Un paraplégique remarche grâce à sa pensée et à des implants dans le cerveau
Pour la première fois, une personne paraplégique a pu retrouver le contrôle de ses jambes par la pensée. Une prouesse rendue possible grâce à deux technologies de pointe rétablissant une communication entre le cerveau et la moelle épinière.
Faire remarcher un patient paraplégique… par la pensée. Des scientifiques français et suisses ont mis au point une technologie permettant à une personne paraplégique de retrouver un contrôle naturel de la marche grâce à une interface cerveau-machine qui transforme la pensée en action.
"J'ai regagné de la liberté", résume ce patient, Gert-Jan, un Néerlandais de 40 ans. Atteint d'une lésion de la moelle épinière au niveau des vertèbres cervicales suite à un accident de vélo il y a une dizaine d'années, il peut désormais se tenir debout, se déplacer sur des terrains variés et même monter un escalier.
Contrôle du rythme des pas
"Au départ, il était incapable de mettre un pied devant l'autre", a rapporté la chirurgienne suisse Jocelyne Bloch, professeure au centre hospitalier universitaire vaudois, en présentant une étude publiée mercredi 24 juin dans la revue Nature.
Avant lui, d'autres patients qui ne pouvaient plus bouger leurs jambes ont bénéficié d'avancées leur permettant de remarcher. Mais pour la première fois, cet homme peut de nouveau contrôler par la pensée le mouvement de ses jambes et le rythme de ses pas, souligne l'étude.
“Ce patient avait déjà été implanté 3 ans auparavant avec un implant qui vient stimuler la moelle épinière pour réactiver les racines nerveuses et donc les muscles des jambes”, précise Guillaume Charvet, chercheur au CEA (Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives) et partie prenante du projet, sur le plateau du Mag de la Santé.
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"Restaurer le lien entre le cerveau et la moelle épinière"
“On parvenait donc à stimuler les muscles des jambes de ce patient grâce, mais ce n’était pas lui qui pouvait contrôler ces stimulations.” Les chercheurs ont donc ajouté des électrodes dans le cerveau du patient pour coordonner le cerveau, la moelle épinière et le mouvement des jambes.
“Le but était de restaurer le lien entre le cerveau et la moelle épinière”, ajoute Guillaume Charvet. “Les implants placés dans le crâne du patient enregistrent donc l’activité cérébrale et les données sont ensuite transmises vers un ordinateur qui va décoder les intentions de mouvement du patient.”
Ces intentions sont ensuite converties en séquences de stimulation électrique de la moelle épinière, qui à leur tour activent les muscles des jambes pour réaliser le mouvement désiré. Les données sont transmises via un système portatif placé sur un déambulateur ou dans un petit sac à dos, permettant au patient de se passer d'aide extérieure.
Vers une application pour la paralysie des bras ?
Autre avancée importante: après six mois d'entraînement, il semble avoir récupéré une partie de ses facultés sensorielles et motrices, quand bien même le système est désactivé. “Il est aujourd’hui capable de marcher et de parler en même temps”, indique Guillaume Charvet. “Il peut faire d’autres tâches cognitives qu’uniquement penser à marcher.”
Une technologie bientôt accessible au plus grand nombre ? "Il faudra encore de nombreuses années de recherche" avant sa généralisation, tempère M. Charvet à l’AFP.
Les équipes s'apprêtent déjà à lancer un essai pour restaurer, avec la même technologie, la fonction des bras et des mains. Elles espèrent aussi l'appliquer à d'autres indications cliniques, telles que la paralysie provoquée par un accident vasculaire cérébral.