Vapoter est-il mauvais pour la santé bucco-dentaire ?
La cigarette électronique s'est imposée comme une alternative populaire au tabac traditionnel. Mais quelles sont les conséquences du vapotage sur la santé bucco-dentaire ? Éléments de réponse avec la Docteure Laurence Addi, chirurgienne-dentiste.
En 2023, la proportion d’adultes âgés de 18 à 75 ans déclarant avoir déjà vapoté au cours de leur vie avait presque doublé en neuf ans, passant de 25,7 % en 2014 à 41,8%, d'après l'Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT).
Si, comme le rappelle Ameli.fr, le vapotage peut "entraîner des irritations des voies respiratoires et augmenter le risque de développer des maladies pulmonaires aiguës", comporte-t-il également des risques pour la santé bucco-dentaire ? Peu d'études ont été réalisées sur le sujet. Pourtant, la cavité orale est la première partie de notre corps à entrer en contact avec les aérosols des cigarettes électroniques. La Docteure Laurence Addi, chirurgienne-dentiste, constate des effets néfastes lors de ses consultations.
Les cigarettes électroniques, ou vapoteuses, sont composées de trois éléments principaux : un atomiseur, un réservoir d'e-liquide et une batterie, renseigne l'Agence Nationale de Sécurité Sanitaire (Anses). La majorité des e-liquides déclarés sur le marché sont composés d'un base diluante, contenant du propylène-glycol et de la glycérine végétale et parfois de l’eau et de l’éthanol. La teneur médiane en nicotine est d’environ 6 mg/ml. Ces e-liquides comportent aussi des additifs et des arômes plus ou moins sucrés en fonction du goût ou de la saveur recherchés.
Un risque accru de caries
Fruits rouges, menthol ou barbe à papa... Une étude a démontré que les aérosols des e-liquides générés par le vapotage possèdent des propriétés physico-chimiques similaires à celles de certains bonbons sucrés et de certaines boissons acides. Le principal risque lié à ces propriétés est de favoriser le développement de caries.
D'autant qu'un autre facteur rentre en jeu : "La bouche de mes patients est révélatrice du vapotage avec comme principal impact une sécheresse buccale", confie la Dre Addi. "On va avoir moins de salive alors qu'elle a un rôle protecteur majeur, qui est antibactérien et antifongique", poursuit-elle. La salive est un autonettoyant naturel, qui permet d'éviter le développement de caries et de champignons dans la bouche.
La sécheresse buccale, provoquée par l'usage régulier de la cigarette électronique, "l'empêche ainsi de jouer son rôle tampon, en rééquilibrant l'acidité globale de la bouche." Conséquence : "les bactéries prolifèrent et la plaque dentaire adhère mieux par rapport à quelqu'un qui ne fume pas, car l'émail est plus poreux ", constate la Dre Laurence Addi, qui estime par ailleurs que l'assèchement de la cavité buccale peut entraîner une mauvaise haleine.
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Microbiote buccal déséquilibré, inflammation des gencives, jaunissement des dents...
Les vapoteurs trop réguliers de cigarette électronique subissent aussi un déséquilibre de leur microbiote buccal, l'ensemble des bactéries qui protègent naturellement la bouche des micro-organismes causant caries et infections. La vapeur risque d'irriter les muqueuses, au niveau des joues et de la langue, mais aussi les gencives. Ces dernières sont également soumises à "l'effet vasoconstricteur de la nicotine, qui se caractérise par un resserrement des vaisseaux sanguins", explique la Dre Laurence Addi. Et cela peut entraîner une inflammation ou une maladie des gencives.
Utiliser une cigarette électronique peut aussi jaunir les dents. "L'émail se dissout et se déminéralise, ce qui rend la dent plus sensible à des aliments colorants, tels que la tomate, le café ou les épices", explique la Dre Laurence Addi. La coloration des dents reste moindre par rapport à celle générée par les cigarettes traditionnelles, qui contiennent du goudron, responsable du jaunissement des dents des fumeurs réguliers. Mais les adeptes de la vapoteuse ont aussi de plus en plus recours au blanchiment dentaire, en raison d'un usage trop régulier.
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Attention à l'effet "biberonnage"
Enfin, vapoter chez soi ou dans une voiture, devient plus facilement une habitude, en raison de l'odeur moins forte de la vapoteuse par rapport au tabac. "Lorsqu'on fume une cigarette traditionnelle, une certaine attention est portée à la quantité mais avec la vapoteuse, plusieurs patients m'ont confié faire du biberonnage : ils fument continuellement", confie la Dre Laurence Addi.
Les effets de la vapoteuse sont souvent jugés moindres par rapport à la cigarette traditionnelle mais le manque d'études cliniques ne permet pas encore de tirer de conclusions définitives. Pour prévenir les troubles bucco-dentaires et prendre soin de vos dents, que vous soyez vapoteurs ou non, consultez votre dentiste une fois par an.