plus efficaces, n’entraîneront pas, pour la grande majorité des femmes, de problèmes de santé".
Selon la spécialiste, "il est donc important que, pour chaque jeune femme, la première consultation de contraception se fasse avec un gynécologue". Car "cela permet de faire le point sur les attentes et de lui proposer différentes méthodes", ajoute-t-elle. La pilule, bien sûr, mais aussi, pour celles qui fument ou celles qui ont des inquiétudes, le stérilet au cuivre ou hormonal, l’anneau vaginal, le patch ou l’implant contraceptif, notamment. Ainsi que le préservatif, pour ces messieurs qui, de plus, protège des maladies sexuellement transmissibles!